MONTRÉAL – Kent Hughes avait la conviction qu’il était un bon agent. Son œil le trompait rarement quand il croyait avoir déniché un joueur de talent et les batailles qu’il devait livrer dans les tranchées afin de gagner la confiance d’un client potentiel ou d’obtenir les conditions gagnantes pour un de ses protégés ravivait en lui l’esprit de compétition qui l’allumait tant lorsqu’il rêvait lui-même de faire carrière sur patins.

À l’hiver 2000, il commençait à se demander si le métier le désirait autant que lui désirait le métier.

Deux ans plus tôt, il avait perdu Alex Tanguay, son client le plus prometteur, après une acrimonieuse partie de bras de fer avec le directeur général de l’Avalanche du Colorado Pierre Lacroix. Il était maintenant là à attendre des nouvelles de Vincent Lecavalier. Il y avait un mois qu’il avait rencontré la jeune vedette et son entourage afin de leur partager sa vision. Il n’avait toujours pas reçu le moindre indice à propos de leurs intentions.

« Je n’en ai jamais parlé à Vincent avant la soirée qu’on avait organisée pour souligner sa retraite, mais pendant que j’attendais sa réponse, j’avais eu une discussion avec ma femme. Je lui avais dit que c’était peut-être le temps que je me cherche un autre job en droit », a confié Hughes dans une longue entrevue accordée à RDS.

« On était en train de commencer une famille, on avait déjà notre premier enfant et c’est ma femme qui nous gardait la tête hors de l’eau financièrement avec son emploi aux États-Unis. C’était mon rêve, devenir agent, mais si je n’arrivais pas à m’établir, ce n’était pas juste envers elle. Il fallait qu’on avance. »  

Tous les jeunes agents rencontrent les mêmes difficultés. Des premières approches froides, des refus pas toujours polis, des avertissements souvent peu subtils. Chaque parcelle de territoire nouvellement conquise est un rang de moins dans le jardin d’un rival.

« Je n’essaie pas de dire que ce qui est arrivé à Kent n’est arrivé à personne d’autre avant et après lui, veut faire comprendre Anton Thun, un mentor et un proche associé de Hughes pendant plus de 25 ans. Il faut mettre son pied dans la porte et il y aura des gens qui ne voudront pas vous voir là. Mais ce que Kent a vécu est une coche au-dessus de tout ça parce qu’il était considéré comme l’intrus anglophone dans la communauté francophone du hockey. »

« C’est difficile de s’établir dans cette jungle. Soit vous vous battez pour mériter le respect, soit vous pliez l’échine et vous retournez d’où vous venez. Kent a décidé de se battre. »

Discutez avec les proches du nouveau directeur général du Canadien et ils vous diront tous la même chose. Les anglos prononceront immanquablement les mots « thick skin », un attribut qu’on prête à ceux qui savent faire abstraction des critiques. Ses amis francos vous diront, en bon Québécois, qu’il a la couenne dure.  

« Comment t’as dit ça, Nicolas? Couenne dure?, nous fait répéter Hughes à l'écoute de cette remarque. Celle-là, je ne la connaissais pas. Je vais l’ajouter à mon vocabulaire. C’est quelque chose dont je vais avoir besoin, je crois! »

Caractère, patience, confiance. Les valeurs et les qualités qui ont habité Kent Hughes dans l’expansion de l’entreprise qu’il a délaissée pour accepter l’invitation de Geoff Molson et Jeff Gorton disent tout ce qu’il faut savoir sur la philosophie qui le guidera dans la reconstruction du Tricolore.

Un leader exemplaire, une vision claire

Kent Hughes a été un bon joueur de hockey. Ses anciens coéquipiers le décrivent comme un athlète doté d’une « intelligence incroyable » et un « leader hors pair ». Trente ans après son dernier tour de glace à Middlebury College, il demeure le meilleur passeur et le meilleur pointeur de l’histoire de ce programme de troisième division de la NCAA.

Mais personne n’irait jusqu’à dire qu’il est passé à côté d’une glorieuse carrière en rangeant ses bâtons.

« Malheureusement, il n’avait pas un coup de patin extraordinaire », se rappelle dans un éclat de rire taquin Raymond Alcindor, qui a succédé à Hughes comme capitaine de l’équipe de cette institution académiquement réputée au début des années 1990.

Alcindor a connu Hughes par la bande en jouant avec son frère Ryan dans la région du Lac-St-Louis. C’est « un peu par hasard », en suivant les traces de son propre frère Marc, qu’il s’est plus tard retrouvé dans le même vestiaire que le futur DG du Canadien. Les deux hommes sont devenus pratiquement inséparables et ont passé d’innombrables heures à refaire le monde sur la route qui relie le Québec au Vermont.

À l’aréna, Alcindor a vite appris à considérer Hughes comme le porte-voix de l’entraîneur-chef Bill Beaney, un vétéran qui ne manquait jamais de temps pour aider un coéquipier ou qui trouvait toujours les mots justes pour faire comprendre au groupe qu’il était nécessaire d’en donner un peu plus. Et à une époque où l’entraînement hors glace pouvait se résumer à regarder une VHS de Don Cherry’s Rock’Em Sock’Em, son assiduité à l’extérieur de la patinoire redéfinissait les standards à atteindre pour tous.  

« Il tirait tout le monde vers le haut. Avec lui, il n’y avait pas d’excuses. Middlebury, à son arrivée, était un programme de moyen à très mauvais. C’est devenu un programme extraordinaire où plusieurs Québécois sont allés jouer par la suite et je dirais que Kent a été la pierre angulaire de ça. »

Hughes sait, après ses quatre années à Middlebury College, que son avenir n’est pas entre les deux lignes rouges. Parce qu’il n’est pas tout à fait prêt à faire ses adieux au sport qu’il aime tant, il s’engage pour un an au Hammarby IF, un club de deuxième division en Suède. « Mais j’avais apporté mes livres pour étudier pour mes examens d’entrée dans les écoles de droit aux États-Unis », dit-il. Une blessure abrège finalement son aventure européenne et précipite le début de son parcours académique.

Déjà à ce moment, Hughes voit le droit comme sa porte d’entrée vers le domaine de la représentation d’athlètes. Pendant sa première année à l’Université de New York, un ami lui parle d’un contact dans un bureau juridique de Boston. Le cabinet gère les affaires de l’ancien boxeur Marvin Hagler et un avocat de la boîte, Jay Fee, représente les joueurs de hockey Cam Neely et Grant Fuhr. « J’ai obtenu une entrevue avec lui et il m’a dit que si je déménageais à Boston, je pourrais travailler pour lui. »

Hughes demande donc et obtient son transfert à l’Université Boston College. Il y fait une rencontre déterminante, celle de Robert C. Berry, un professeur reconnu pour avoir mis sur pied le tout premier cours en droit du sport aux États-Unis. « Les livres qu’on étudiait, c’est lui qui les avait écrits. C’est vraiment lui qui m’a aidé à comprendre les aspects légaux qui ont un effet sur le sport. C’est pour ça que j’ai étudié beaucoup le droit antitrust et le droit du travail, parce que ces aspects ont une influence directe sur le monde du sport professionnel. »

Quand Hughes termine ses études, Berry le dirige vers la Floride où est établi un autre de ses anciens élèves. Mitch Frankel, qui représente aujourd’hui la vedette de la NBA Kawhi Leonard, est à l’époque l’agent de Cris Carter, un receveur étoile des Vikings du Minnesota. Il dirige l’agence Impact Sports, à laquelle il souhaite ajouter un volet hockey. Hughes est son homme et devient le visage d’Impact Hockey.

Paria chez lui

Pour trouver ses premiers clients et jeter les fondations de son écurie, l’agent nouvellement certifié décide de revenir s’installer dans sa ville natale. 

« Mes expériences liées au hockey avaient toujours été à Montréal, au Québec. J’ai coaché des gars comme Jean-Francois Houle et P.J. Stock avec les Lions du Lac-St-Louis. Même quand je jouais à l’université, je revenais toujours ici l’été pour jouer dans une ligue avec des gars qui jouaient LHJMQ ou ailleurs dans la NCAA. Mon monde de hockey a toujours été ici alors qu’aux États-Unis, je ne comprenais pas encore bien les ramifications du réseau scolaire. J’y gardais un œil, mais j’étais beaucoup plus à l’aise au Québec. »

Ironiquement, le tout premier client d’Impact Hockey est un joueur repêché par le Canadien. Gregor Baumgartner n’a fini par jouer que quelques matchs dans la Ligue américaine, mais en 1997, il avait été un choix de deuxième tour, le quatrième joueur de la LHJMQ sélectionné par une équipe de la LNH. La présence d’un nouveau joueur dans les arénas du Québec dérange les vétérans de la confrérie.

« C’est une business extrêmement difficile, extrêmement compétitive où ça joue dur dans les coins et pour Kent, c’était particulièrement vrai à ses débuts, témoigne Raymond Alcindor. Il y a des joueurs qu’il pensait avoir convaincu qui, finalement, ont décidé de changer de direction à la dernière seconde. Il y a des agents avec plus d’expérience qui ne parlaient pas toujours en bien de lui. Je vais le laisser raconter ses péripéties, mais il a eu des bas, des bas, des bas... et encore des bas! »

« Même si Kent était un gars de Montréal parfaitement bilingue, il y a des agents francophones influents qui utilisaient la carte de la langue pour tenter de le discréditer, confirme Anton Thun. Sans vouloir manquer de respect à personne, les médias n’ont pas aidé non plus. Ces agents mangeaient à la même table que certains journalistes et passaient par les journaux pour tenter de détruire la réputation de Kent chaque fois qu’il tentait de recruter un jeune Québécois. »

Le cas le plus médiatisé a été celui d’Alex Tanguay. Après avoir été repêché au 12e rang par l’Avalanche en 1998, le Beauceron espérait faire le saut dans la LNH à 18 ans. Les négociations de son contrat d’entrée ont toutefois été ardues et n’avaient toujours pas abouti lorsque la date limite pour conclure une entente est arrivée. Forcé de retourner chez les Mooseheads de Halifax pour une troisième saison, Tanguay a rompu ses liens avec Hughes et a retenu les services de Robert Sauvé, un ami de Pierre Lacroix.

« C’était évident que le DG avait une préférence, disons-le ainsi, quant à la personne avec qui il désirait négocier », suggère sans détour Anton Thun.

Hughes se souvient qu’il y avait eu des « spéculations » à cet effet, mais ne va pas jusqu’à dire qu’on a manigancé pour lui ravir un client. « Ce que je sais, c’est qu’Alex était le premier de quatre choix de première ronde de l’Avalanche cette année-là. S’il signait à rabais, les trois autres n’auraient pas eu le choix de faire la même chose par la suite », se contente-t-il d’ajouter. 

Pendant le processus qui a mené à son embauche par le Canadien, Hughes s’est fait demander par Bob Gainey comment son expérience comme agent avait pu le préparer aux victoires et aux défaites, aux réussites et aux échecs, qu’il allait désormais devoir vivre sur une base quotidienne. Sa réponse a été articulée autour du cas Tanguay.

« J’étais vraiment dans une situation où soit j’allais me cacher dans un trou quelque part, soit j’acceptais les critiques et j’en ressortais grandi. Il a fallu que j’aie assez confiance en moi pour rebondir et être en mesure de défendre les décisions que j’avais prises, mais aussi que j’aie l’humilité pour prendre du recul et essayer de comprendre ce que j’aurais pu mieux faire. »

Un fin communicateur

Hughes a conclu que si c’était à refaire, il inclurait davantage les parents de Tanguay dans le processus de négociation afin de leur expliquer avec transparence les raisons derrière chacune de ses décisions concernant leur fils. Déjà, les effets de cette leçon apprise il y a 23 ans sont visibles dans sa façon de gérer le Canadien.

En conférence de presse mercredi, il a expliqué qu’après avoir échangé Tyler Toffoli aux Flames de Calgary, il avait tenu à parler à Emil Heineman, l’espoir qu’il a obtenu dans la transaction. À peine âgé de 20 ans, le jeune Suédois a déjà changé d’adresse deux fois depuis qu’il a été repêché dans la Ligue nationale. « On voulait qu’Emil sache que nous avons insisté pour qu’il fasse partie de l’échange, que son nom n’y avait pas été inclus par hasard », a dit Hughes.

Des petites attentions comme celle-là cadrent parfaitement avec l’homme que l’ancien entraîneur-chef des Stars de Dallas Jim Montgomery connaît depuis l’enfance.

« En tant qu’agent, il a développé une grande habileté dans la gestion des relations interpersonnelles, nous disait il y a quelques semaines celui qui est aujourd’hui entraîneur-adjoint chez les Blues de St. Louis. C’est le gros du job! Pour développer une liste aussi impressionnante de clients au fil des années, il faut être capable de comprendre les gens et savoir comment leur parler. »

Les deux hommes ont joué ensemble avec les Patriotes du Cégep Saint-Laurent en 1987-1988. C’est Hughes qui a vendu à Montgomery, qui a joué pendant quatre ans au Maine, l’idée d’emprunter l’avenue des universités américaines. Lorsqu’il est parti jouer au Vermont, il a continué d’aider son ami dans ses démarches. Plusieurs années plus tard, alors que Montgomery faisait la navette entre la Ligue nationale et la Ligue américaine, il a appelé son vieux complice pour lui demander s’il aimerait de nouveau s’occuper de sa carrière.

« Ce que j’ai toujours admiré de Kent, c’est qu’il travaille fort et qu’il est tellement intelligent. C’est un étudiant de la game et il a toujours pensé outside the box. Dans sa carrière d’agent, je crois que c’est la raison pour laquelle ses clients l’aimaient autant. Il les aidait à se développer autant comme joueur que comme personne, et ça c’est à cause de la communication qu’il avait avec chacun d’eux. C’est un gars honnête qui donne autant d’importance au caractère qu’à ce que tu peux faire sur la glace. » 

Une fois sa carrière de joueur terminée, Montgomery a rapidement gravi les échelons dans la profession d’entraîneur. À chacune des étapes, il a continué de s’appuyer sur les conseils de son vieux chum.

« Quand j’étais l’entraîneur à Dubuque ou à l’Université de Denver, il m’appelait pour me dire d’aller voir tel ou tel jeu de puissance, qu’il avait trouvé quelque chose de très avancé. Et il avait raison. Il voyageait pour aller voir des clients et s’il y avait un coach dans un collège quelconque qui faisait quelque chose de différent et qu’il pensait que ça pouvait aider une équipe à gagner, il me disait et j’allais voir des vidéos. Il avait toujours raison. »

Chaque fois qu’une question épineuse l’a taraudé ou qu’une décision corsée s’est présentée sur son chemin, Montgomery a fait appel à la sagesse de Kent Hughes. Il a toujours voulu que son ami sache qu’il pouvait en faire autant.

« Mais la vie est toujours belle quand on parle à Kent. C’est pour ça que je crois qu’il est fait sur mesure pour ce qu’il vient d’entreprendre. Bien sûr, il y aura des journées plus difficiles. Bûcher et en arracher, c’est la vie dans la LNH. Mais Kent aime bûcher, il vit pour ce genre de défis. Je ne suis pas surpris qu’il ait accepté l’offre du Canadien parce que c’est une opportunité pour lui d’ajouter quelque chose à son expérience de vie. »

Honnêteté et humanisme

Probablement que rien de tout ça n’est possible si Vincent Lecavalier ne devient pas le premier gros client de Kent Hughes.

« Je m’en souviens encore comme si c’était hier, raconte le gestionnaire de 52 ans. Vincent m’a appelé pour me dire qu’il avait choisi d’y aller avec moi et ma seule réaction a été de répondre "ok". Il m’a dit : "je m’attendais à ce que tu sois plus excité que ça!" Je l’étais, mais je lui ai fait comprendre que quand j’allais négocier pour lui, il allait vouloir que je garde la même poker face. J’ai raccroché, je suis descendu voir ma femme et je lui ai dit : "peut-être qu’on va continuer finalement". »

La présence d’un premier de classe dans son portfolio a affecté positivement la crédibilité de Hughes et lui a donné des arguments supplémentaires pour convaincre d’autres jeunes de lui confier la gestion de leur carrière. Des futures vedettes comme Patrice Bergeron et Kristopher Letang allaient éventuellement imiter la décision de Lecavalier.

En 2005, pendant que la LNH est paralysée par un lockout, Hughes décide de s’associer avec Anton Thun, son mentor de longue date. La nouvelle entité, créée sur rien de plus qu’une poignée de main, est baptisée MFive. Au fil des années, des joueurs comme Darnell Nurse, Drake Batherson, Anthony Beauvillier et Mike Matheson se joindront à l’équipe. Quand Hughes a annoncé à ses partenaires qu’il quittait la profession, le mois dernier, le groupe de joueurs représentés par l’agence était sous contrat pour un montant total de 290 M$.

Ensemble, Hughes et Thun ont développé une philosophie d’entreprise basée sur l’honnêteté et l’humanisme.

« On comprenait que prendre la carrière d’un athlète en main, qu’il soit de niveau junior, midget ou professionnel, c’est être constamment en gestion de crise. Pas chaque jour avec chaque joueur, mais chaque jour avec un joueur différent. Et le client n’était pas juste un nom sur un tableau. C’était important d’apprendre à le connaître sous tous ses angles, autant ses forces que ses faiblesses, afin de lui donner des outils personnalisés pour gérer tout ce qui lui arrive. »

Encore une fois, ces propos font écho à ceux tenus par Hughes lors de sa toute première conférence de presse avec une épinglette du Canadien accroché à son veston.

« J’ai passé beaucoup de temps dans mon rôle d’agent à recruter et travailler sur le côté du développement de mes joueurs, que ça soit au niveau de leurs habiletés ou de l’entraîneur hors-glace. Étudier le jeu d’un joueur, déterminer ses forces et comment on peut l’aider... Je ne veux pas être dans une organisation qui évalue un joueur et qui constate qu’il ne performe pas. Je veux comprendre pourquoi il ne performe pas. »    

« C’est vraiment plaisant de voir une bonne tête de hockey, mais surtout une bonne personne à tout égard, revenir à Montréal, s’enthousiasme son vieil ami Raymond Alcindor. De le voir aujourd’hui dans la chaise de DG du Canadien, qui est le poste la plus prestigieux dans le sport non seulement au Québec, mais au Canada, c’est un peu surréaliste, mais c’est mérité. »

Un mois après l’embauche de Hughes, les mauvaises langues qui ne le jugeaient pas assez compétent se font plus silencieuses. Les décisions prises jusqu’ici par le nouveau DG, parmi elles l’embauche d’un entraîneur sans expérience et une rupture avec un jeune vétéran respecté, ont certes soulevé des interrogations, mais elles ont le mérite d’être à l’image de l’audacieux libre-penseur qu’on nous avait présenté à son arrivée.

« J’ai toujours eu la couenne dure d’une certaine façon, note Hughes en reprenant cette expression nouvellement assimilée. Mes parents m’ont toujours dit qu’ils préféraient me laisser tranquille après mes matchs de hockey parce que peu importe ce qu’ils allaient me dire, j’avais déjà mon idée en tête. Quand ils me faisaient un compliment, je leur chantais des bêtises en ressortant tout ce que j’avais fait de mal. Quand ils me critiquaient, je leur sortais mes bons coups et leur disais qu’ils ne connaissaient rien au hockey. Tout ça pour dire que mon évaluation de moi-même a toujours été plus importante que celle des autres. Je ne dis pas ça pour être arrogant. Ça m’arrive aussi de douter de moi. Mais j’ai toujours accordé peu de valeur à ce que les autres pensaient de moi. »

Le même message s’adresse à ceux qui estiment toujours que le natif de Beaconsfield n’est pas assez québécois à leur goût. D’autres ont déjà perdu cette bataille. Que ça plaise ou non à ses détracteurs, Kent Hughes est ici chez lui.  

« Je pense que le Canadien, au niveau de la perception sociale, a pris un risque, comprenait Raymond Alcindor alors que le règne de son ancien capitaine n’était vieux que de quelques jours. Je comprends le contexte, mais je trouve ça plate. C’est sûr que ce n’est pas un Tremblay, un Roy, un Girard. Malheureusement, il y aura toujours des gens pour s’accrocher là-dessus. Mais le temps va faire son œuvre, j’en suis convaincu. »