MONTRÉAL - Parce que le Lightning risque d’être aussi déchaîné mercredi au Amalie Arena que la tempête Elsa qui se prépare à frapper la Floride, le Canadien devra surmonter vents et marées pour maintenir ses chances d’éviter l’élimination une deuxième fois de suite.

 

Mais peu importe ce qui arrivera mercredi : le Canadien a fait ce qu’il avait à faire lundi. Il a évité l’odieux d’un balayage en grande finale.

 

Il a évité l’odieux d’obliger ses partisans à voir la coupe Stanley dont ils rêvent depuis trop longtemps pour certains, depuis toujours pour d’autres, défiler dans les mains de l’adversaire plutôt que dans celles de leurs favoris.

 

Il a sauvé son honneur.

 

Et il s’est bien battu pour sauver cet honneur. Le travail colossal abattu en fin de troisième période et en début de prolongation alors que Shea Weber s’est retrouvé au cachot pour quatre minutes en raison d’un coup de bâton porté au visage d’Ondrej Palat a servi de tremplin vers la victoire.

 

« J’aurais été très déçu de voir le Canadien s’écraser dans le cadre de cette quatrième partie. Cette organisation est fière et riche en tradition. Les joueurs qui forment cette équipe sont fiers. Nous ne nous attendions pas à ce qu’ils s’écrasent et ils ne nous ont pas fait de cadeau et c’est très bien ainsi. Nous nous sommes donné trois chances de gagner un match décisif. Nous avons raté notre coup ce soir, on pourra se reprendre mercredi », que John Cooper a d’ailleurs souligné après le revers de 3-2 encaissé en prolongation.

 

Le quatrième revers consécutif en prolongation encaissé par son équipe depuis le début des séries alors que le Canadien signait lui une sixième victoire en sept parties décidées au-delà les 60 minutes réglementaires.

 

Célébrer à la maison

 

À l’image du Canadien, le Lightning a fait ce qu’il avait à faire lundi.

 

Contrairement à mes prétentions selon lesquelles cette équipe était prête – et peut-être même favorable – à l’idée d’échapper le quatrième match pour mieux célébrer la conquête de la coupe avec ses partisans, les «Bolts» ont vraiment pris les moyens pour compléter le balayage.

 

Ils l’ont prouvé en amorçant le match en lion.

 

Ils l’ont prouvé en revenant de l’arrière deux fois plutôt qu’une pour pousser le match en prolongation.

 

Ils l’ont prouvé en décochant 70 tirs en direction de la cage défendue par Carey Price qui a effectué plus de gros arrêts lundi que lors des trois premiers matchs réunis, contre les 42 tirs décochés par le Tricolore.

 

Ils l’ont prouvé en maintenant leur niveau d’implication en dépit les solides et très solides mises en échec distribuées par Shea Weber dont les coups d’épaule auraient facilement pu pousser les adversaires à tirer la «plug»…

 

Les joueurs du Lightning auraient bien sûr aimé soulever la coupe dès lundi soir pour la rapatrier à Tampa dès aujourd’hui.

 

Ils auraient ainsi permis aux membres des familles Gourde, Goodrow et Joseph – du moins ils portaient des chandails arborant les numéros de ces trois joueurs des « Bolts » – et des autres fans du Lightning regroupés dans la section 109 de célébrer avec eux.

 

Mais la nature humaine étant ce qu’elle est, et après avoir soulevé la coupe dans la bulle aseptisée d’Edmonton l’été dernier, il me semble que les joueurs du Lightning doivent – secrètement ou non – préférer célébrer sur la glace du Amalie Arena, devant leurs partisans, et avec les membres de leurs familles qui pourront être plus présents à Tampa qu’ils ne l’auraient été à Montréal.

 

« Je suis convaincu que nos partisans auraient été très heureux de nous voir revenir de Montréal avec la coupe. Quand tu as la chance de gagner, tu t’assures d’en profiter. Gagner devant ses partisans, c’est une prime. Nos partisans méritent cette célébration et j’espère que nous pourrons leur offrir ce cadeau, mais il n’y a rien d’acquis », a ajouté l’entraîneur-chef du Lightning qui n’avait rien de rien à reprocher à ses joueurs dans la défaite.

 

« On a disputé un solide match de hockey. Les deux équipes ont joué du hockey serré. Nous n’avons pas marqué sur les cinq attaques massives, mais ce n’est pas comme si nous n’avions pas créé des tas d’occasions. Le Canadien a très bien joué. Contrairement aux trois premiers matchs, nous ne sommes pas arrivés à toucher le fond du filet assez souvent. C’est sûr que les trois poteaux n’ont pas aidé. Mais on a bien joué nous aussi. Si nous disputons un match aussi solide mercredi, nous aurons des chances de gagner », a conclu le coach du Lightning.

 

Ducharme sonne l’éveil d’Anderson

 

Le Canadien a gagné grâce à un but que Josh Anderson a marqué en début de prolongation à la suite d’un très bel effort individuel et aussi grâce à la complicité de Cole Caufield.

 

Ce but d’Anderson a couronné un grand match disputé par l’attaquant qui, comme plusieurs dans le camp du Tricolore, s’était contenté de trop peu depuis le début de la finale. On pourrait même ajouter qu’Anderson s’était contenté de trop peu depuis le début des séries.

 

Ou ! Il avait toujours affiché de la fougue, il avait toujours été impliqué physiquement distribuant des mises en échec solides. Mais sa contribution offensive – trois buts, quatre points en 20 matchs disputés avant celui d’hier – laissait à désirer.

 

Pat Maroon s’est d’ailleurs assuré que tout le monde sur la planète hockey le sache alors que dans une vidéo devenue virale sur les médias sociaux il s’est permis de ridiculiser le «tough guy» du Canadien en lui criant lors de l’échauffement du match no 3 qu’il devrait être gêné de voir qu’il n’affichait qu’un petit point de plus que lui.

 

C’est qui est, il faut l’admettre, un peu vrai...

 

Lundi, Anderson s’est repris. Brillamment à part ça. Il a marqué le premier but du match. Un but qui a fait grand bien. Pas seulement à la fiche du principal intéressé, mais aussi à son équipe qui, du coup, s’offrait une première avance dans un match depuis le début de la finale. Ce but a fait grand bien parce que jusque-là, le Canadien était rien de moins que déclassé par le Lightning qui dictait le déroulement du match.

 

Josh Anderson doit être félicité pour son réveil offensif. Mais une grande partie du crédit doit aller du côté de Dominique Ducharme qui a effectué des changements importants et nécessaires à sa formation.

 

Confiné dans un trio qui n’allait nulle part en attaque alors qu’il évoluait en compagnie de Paul Byron et de Jesperi Kotkaniemi qui cherche encore à s’établir au sein de la formation, Anderson ne patinait pas dans une combinaison gagnante.

 

Ducharme lui a offert cette combinaison gagnante en le mutant avec Nick Suzuki et Cole Caufield qui sont, malgré leur jeune âge, malgré leur manque d’expérience, les deux attaquants les plus dangereux du Tricolore depuis le début de la finale. Suzuki et Caufield ont réussi tout ça en dépit du fait que Tyler Toffoli, qui devrait normalement traîner les deux jeunes fort de son expérience d’une conquête de la Coupe Stanley, les ralentissait.

 

Anderson a changé la donne au sein de ce trio. Je ne sais pas si ce sont les jeunes qui ont redonné à Anderson ses mains alors qu’il se limitait à jouer avec ses épaules, je ne sais pas si c’est Anderson qui a permis aux jeunes de maximiser leurs présences et leurs performances.

 

Mais Ducharme mérite un coup de chapeau pour cette expérience qui doit être maintenue mercredi. Une expérience qui pourrait doter le Canadien d’un vrai de vrai premier trio la saison prochaine.

 

L’exclusion de KK

 

Ducharme – avec la complicité de ses adjoints et de l’état-major – ne s’est pas arrêté là dans les décisions nécessaires qu’il a prises. Car le retrait de Jesperi Kotkaniemi est un grand coup donné par le coach.

 

Je ne remettrai jamais en doute le talent de Jesperi Kotkaniemi, car ce talent est indéniable. Il saute aux yeux lors des entraînements et lorsque les choses sont faciles sur la patinoire. Le petit gars a quand même cinq buts et huit points à son actif en 19 matchs disputés depuis le début des séries.

 

Ce n’est pas rien.

 

Mais quand ça devient difficile, KK se cherche. Il s’efface. Pis encore, il s’éclipse. Il est encore jeune en âge, mais comme il complète sa troisième saison dans la LNH et qu’il vit les séries pour une deuxième fois depuis son arrivée à Montréal, un coach ne peut pas accepter ça en grande finale. S’il veut se donner une chance de gagner bien sûr.

 

Si Ducharme et l’état-major avaient hissé le drapeau blanc après trois défaites de suite, ils auraient gardé KK dans la formation ne serait-ce que pour mousser son expérience.

 

Leur volonté de gagner au moins un match à la maison pour éviter le balayage a dicté l’entrée en scène de Jake Evans qui n’a pas la moitié du talent de KK, mais qui est doublement efficace que le jeune finlandais.

 

N’en déplaise aux défenseurs de Kotkaniemi.

 

Jake Evans a d’ailleurs fait la preuve de cette affirmation en récompensant la décision de son coach d’une performance très solide au sein d’un trio au sein duquel il était encadré de Paul Byron et Artturi Lehkonen. Un trio plus défensif certes, mais un trio qui a donné au Canadien ce qu’il avait besoin d’obtenir, au lieu d’attendre une forme ou une autre de contribution comme c’est malheureusement trop souvent le cas avec KK encore cette année.

 

Les commentaires et surtout la façon dont Phillip Danault a salué, après la victoire, la décision de favoriser Evans au détriment de Kotkaniemi en disaient d’ailleurs beaucoup sur la réelle valeur des deux joueurs.

 

Le retour de Romanov

 

Autre décision qui a souri au Canadien : celle de réintégrer Alexander Romanov au sein de la formation. Sans oublier le retour de Brett Kulak qui, à mes yeux, aurait dû revenir bien avant.

 

Mais bon ! Il n’est jamais trop tard pour bien faire.

 

Kulak a bien joué. Romanov, mieux encore. Vous le savez, j’étais pleinement en accord avec la décision de mettre Romanov de côté au début de séries. Il avait joué du hockey tellement mauvais dans les dernières cinq à six semaines de la saison, qu’il était devenu un problème pour le Canadien.

 

Mais ça ne lui enlève pas son talent et son potentiel. Un talent et un potentiel qui l’assurera de rapidement devenir un des rouages importants de la brigade défensive du Canadien.

 

Je ne sais pas s’il pourra un jour être aussi bon que Mikhail Sergachev est en voie de le devenir. Mais s’il s’en rapproche, ce sera déjà un gage de grande réussite.

 

Plus que son implication physique, c’est le tir des poignets qui a permis à Romanov de marquer le deuxième but du Canadien qui m’a impressionné. Beaucoup à part ça. Ce tir avait la vélocité de bien des tirs frappés en plus d’avoir une précision chirurgicale. Ce tir, ce n’est pas tout le monde qui est capable de le décocher. Surtout de la pointe. Vrai que le bon et valeureux Artturi Lehkonen a aidé la cause à Romanov en nuisant – légalement – à Andreï Vasilevskiy sur le jeu. Mais la qualité du tir aurait pu permettre à Romanov de surprendre bien des gardiens de la LNH – peut-être même celui des Bolts – même avec une vision parfaite pour en suivre la trajectoire.

 

J’ai bien hâte de voir l’apogée que pourra atteindre le jeune défenseur russe. Je crois vraiment qu’il a ce qu’il faut pour être bien meilleur que plusieurs l’anticipent.

 

Mais pour l’instant, commençons pour voir ce qu’il sera en mesure d’offrir pour prolonger la grande finale.

 

Quatre défaites, quatre buts rapides

 

Le Lightning a maintenant perdu une fois dans chacune des quatre rondes disputées. Chaque fois, il s’est fait poivrer un but rapide par ses adversaires :

  • Les Panthers ont marqué à 5:56 pour l’emporter 6-5 et éviter de tomber 0-3 dans la série.
     
  • Les Hurricanes ont marqué à 5:57 pour gagner 3-2 et éviter eux aussi de tomber 0-3 dans la série.
     
  • Les Islanders ont poussé la finale de l’Est à la limite des sept parties alors qu’Anthony Beauvillier a donné une victoire de 3-2 à son équipe dès la 68e seconde de jeu en prolongation.
     
  • John Anderson a scellé l’issue du match de mardi à 3:57 en complétant un très beau jeu amorcé par Cole Caufield.