Un des facteurs que j’ai le plus aimé lors de mon séjour avec le Canadien de Montréal est définitivement la passion des amateurs. Comme dans un mariage, on s’engage pour le meilleur et pour le pire! Lorsque le Canadien est revenu de son voyage difficile dans l’Ouest, plusieurs se sont mis à trouver tout ce qui va mal avec l’équipe : nous sommes trop petits, nous ne marquons pas de buts, le gardien n’est pas à la hauteur, etc. Lors de ces périodes creuses, plusieurs veulent congédier l’entraîneur, échanger des joueurs et même changer d’allégeance au club.

À l’inverse, quand l’équipe va bien, on est un peu aveugle et on regarde la situation avec des lunettes roses. Un joueur marque un but dans deux ou trois matchs consécutifs et nous le rendons le joueur qu’il n’est pas. Je fais souvent la blague qu’à Montréal, l’équipe perd trois matchs et tout doit changer, mais lorsque l’équipe en gagne trois, on prépare la parade sur la rue Ste-Catherine. Personnellement, c’est un aspect que j’appréciais beaucoup puisque je sentais toujours les gens impliqués (des fois trop) dans le meilleur des cas comme dans le pire. Ce qui est très important, c'est comprendre que nous ne sommes jamais aussi bons qu’on le pense et jamais aussi mauvais.

Cet aspect de la « folie » de Montréal est assurément un défi pour un joueur et surtout un jeune joueur. Même un joueur de 4e trio reçoit plus d’attention à Montréal qu’un joueur de 1er trio reçoit dans certaines villes de la LNH.  J’en suis un parfait exemple : j’ai passé mes trois saisons à Montréal sur un 3e ou 4e trio, mais je réussissais à me faire offrir des ententes de commandites que je n’aurais jamais pu espérer ailleurs dans la ligue. Le fait d’être un Québécois y était aussi pour quelque chose, mais c’était important pour moi de ne pas penser que j’étais meilleur que je ne l’étais vraiment. Croyez-moi, j’ai su en profiter et j’en suis très reconnaissant, mais je suis très fier de n’avoir jamais changé ma façon de jouer en pensant qu’on me devait plus. Pour moi, c’était un privilège de jouer dans la LNH et un honneur incroyable de jouer pour le CH, donc je n’allais pas laisser ces choses-là nuire à mon jeu et mon attitude puisque je me serais retrouvé dans les mineures assez vite. De toute façon, si j’avais commencé à avoir la tête enflée, mon épouse aurait été la première à me donner un claque en arrière de la tête en me disant « wake up! »

J’ai aussi été aidé par le fait que je suis arrivé à Montréal à 31 ans après avoir passé beaucoup de temps dans les mineures, mais pour un jeune, il est très facile de perdre la tête. Pensez-y, vous avez 18, 19, 20 ou 21 ans, vous recevez de très bons salaires, tout le monde vous dit comment vous êtes beau, gentil et bon... De plus, tous les restaurants et bars veulent vous avoir dans leurs établissements et la gent féminine ne vous déteste surtout pas. De là l’importance de bien encadrer les jeunes avec non seulement des vétérans, mais aussi de bons vétérans pour garder ces jeunes sur le droit chemin tel Josh Gorges qui héberge Brendan Gallagher (bien que j’aurais été surpris de voir Gallagher perdre la tête). Les Brian Gionta, Francis Bouillon, Travis Moen sont très importants à l’équipe pour toutes ces raisons ainsi que pour leur jeu sur la glace, tout comme un Hal Gill, Jeff Halpern et autres l’étaient lors de mon séjour.

Je l’ai souvent répété, il n’y a pas meilleur endroit où jouer dans la LNH que Montréal. La passion des amateurs (et des médias), même si c’est difficile à comprendre par moment, fait partie intégrante du plaisir de jouer à Montréal. Donc, l’équipe vient de gagner trois matchs en ville, tout le monde est en amour avec Thomas Vanek et on est confiant pour les séries, mais il ne faudra pas oublier de respirer par le nez lors de la prochaine séquence difficile de l’équipe puisque chacune des équipes de la LNH traverse ces séquences. Nous sommes chanceux à Montréal d’avoir une organisation qui fera tout dans l’espoir de gagner année après année. Il y aura des bonnes et mauvaises décisions, mais rappelez-vous que la direction prend ces décisions en croyant améliorer l’équipe même si ça ne fonctionne pas tout le temps.

Bon sprint final à tous, et une fois en série, on ne sait jamais… surtout avec le meilleur gardien du circuit!! ;)