Lorsque Guy Carbonneau a remis à Max Pacioretty le flambeau étroitement associé à la glorieuse histoire du Canadien, l’ancien capitaine a respecté une tradition chère au Tricolore.

En plus d’investir symboliquement Pacioretty des pouvoirs et responsabilités associés à son nouveau rôle, Carbo s’est assuré de livrer un message au 29e capitaine. « Je lui ai souhaité de profiter au maximum de cette expérience et d’avoir la chance que j’ai eue de soulever la coupe Stanley », m’a indiqué Carbonneau que j’ai joint en avant-midi vendredi.

Carbo aurait aussi pu offrir à Pacioretty quelques conseils dans l’art d’être un capitaine. Dans l’art d’être un leader capable de donner le ton autant sur la patinoire que dans le vestiaire. Mais parce que l’heure était à la fête et que les cris des partisans étouffaient la voix de Carbo, ce n’était ni l’endroit ni le moment. « Il y avait tellement de bruit que je ne peux pas te dire si Max a compris ce que je lui ai dit. Mais cette cérémonie est tellement spéciale, autant pour celui qui donne le flambeau que pour celui qui le reçoit, que le message passe tout seul », a reconnu Carbo qui a été touché par l’honneur que lui a réservé le Canadien en lui demandant de porter le flambeau bien haut avant de le remettre à Pacioretty.

Guy Carbonneau, comme les capitaines qui l’ont précédé et ceux qui l’ont suivi, pourra toujours conseiller Pacioretty s’il décide un jour ou l’autre de faire appel à lui. À eux. Il est toutefois clair qu’à ses premiers coups de patin avec le « C » brodé sur le côté gauche de sa poitrine, Pacioretty a déjà l’étoffe d’un leader, d’un vrai capitaine.

Il en a fait la preuve à plusieurs reprises l’an dernier lorsqu’il s’est élevé au-dessus des trois autres assistants afin de remplir le rôle de capitaine sans avoir le titre. Il en a fait la preuve à plusieurs reprises depuis le discours en français qu’il a prononcé lors de sa nomination. Il en a fait une fois encore la preuve en toute fin de match jeudi lorsqu’il a laissé la rondelle tirée par son joueur de centre Tomas Plekanec glisser jusqu’au fond du filet déserté par Henrik Lundqvist pour permettre à l’entraîneur-chef Alain Vigneault d’envoyer un sixième Ranger à l’attaque afin de tenter ce qui semblait alors impossible : déjouer deux fois plutôt qu’une Carey Price afin de niveler les chances alors que le meilleur gardien au monde était en voie de signer son 35e jeu blanc en carrière.

Plekanec a tiré de loin. De très loin. Et bien que la rondelle donnait nettement l’impression qu’elle se rendrait au fond du filet, Pacioretty aurait facilement pu l’intercepter et en profiter pour inscrire son cinquième but de l’année. Son deuxième dans un filet désert.

Parce que Pacioretty est l’as marqueur du Tricolore, parce qu’il a flirté avec le plateau des 40 buts sans jamais l’atteindre, parce qu’il voudrait non seulement l’atteindre, mais fracasser ce plateau et flirter vers celui des 50 buts, Pacioretty aurait facilement pu s’emparer de la rondelle et l’aider à compléter le trajet qu’elle suivait. Et ce n’est certainement pas Plekanec, un joueur qui a toujours fait passer les besoins de l’équipe avant ses objectifs personnels, qui s’en serait plaint.

Mais Pacioretty s’est bien gardé de s’interposer. « Si j’avais eu des doutes sur les chances de la rondelle de se rendre ou qu’un joueur des Rangers avait donné l’impression qu’il pourrait l’atteindre avant qu’elle ne passe la ligne rouge, c’est évident que je serais intervenu. Mais Pleky, ayant plus de matchs disputés que moi dans la LNH, je me suis limité à regarder la rondelle aller », assurait Pacioretty après le match.

Bon! Il est évident que l’ancienneté permet parfois à des vétérans de profiter de petits traitements de faveur offerts par les plus jeunes. C’est vrai chez le Canadien. C’est vrai chez toutes les équipes de la LNH. C’est une vérité du sport professionnel point.

Mais un geste comme celui de Pacioretty m’a semblé bien plus motivé par le souci d’être un bon gars d’équipe, un bon leader, un bon capitaine que par le simple fait de respecter le principe d’ancienneté.

Surtout que depuis le début de la saison, Pacioretty s’assure de louanger l’ensemble de ses coéquipiers après les rencontres. Il s’assure de bien faire passer le concept d’équipe préconisé par l’entraîneur-chef Michel Therrien. Un concept qui porte fruit comme en témoignent les résultats du Canadien après cinq rencontres. Et je ne parle pas ici seulement des cinq victoires. Je parle surtout du fait que le Canadien joue du hockey solide – après son match d’ouverture ordinaire à Toronto – du hockey inspiré, du hockey impliquant tous les joueurs.

« Je l’ai dit lors de notre voyage et je vais le répéter encore ce soir. Nous formons une équipe. Une bonne équipe. Tous nos joueurs embarquent dans le système et respectent les mandats qui leur sont donnés. Mais encore ce soir (jeudi) c’était frappant de voir que nous complétions nos rotations de trios normalement, peu importe qui les Rangers envoyaient sur la glace: leurs première ou quatrième unités. C’est une preuve concrète du concept d’équipe », assurait le capitaine.

ContentId(3.1156235):Rangers 0 - Canadiens 3
bellmedia_rds.AxisVideo

Il est évident qu’il est plus facile d’assumer un rôle de capitaine lorsque ton club enfile les victoires comme le Canadien le fait depuis le début de l’année au lieu d’accumuler les défaites. Il sera donc intéressant d’analyser le travail de Pacioretty à titre de capitaine lorsque le Tricolore connaîtra quelques matchs difficiles. Lorsqu’il amorcera une petite glissade en perdant plus de matchs qu’il n’en gagnera.

Mais en agissant comme il le fait en ce moment, en prouvant à ceux qui en doutaient peut-être un peu – ils n’étaient pas nombreux – qu’il a déjà les atouts et la confiance pour assumer son rôle de capitaine, Pacioretty démontre d’une façon rassurante qu’il saura également s’imposer dans la tourmente. Et si jamais il se sent un brin démuni pour réagir adroitement face aux écueils qui menacent son équipe et ses coéquipiers, il pourra toujours compter sur Guy Carbonneau et les autres anciens capitaines qui seront alors de bon conseil.