MONTRÉAL – Michel Therrien aurait passé pour un génie s’il avait fallu que Dustin Tokarski trouve le moyen de surprendre les Rangers de New York lundi soir.

Battu par un vétéran en pleine possession de ses moyens, le gardien de 24 ans n’a pu produire de miracle à son premier départ en carrière dans les séries éliminatoires de la LNH, mais ça n’a pas empêché Therrien de lui accorder une note de passage pleinement méritée au terme d’un baptême chargé en émotions.

« Le jeune a très bien fait ça ce soir. J’ai aimé sa prestance », a d’abord évalué Therrien, qui avait décidé d’aller au casino face à la perte de son gardien numéro un, optant pour une recrue sans expérience plutôt que d’emprunter la voie de la facilité en confiant le filet au vétéran Peter Budaj.

« On a parlé à Peter ce matin et il a réagi comme un vrai pro. Il est un bon coéquipier et il comprenait notre choix. Ça peut être difficile à accepter pour lui. Ça a été une décision difficile à prendre, mais c’était celle qu’on devait prendre », a relaté Therrien.

En Tokarski, Therrien a vu un habitué des grands rendez-vous, un gagnant de la coupe Memorial, de la coupe Calder et de l’or sur la scène internationale. Sûrement l’a-t-il cru capable d’un autre tour de force, de fournir l’étincelle dont son club avait grandement besoin après le choc encaissé la veille.

« Lorsqu’on regarde ses antécédents, on voit que c’est un gagnant. C’est pour ça qu’on a décidé d’y aller avec lui », a dit Therrien pour justifier son coup de dés.

« J’ai joué avec lui aux championnat du monde junior, je l’ai vu en action dans des matchs de grande importance. La position de gardien de but n’est pas un problème pour nous présentement », a statué P.K. Subban sur un ton rassurant dans le vestiaire des perdants.

Les échos de vestiaire

Tokarski, qui dit avoir appris qu’il serait envoyé dans la mêlée juste avant l’entraînement matinal, n’a pas semblé trop impressionné par l’ampleur du rôle qu’on venait de lui confier après son premier match dans l’uniforme du Canadien au Centre Bell.

« Beaucoup de plaisir, beaucoup d’adrénaline. J’étais excité. J’ai grandi en rêvant de jouer ce genre de match, dans les séries. J’ai eu ma chance et malheureusement, on est arrivés un peu à court », a résumé celui qui avait été obtenu de l’organisation du Lightning de Tampa Bay la saison dernière en retour de Cédrick Desjardins.

« Oui, j’étais nerveux. C’est difficile de ne pas l’être quand on joue dans cet édifice, mais c’était une bonne nervosité », a-t-il ensuite offert comme timide admission.

Selon le Elias Sports Bureau, Tokarski est devenu le sixième gardien en 25 ans à obtenir un départ en séries après avoir débuté deux matchs ou moins dans la saison régulière qui a précédé. Les autres : Michael Leighton (2011), Miikka Kiprusoff (2001), Tom Barrasso (1995), Ed Belfour (1990) et Mike Richter (1989).

« Il a bien joué, a réitéré Subban, beaucoup plus volubile que son coéquipier. Il n’avait aucune chance sur les buts qu’il a accordés. Il nous a donné une chance de gagner ce match et dans les circonstances, c’est tout ce qu’on pouvait lui demander. »

« Offensivement, on ne fait rien de mal »

Tokarski a dit de son vis-à-vis Henrik Lundqvist, auteur de 40 arrêts dans la victoire, qu’il avait joué comme la grande vedette qu’il est.

Subban, peut-être un brin orgueilleux, n’a pas été aussi élogieux dans son évaluation d’après-match.

« Offensivement, on ne fait rien de mal. Ça m’est arrivé à quelques reprises de décocher un lancer qui a dévié et qui l’a frappé sur l’épaule sans même qu’il ne le voit arriver, alors je ne m’assoirai pas ici pour vous dire qu’on ne fait pas le nécessaire pour marquer. On le fait. On a seulement besoin d’un bond favorable, d’un peu de chance, d’un gars bien placé pour le retour. C’est ça qui fera la différence », juge le meilleur marqueur du Canadien depuis le début des séries.

« On a été compétitifs, se consolait Josh Gorges, qui était sur la glace pour les trois buts des Rangers. Je crois qu’on a commis trop de petites erreurs, peut-être par nervosité, mais on a été compétitifs et si on continue dans cette voie, la chance nous sourira. Si on continue de diriger 40 lancers sur le filet adverses, le reste suivra. »

Le Canadien doit maintenant se préparer pour deux matchs au Madison Square Garden face à la possibilité qu’il ne reverra pas ses partisans avant l’automne prochain. À sa seule sortie dans « le plus célèbre aréna au monde » cette saison, le Tricolore a signé une victoire de 2-0. Un blanchissage signé Peter Budaj…

« On s’est creusé un trou, mais on respire encore, a illustré Gorges. Maintenant, on doit se rendre à New York et se battre pour notre survie. C’est comme ça qu’il faut le voir. On n’a pas fait le travail à domicile, mais il n’est pas trop tard pour renverser la vapeur. »

« Avant de penser qu’il faut gagner quatre matchs, il faut commencer par en gagner un. Et le momentum, dans les séries éliminatoires, ça peut changer très vite », s’encourage Michel Therrien.