Faut-il paniquer parce que le Canadien a perdu encore hier? Parce qu’il n’affiche qu’une victoire et qu'il a récolté seulement quatre points (1-3-2) à ses six derniers matchs?

La réponse est non. Du moins, c’est la mienne.

Si nous étions à une semaine du début des séries et que le Canadien affichait le genre de nonchalance qu’il a affichée face aux Sénateurs jeudi, il y aurait peut-être matière à paniquer un brin ou deux. Car si le Canadien amorce les séries avec la confiance aveugle qu’il affichait hier et la pensée magique que Carey Price les mènera seul à la précieuse coupe, le réveil sera brutal. Le printemps sera court. Et l’été sera lui très long.

Cela dit, s’il n’y a pas de quoi paniquer avec les récents revers, il a de quoi s’inquiéter du fait que le Canadien n’a enfilé que huit buts à ses six dernières parties.

« Ce n’est pas l’attaque qui a causé notre défaite ce soir, c’est la défensive. Il aurait fallu marquer six buts pour gagner ce soir. L’attaque n’a donc rien à voir dans la défaite. Si on a perdu ce soir et qu’on a perdu plus souvent au cours des derniers matchs, c’est parce que les autres équipes sont plus affamées que nous. On n’a pas obtenu un engagement suffisant de notre équipe ce soir. On a été battu de vitesse », a convenu Michel Therrien dans son point de presse suivant le revers de 5-2 du Canadien aux mains des Sénateurs d’Ottawa.

Je suis d’accord avec Michel Therrien: la défensive devant Carey Price et un peu le gardien il faut le dire ont fait défaut contre Ottawa.

Mais bien que Carey Price domine la LNH avec une moyenne de 1,93 but alloué par match, il sera bien difficile de gagner si le Tricolore se contente de marquer 1,33 but par match comme il le fait depuis le début de sa séquence difficile. Sa deuxième du genre après sa récolte de trois points en sept matchs (1-5-1) entre les 23 novembre et 6 décembre dernier.

Pourquoi lever le pied?

Et c’est justement à ce genre d’excès de confiance que j’attribue la défaite aux mains des Sénateurs jeudi.

Après avoir pris les devants 2-0 au premier tiers, le Canadien a cru que l’issue du match était réglée. Avec Carey Price, sa moyenne de 1,87 but accordé par match (avant la rencontre) et les Sénateurs qui ne cassaient rien de rien, les joueurs du Tricolore avaient un brin ou deux raison d’afficher cette confiance.

Mais voilà.

Lentement, mais sûrement, les Sénateurs qui n’avaient rien à perdre sont revenus. Ils ont marqué très tôt en deuxième. Ce but n’a pas réveillé le Canadien. Au contraire. La défensive du Canadien est demeurée sur les talons pour permettre à Jean-Gabriel Pageau, encore lui, de se faufiler jusque derrière le but de Price avant de remettre dans l’enclave d’où Erik Condra a marqué.

C’était soudainement 2-2 et malgré le fait que tout était à recommencer, le Canadien ne s’est encore pas réveillé.

Comme Carey n’avait accordé plus que deux buts deux fois seulement lors des 21 derniers matchs et qu’ils ont plus souvent trouvé des façons de gagner que des façons de perdre, les hommes de Michel Therrien ont donné l’impression d’attendre que le match revienne à la normale : que Carey multiplie les arrêts et qu’ils trouvent une façon de marquer à l’autre bout.

C’est là qu’ils sont tombés dans le piège.

Car pour une rare fois cette saison, Carey a été ordinaire devant le filet du Canadien. Les Sénateurs ont profité de tout l’espace que les joueurs du Tricolore leur offraient généreusement pour ajouter trois autres buts au dernier tiers.

À l’autre bout, Andrew Hammond qui a amorcé la partie en effectuant une chute sur le derrière – il a attribué cette chute à une « craque » dans la patinoire – s’est bien repris au cours des 40 dernières minutes se dressant devant les 17 tirs du Tricolore. Dix-sept tirs qui n’avaient toutefois rien de très terrifiant et qui n’ont généré que trois, peut-être quatre, bonnes occasions de marquer.

Hammond, qui a amorcé sa croisade victorieuse contre le Canadien le 18 février dernier, a ajouté une huitième victoire à sa fiche depuis son arrivée improbable dans la LNH. Huit victoires et pas encore de revers en temps réglementaire (8-0-1).

Mieux encore, le « Hamburglar » est devenu hier le 4e gardien de l’histoire de la LNH et le premier depuis 1938 à accorder deux buts ou moins à chacun de ses neuf premiers départs.

Ce n’est pas rien!

Avec une telle séquence, je ne comprends pas une seconde l’entraîneur-chef Dave Cameron de ne pas laisser Hammond surfer sur la vague qui se prolonge. Ça ne change rien de rien au fait que Craig Anderson soit son gardien numéro un. Un vers qui il se tournera une fois la vague cassée. Mais pour l’instant, comment diable peut-il ne serait-ce qu’une seconde songer à un changement de gardien?

Mais ça, c’est une autre histoire...

Karlsson s’impose

Andrew Hammond a fait sa part. Une fois encore.

Le capitaine Erik Karlsson aussi comme en témoignent son but et les deux passes qu’il a ajoutées.

« Ce gars-là est sensationnel. Tu clignes des yeux et il a trouvé une façon de se faufiler en attaque et de générer une occasion de marquer», a commenté Hammond en parlant du défenseur qui affiche 17 buts et 53 points. Quatre buts de plus que P.K. Subban et trois points de plus que le défenseur du Canadien qui a toutefois un différentiel de plus-15 alors que Karlsson est à plus-1.

« C’est notre capitaine. Quand il joue comme ça, on réagit. On le suit. Nous n’avons pas le choix. Je revois le Karlsson qui a gagné le trophée Norris (2012) », a commenté Marc Méthot qui a marqué le cinquième but des Sens.

Marc Méthot a tenu à louanger l’effort déployé par son équipe : « D’ici à la fin de la saison, tous nos matchs sont des matchs sans lendemain. On commence mal nos parties. À cause de la nervosité, de la jeune, du manque d’expérience, je ne sais pas trop. Mais l’important, c’est de trouver une façon de revenir et on l’a démontré ce soir », a ajouté le partenaire de jeu d’Erik Karlsson.

Méthot a aussi avoué que le Canadien avait aidé la cause des Sénateurs en levant le pied après 20 minutes de jeu.

« C’est vrai qu’ils n’affichaient pas le même niveau de compétition en deuxième et troisième. On a aussi été un peu chanceux sur quelques buts. Ça arrive et on doit certainement en profiter. Mardi, contre Boston, on a dominé le match. On a frappé quatre fois le poteau et on a perdu. Ce soir, j’ai marqué sur un changement de vitesse – Méthot n’a pas voulu admettre qu’il avait complètement bousillé son tir – et nous avons su maximiser nos chances. Contre un gardien comme Carey Price, tu dois en profiter. Mais Boston a encore gagné. Alors on reste à la même place dans la course aux séries. »

« On va placer ça! »

Le Canadien est encore au premier rang dans sa division en raison du match en mains qu’il détient sur le Lightning de Tampa Bay qui affiche lui aussi 91 points. Il est deuxième dans l’Est parce que les Rangers de New York, qui ont aussi 91 points, ont une partie en mains sur le Tricolore.

Les joueurs étaient donc loin de s’arracher les cheveux lorsque les journalistes sont entrés dans le vestiaire après la défaite.

Même Michel Therrien s’est bien gardé de lever le ton.

Bon! Il a convenu que son club perd plus souvent qu’il ne gagne ces temps-ci parce que les autres clubs sont plus affamés que le sien. Ce qui est assez évident il est vrai. L’entraîneur-chef du Tricolore a toutefois balayé du revers de la main ma prétention selon laquelle ses joueurs s’en remettaient trop à leur gardien pour gagner. « Ce n’est pas notre philosophie », a répliqué Therrien.

Je veux bien. Mais à voir le match aller et les Sens revenir contre un club qui leur ouvrait toute grande la porte, c’est vraiment l’impression que ça me laissait.

Questionné sur l’urgence de la situation, Michel Therrien a ajouté qu’il avait encore bien du temps avant les séries pour remédier aux petits ennuis qui minent son club. « On va placer ça », a-t-il répondu à mon collègue Philippe Cantin.

Quand il a tenté de savoir de quelle façon Therrien entendait replacer son club, le coach a refusé de dévoiler sa recette.

Elle est pourtant simple. Compter des buts!

Car s’il est vrai que le Canadien doit resserrer sa défensive pour aider un peu plus son gardien qu’il ne l’a aidé hier, le Canadien doit aussi marquer de temps en temps pour offrir une marge de manœuvre à Carey Price.

Pacioretty a marqué encore hier. Deux fois plutôt qu’une. Une fois lors d’une attaque massive, l’autre sur une échappée en désavantage numérique. Un exploit assez rare. De fait, les rois des statistiques du Elias Sports Bureau de New York n’avaient pas relevé, deux heures après la fin du match, la dernière fois qu’un joueur du Canadien ou d’un autre club de la LNH avait marqué et en attaque massive et en désavantage numérique au cours d’une même période.

C’est sans doute déjà arrivé. Je mettrais même un huard ou deux que Wayne Gretzky et même Mario Lemieux y sont déjà arrivés. Mais dans l’histoire du Canadien, ça doit faire un bout de temps...

Attendons la réponse.

Mais derrière Pacioretty, rien!

Et ce n’est pas comme si Andrew Hammond avait volé le Canadien. Outre les deux buts, je me souviens d’une belle occasion ratée par Jacob De La Rose. D’une autre de Brandon Prust. De quelques bons tirs de la pointe de Markov et Subban. Je dois en oublier une ou deux. Peut-être trois ou quatre. Mais il me semble que pour le reste, ce fut assez timide.

P.A. Parenteau?

Il a travaillé. Il a effectué quelques bonnes poussées en zone ennemie. Mais il n’a pas cadré un tir sur les trois tentés. Et il a terminé sa soirée de travail à moins-1. Bon! Faudra être patient un peu et lui offrir quelques matchs pour retrouver ses jambes, sa touche et sa confiance.

Je m’inquiète plus de Tomas Plekanec qui semble essoufflé depuis deux semaines. D’Alex Galchenyuk qui virevolte et qui donne l’impression qu’il va décoller à tout moment alors que les résultats ne viennent pas. Ou pas assez.

Que dire aussi de Devante Smith-Pelly? On veut bien qu’il soit confiné à un troisième trio qu’il distribue des coups d’épaule, mais ça ne devrait pas l’empêcher d’être capable de générer un brin, juste un brin, d’attaque...

Pas question de paniquer et de prétendre que l’heure est grave. Ça non. Mais il y a matière à s’inquiéter... un peu.