La meilleure chose que Dominique Ducharme puisse tirer de l’affreuse performance de son club qui a bêtement perdu 6-3, samedi soir, aux mains des Sénateurs est qu’en jouant aussi mal qu’ils l’ont fait, ses joueurs ont ouvert toute grande la porte à Eric Staal.

Brouillon à l’attaque, les joueurs du Canadien ont donné à leur entraîneur-chef la possibilité d’insérer Staal au centre de n’importe lequel des quatre trios et de l’utiliser dans n’importe quelle circonstance.

Malgré son âge, malgré la quarantaine qu’il vient tout juste de compléter, malgré le fait que ce soit en solitaire qu’il prendra part dimanche à son premier « entraînement » avec le Canadien, le grand joueur de centre ne pourra certainement pas faire pire que ses nouveaux coéquipiers ont fait samedi. En fait, il y a fort à parier qu’il fera mieux. Bien mieux!

Le grand joueur de centre disputera son premier match dans l’uniforme tricolore contre Connor McDavid et les Oilers d’Edmonton qui feront escale au Centre Bell pour la deuxième fois en moins d’une semaine.

Je sais bien que le plan logique serait de placer Staal au centre du quatrième trio et d’ensuite voir comment ajuster ses affectations. Mais à voir de quelle façon les trois autres joueurs de centre – je tiens pour acquis que Jake Evans écopera pour faire une place au nouveau venu – ont joué samedi, Staal pourrait piloter l’un des trois premiers trios sans problème.

Ducharme a procédé samedi à des expériences intéressantes. Bon! Les résultats sont loin d’avoir tous été concluants.

Mais il était malgré tout intéressant de voir Corey Perry à la gauche de Nick Suzuki et de Josh Anderson. Ce trio et surtout les deux buts enfilés par Anderson ont représenté une rare source de satisfaction – ou de consolation – samedi. Avec ses 12e et 13e buts de la saison, Anderson a égalé sa production des 17 derniers matchs.

Suzuki a récolté deux passes ce qui est bien pour les statistiques personnelles. Mais au-delà ces deux passes et une rare soirée phénoménale aux cercles de mises en jeu (13-en-18), le jeune centre a encore semblé dépassé par le rythme du match à plusieurs occasions. Ce qui est un brin normal compte tenu de son âge et de son niveau d’expérience.

Il était aussi intéressant de voir Jonathan Drouin et Tyler Toffoli encadrer Jesperi Kotkaniemi. Ce qui est surtout intéressant, c’est qu’il était évident qu’il manquait de cohésion et de conviction au sein de ce trio. Le genre de cohésion et de conviction que Staal pourrait apporter. Que ce soit à titre de centre ou d’ailier...

Même le trio qui était le meilleur du Canadien depuis quelques matchs, celui de Phillip Danault flanqué de Tomas Tatar et Brendan Gallagher a été ordinaire samedi. Très ordinaire! Normalement si efficace, surtout à forces égales, ce trio a été victime de l’un des trois buts du quatrième trio des Sens. Un but important alors qu’Evgenii Dadonov a donné les devants aux Sénateurs pour la troisième fois du match, 57 secondes seulement après qu’Anderson eut nivelé les chances 2-2 en début de deuxième période. Un but qui a fait mal…

Là encore, Staal aurait pu être utile. Comme il aurait peut-être été en mesure de convertir en but l’un des 11 tirs que le Canadien a obtenus sur ses quatre dernières attaques massives.

On verra dès lundi soir de quelles façons et surtout à quel point Staal pourra être utile au Canadien.

Lamentable en défense

Le seul ennui pour Ducharme est qu’à la lumière du match affreux de samedi, est que Staal sera déjà bien trop occupé à l’attaque pour aussi venir en renfort à la ligne bleue où le Canadien a été, samedi soir, plus brouillon encore qu’il ne l’a été à l’attaque.

En fait, le Canadien ne s’est pas contenté d’être brouillon en défensive. Il a été tout simplement lamentable.

À commencer par Jeff Petry et son partenaire Brett Kulak qui en ont arraché sans bon sens. Pas question de tomber outre mesure sur le dos de Petry qui est sans doute le joueur le plus constant du Canadien depuis le début de la saison, mais le vétéran a terminé sa soirée de travail avec un différentiel de moins-5 qui illustre très bien la « qualité » de la partie qu’il a disputée.

« Après un aussi mauvais match, tu tournes la page le plus vite possible et prends les moyens pour rebondir dès le match suivant », que le vétéran défenseur a candidement admis après la rencontre.

Shea Weber – malgré ses deux passes – et Joel Edmundson ont été ordinaires. De fait, on pourrait avancer sans risque de se tromper que Victor Mete a été le meilleur arrière du Canadien samedi et que son duo complété par Alexander Romanov a le mieux paru. Ce qui n’est pas nécessairement un gage de succès collectif. On en conviendra tous je l’espère...

« On n’a pas été bon », a plusieurs fois répété Ducharme en guise de constat d’ouverture à plusieurs des réponses offertes après le revers de samedi.

En plus d’aimer la franchise des propos du nouveau coach, j’ai beaucoup aimé le fait qu’il soit malgré tout demeuré bien solidement campé derrière son équipe.

« On a joué un mauvais match de hockey. Ça arrive. Mais ce n’est pas arrivé souvent depuis que je suis derrière le banc – fiche de 7-4-3-2 en 16 rencontres disputées depuis qu’il a succédé à Claude Julien – et il faut savoir tirer les leçons d’un match comme celui de ce soir. Il faut surtout éviter de faire des cadeaux comme nous en avons donné ce soir », a averti le coach.

Ce serait une bien bonne idée en effet.

Car des six buts marqués par les « Sens » – le sixième dans une cage déserte – les défenseurs du Canadien ont grandement aidé la cause de leurs adversaires en se rendant coupables de vilaines couvertures défensives, de mandats complètement loupés et aussi, et surtout, de revirements coûteux qui ont placé Carey Price plusieurs fois dans des situations précaires.

Pas de miracles devant le but

Parce que les Sénateurs l’ont déjoué cinq fois sur 31 tirs, Price – c’était prévisible – a été la cible de critiques acerbes.

Comme ses défenseurs, le gardien du Canadien a mal paru à quelques reprises. Il a été surpris. Il a été pris de court. Mais bien qu’il aurait pu « sauver » ses coéquipiers avec des arrêts inattendus, il est difficile de lancer avec raison que Price a été faible sur l’un ou l’autre des buts.

D’ailleurs c’est après un très gros arrêt de la jambière droite qui a permis à Price de voler Dadonov en début de période médiane que Anderson est allé créer l’égalité sur la poussée suivante.

Dadonov s’est repris en faisant dévier une rondelle tirée de la pointe que Price aurait facilement bloquée, n’eût été changement de direction. Dadonov était fin seul dans l’enclave où il a été rejoint pour marquer son deuxième du match. Sur le but d’Alex Formenton, Petry mérite une mention d’aide.

On peut reprocher à Price le retour qu’il a mal contrôlé sur le tir de Nick Paul et qui a permis à Connor Brown de marquer alors que les « Sens » écoulaient une pénalité. On peut aussi lui reprocher de s’être fait surprendre par Brady Tkachuk sur un jeu du grand tourniquet qui a permis au jeune attaquant de marquer en avantage numérique.

De là à conclure qu’il s’agit de mauvais buts : il y a un fossé que je ne suis pas prêt à franchir.

Le plus surprenant dans les critiques en cascades qui ont déferlé sur Price, c’est qu’on lui reprochait d’avoir – une fois encore – été incapable de jouer à la hauteur de son salaire et de sa réputation. On lui reprochait de n’avoir pas été en mesure de garder son équipe dans le match alors que son nouvel adjoint Jake Allen y serait arrivé.

Vraiment?

Price a encaissé samedi sa deuxième défaite en temps réglementaire à ses 10 derniers départs (6-2-2-0). Allen – et ce n’est pas une critique à son endroit, car il fait du très bon boulot depuis le début de l’année – a signé jeudi, à Ottawa, sa première victoire après six revers consécutifs (1-2-4-0). Comme quoi Price n’a pas la moindre marge d’erreur face à ses détracteurs.

Mais bon!

Weber-Tkachuk : défi relevé

Très discret – à l’image des Sénateurs au grand complet – jeudi, à Ottawa, Tkachuk a été beaucoup plus actif samedi au Centre Bell.

Non seulement a-t-il donné le ton au match en marquant le premier but de la rencontre 42 secondes après la mise en jeu initiale, mais il s’est permis de jeter les gants devant Weber.

« C’est le genre de défi que je ne pouvais refuser. Nous avions tous l’intention de venger notre piètre performance de jeudi. On l’a fait. Nous étions plus rapides, plus impliqués. Je suis le genre de gars qui veut gagner et qui est prêt à prendre tous les moyens pour y arriver. Weber est le même genre de joueur. Ce n’était pas évident de jeter les gants contre lui. Habituellement, c’est moi le plus fort dans ce genre de duel. Ce n’était pas le cas ce soir. Je me suis accroché et en me disant : accroche-toi à ta survie. Mais c’était une expérience intéressante », que Tkachuk a commenté en esquissant un petit sourire.

Il faut dire que le jeune et fougueux attaquant des « Sens » s’est bien tiré d’affaire. Il a évité les taloches du capitaine du Canadien qu’il a même réussi à renverser.

Entraîneur-chef des Sénateurs, D.J. Smith n’aime pas voir Tkachuk jeter les gants. Du moins habituellement. Mais samedi, il a compris. « Je ne veux pas perdre les services d’un de mes meilleurs joueurs dans le cadre de combats orchestrés. Ça ne sert pas la cause de l’équipe. Ce soir, on était en face de deux gars qui voulaient aider leur club à gagner. On a perdu Brady pour cinq minutes, mais le Canadien a aussi perdu son meilleur défenseur », a commenté Smith qui était bien plus satisfait de sa troupe qu’il ne l’était après le revers de jeudi.

« Nous avions plus de jambes et plus de conviction dans notre jeu. Tout le monde a mis l’épaule à la roue. Nos trios ont tous joué sensiblement le même temps. Nos défenseurs ont tous été impliqués. Quand tes gars roulent de la sorte, tu peux foncer à 100 milles à l’heure et mettre de la pression comme on l’a fait ce soir. Ce qui me satisfait le plus est le calme affiché en fin de match. Plus tôt cette saison, l’avance de deux buts en fin de troisième n’aurait pas été suffisante. On se serait retrouvé en prolongation. Ce soir, on a su tenir bon. Après la défaite de jeudi, c’était bien de se reprendre comme on l’a fait ce soir. »

Avec cette victoire de 6-3, les Sénateurs affichent maintenant quatre victoires après sept des dix matchs prévus face au Canadien. C’était donc la quatrième défaite du Tricolore qui a perdu deux fois en temps réglementaire, une fois en prolongation et une autre en tirs de barrage.

Entre les lignes

Acquis au ballottage le 17 mars dernier, Anton Forsberg est devenu, samedi, le cinquième gardien à signer une victoire jusqu’ici cette saison avec les Sénateurs. Âgé de 28 ans, Forsberg a repoussé 35 des 38 tirs du Canadien dans le cadre de son premier départ en carrière face au Tricolore. Le gardien suédois a récolté son premier gain de la saison, son 13e en 50 matchs en carrière dans la LNH...

En plus de Forsberg, Matt Murray (7), Filip Gustavsson (2), Marcus Hogberg (2) et Joey Daccord (1) ont signé l’une ou l’autre des 13 victoires des Sénateurs cette saison...

Aux prises avec des blessures qui les privaient de Murray et Hogberg, les Sénateurs ont mis la main sur Forsberg le 17 mars dernier après que les Jets de Winnipeg l’eurent soumis au ballottage. Une décision qui a souri au directeur général Pierre Dorion puisque Daccord est ensuite tombé au combat à son tour. Embauché à titre de joueur autonome par les Oilers l’automne dernier, Forsberg est ensuite passé par la Caroline et Winnipeg alors que les Canes et les Jets l’ont acquis au ballottage avant de le perdre de la même façon...

Le Canadien a été victime de son deuxième but accordé alors qu’il évolue en attaque massive cette saison. Devin Shore, des Oilers, avait marqué le premier le 18 janvier dernier dans une victoire de 3-1 du Tricolore à Edmonton...

Il est important ici de rappeler que le Tricolore domine la LNH avec huit buts marqués à court d’un homme jusqu’ici cette saison...

Bien que plusieurs statistiques semblent indiquer que le Canadien a nettement dominé la rencontre – 38 tirs cadrés contre 32, 68 tirs décochés contre 5, 12 tirs décochés en attaque massive contre trois, 33 mises en échec contre 27, 37 mises en jeu gagnées contre 26 – le score final dresse un portrait bien plus fidèle de la rencontre...

Les Sénateurs se rendront à Winnipeg dimanche en vue du match de lundi contre les Jets. Un match qui a été ajouté dans leur calendrier en raison des nombreux contrecoups associés aux matchs reportés des Canucks de Vancouver dont 16 joueurs et plusieurs membres du personnel ont été foudroyés par la COVID-19...