MONTRÉAL - « Je ne viens pas ici en tant que professeur suppléant, mais pour montrer ce que je peux accomplir. J’ai l’intention d’être ici longtemps et je vais devoir le mériter. »

Tout au long de sa carrière, Martin St-Louis a surmonté des obstacles. Il est même devenu une inspiration pour le caractère qu’il a démontré et qui l’a mené jusqu’au Temple de la renommée. 

Cela dit, Kent Hughes, directeur général, et Jeff Gorton, vice-président exécutif aux opérations hockey, ont opté pour une décision qui apparaît comme un risque en embauchant St-Louis qui ne dispose d’aucune expérience, à un haut niveau, derrière un banc. 

D’entrée de jeu, St-Louis a expliqué sa vision par rapport au titre intérimaire qui en a fait sursauter plusieurs. 

« Maman sourit de là-haut [...], c'est spécial pour ma famille »

« Pour moi, ce fut toujours un rêve d’être entraîneur dans la LNH. Ce n’était pas si, mais quand. Lorsque Kent m’a approché, je n’avais aucun doute que c’était une très bonne opportunité et le bon moment. Le terme ou le titre, ça ne me dérangeait pas, c’est l’opportunité que je voulais. Toute ma vie, je n’ai cherché que des opportunités, je n’ai pas besoin d’avoir des promesses. Donne-moi une chance et je vais te montrer ce que je peux faire », a-t-il lancé avec assurance. 

« On croyait qu’on avait besoin d’un changement rendu à ce stade de la saison. On trouvait qu’on devait faire une décision rapidement et Martin était prêt à accepter le poste par intérim », a précisé Hughes à ce sujet. 

St-Louis hérite de tout un mandat et le congédiement de Dominique Ducharme pouvait laisser croire que le nouvel état-major du CH se tournerait vers un entraîneur expérimenté. Un confrère a voulu être poli en disant à St-Louis que son unique expérience était à un niveau « très junior ». 

« T’es gentil, il me semble que c’était pee-wee, a rétorqué St-Louis sans gêne. Je sais que je n’ai aucune expérience derrière le banc, mais j’en ai beaucoup sur le banc, dans le vestiaire et sur la glace. Je sais comment chaque joueur se sent puisque j’ai été un gars des mineures, j’ai joué sur chaque trio et je me suis rendu parmi les étoiles. J’ai le pouls de ce que les gars traversent. Je n’ai pas peur de ce saut et je sais que je vais m’améliorer chaque jour. »

St-Louis a précisé qu’il se prépare depuis une dizaine d’années pour cette avenue. Il a suivi de près les activités de la LNH et il a décliné des offres pour se joindre à des équipes du circuit Bettman à temps plein. 

De plus, en raison de ses exploits sur la patinoire, St-Louis devrait facilement obtenir le respect de ses joueurs. 

« Si vous aviez été dans le vestiaire quand Martin a parlé aux joueurs, vous auriez eu la chair de poule. On ressentait une énergie. Il investit tout dans ce défi et les joueurs l’ont senti en 10 minutes. Je crois que ça va aider tout le monde, ce sera l’occasion pour certains d’avoir une deuxième chance », a confié Gorton en démontrant le respect qu'il commande. 

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Cette déclaration expose une triste réalité qui s’observe souvent dans le sport professionnel. Les athlètes ont tendance à ne pas accorder le même crédit à un entraîneur qui accède aux circuits majeurs sans y avoir joué. 

St-Louis a d’ailleurs eu une pensée pour Ducharme qui a été victime de ce constat.

« C’est un très bon ami, ce sont des circonstances très difficiles de le remplacer. Je suis certain qu’on va en parler éventuellement. Je sais que c’est une très bonne tête de hockey et une bonne personne, il va rebondir et faire de bonnes choses dans le hockey. C’est très délicat », a confié l’homme de 46 ans. 

Pour l’instant, St-Louis devra se débrouiller avec les ressources à sa disposition alors que le Canadien pourrait se lancer dans une reconstruction dont l’ampleur demeure à identifier. À ce propos, Gorton et Hughes ont admis qu'ils auraient pu trouver du renfort, dont devant le filet, pour Ducharme, mais ils ne voulaient pas déroger de leur plan à long terme. 

« On aurait pu faire davantage pour aider l’équipe de Dominique à gagner plus de matchs, mais notre objectif est de bâtir une équipe qui aura du succès pendant plusieurs années. C’est le premier changement de plusieurs », a noté Hughes.  

C’est connu que des liens unissent St-Louis à Gorton et Hughes. Le petit attaquant évoluait pour les Rangers de New York lorsque Gorton agissait comme directeur général adjoint. Quant à Hughes, ses fils sont des coéquipiers d'un garçon de St-Louis à l'Université Northeastern et il était l'agent de Vincent Lecavalier, un grand ami de St-Louis. Ce n’est pas tout, Hughes avait même convaincu l’Université du Vermont de recruter St-Louis. 

« Que Martin soit un ami ou pas, ça n’a aucun rapport. On cherche des gens qui cadrent avec notre vision », a soutenu Hughes qui a également insisté sur le fait que St-Louis personnifie exactement la culture qu’il souhaite implanter à Montréal. 

Un changement inévitable

Dans les dernières semaines, Gorton et Hughes avaient mentionné que Ducharme finirait la saison, mais ils ont changé leur fusil d’épaule. 

« Plus la saison avançait, plus je trouvais que ça se détériorait. En parlant avec Kent de ce qu’on devait faire étant donné qu’il reste 37 matchs, ça fait beaucoup de hockey et bien de l’enseignement doit avoir lieu, on trouvait que c’était le moment de procéder à un changement », a répondu Gorton.  

« On avait décidé récemment qu’il ne reviendrait pas l’an prochain et que c’était désormais mieux de le remplacer », a ajouté Hughes.  

Si Ducharme n’a pas pu se faire justice avec les conditions très précaires de la saison actuelle (l’été écourté, la perte de Weber et Price, les autres blessures, les cas de COVID-19), St-Louis vit une très belle histoire. Son père, Normand, a toujours été un immense partisan du Canadien. 

« Il était le 10e de 14 enfants. Dans son enfance, il a d’abord suivi les matchs à la radio. Ensuite, il n’avait pas de télévision à sa maison donc il devait aller regarder, au froid, la troisième période devant la vitrine du magasin de télévision. De voir son fils derrière le banc du Canadien, je sais qu’il est fier et que c’est spécial pour lui », a exprimé St-Louis. 

Sa mère, qui est décédée, occupait aussi une grande partie de son cœur. 

« Elle sourit de là-haut. Elle m’a toujours dit de montrer aux gens ce que je pouvais faire », a rappelé St-Louis qui est prêt à s’y atteler dans ce nouveau chapitre de sa vie. 

À travers 16 saisons dans la LNH, St-Louis a récolté 391 buts et 642 aides (1033 points) en 1134 matchs avec les Flames de Calgary, le Lightning de Tampa Bay et les Rangers de New York. Il a été un pilier de la conquête la coupe Stanley par le Lightning en 2004.

 

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