Avec son but en prolongation oui, mais bien plus encore avec l’aisance, la confiance et l’efficacité qu’il a encore affichées samedi soir dans le cadre du dernier match préparatoire, Nick Suzuki a sans l’ombre d’un doute assuré sa place au sein de la formation en vue du match d’ouverture du Canadien, jeudi prochain, en Caroline.

 

Après Victor Mete il y a deux ans, à Buffalo, et Jesperi Kotkaniemi l’an dernier, à Toronto, Nick Suzuki effectuera un bond de géant en passant directement des rangs juniors à la LNH. Et à l’image de Mete et Kotkaniemi, il réalisera avec succès ce grand saut alors que pas grand-monde chez le Canadien et aux quatre coins de la Ligue lui donnait des chances de réussir.

 

Suzuki a non seulement bien joué à chacun de ses matchs préparatoires. Il a très bien joué. Et il a très bien joué peu importe avec qui il évoluait, peu importe où il évoluait et peu importe la façon dont il jouait.

 

Et c’est sans doute ce dernier point qui joue le plus en sa faveur en ce moment. Oui! Je sais! Son talent, sa vision, son sens du jeu lui ont valu des éloges en cascades de la part des vétérans l’entourant dans le vestiaire. Mais le fait que Suzuki ait démontré autant de sang-froid et autant d’aisance à s’adapter à des compagnons de trio qui défilaient autour de lui et aux différentes situations dans lesquelles Claude Julien l’a plongé, milite bien plus en sa faveur que les buts et les aides qu’il a marqués et récoltées.

 

Car c’est sa façon de jouer qui intéressait l’état-major d’abord et avant tout. Et quand un gars joue aussi bien que Suzuki l’a fait jusqu’ici, tu peux difficilement t’en priver. Peu importe son âge, son manque d’expérience, ou la vitesse de son coup de patin.

 

Comme Mete et Kotkaniemi avant lui, Suzuki profitera donc de la philosophie du directeur général Marc Bergevin et du Canadien, philosophie selon laquelle les jeunes qui forceront la main de l’état-major seront récompensés.

 

Si l’on s’appuie uniquement sur cette philosophie, Suzuki ne devrait pas être le seul jeunot à disputer son premier match dans la LNH jeudi prochain… ou son deuxième.

 

Il devrait être accompagné par le défenseur Cale Fleury et par Ryan Poehling qui a disputé son tout premier lors du tout dernier match du Tricolore le printemps dernier. Qui a oublié le tour du chapeau qu’il a réalisé avant de l’auréoler d’un but décisif en tirs de barrage.

 

Car sur le strict plan hockey, Cale Fleury a été presque aussi bon à la ligne bleue que Nick Suzuki l’a été à l’attaque.

 

Ce n’est pas rien!

 

Fleury : considérations administratives

 

L’ennui pour Fleury, c’est que les considérations hockey ne seront pas les seules à être considérées dans le cadre des décisions finales du Canadien. Et ces considérations pourraient retarder son arrivée avec le grand club.

 

Bien qu’il ait été bien meilleur que Mike Reilly et Christian Folin, Cale Fleury pourra être cédé à la Ligue américaine au cours des prochaines heures sans avoir à être soumis au ballottage.

 

Les deux autres devront y séjourner si l’état-major décide de les reléguer à la ligue américaine. Ce qu’ils mériteraient après un camp d’entraînement difficile, voire carrément mauvais.

 

Pourquoi l’état-major se retiendrait de les offrir à qui bon en voudrait?

 

La réponse est simple : parce que le Canadien ne veut pas bêtement les perdre au ballottage.

 

Plusieurs amateurs et même plusieurs collègues lanceront – non sans raison – que le Canadien enverrait un bien mauvais message à Fleury, aux autres jeunes de l’organisation, au reste de l’équipe et bien sûr aux partisans en fermant la porte au nez d’un jeune qui mériterait d’emblée de la voir s’ouvrir toute grande devant lui.

 

Surtout que l’avenir du Canadien passe bien plus par Cale Fleury que part Reilly et/ou Folin.

 

Cette affirmation est vraie.

 

Mais Reilly comme Folin ont offert de bonnes performances l’an dernier. Le premier en début de saison, le deuxième tard en saison.

 

Et bien qu’ils aient bousillé ces séquences plus heureuses par des camps d’entraînement malheureux, j’ai l’impression que l’état-major voudra voir s’ils sont capables de se reprendre une fois la vraie saison commencée. En plus, Reilly et Folin offrent au Tricolore une profondeur à la ligne bleue sur laquelle Marc Bergevin tient autant qu’il tient à ses plus beaux habits.

 

Je crois qu’il refusera de prendre la chance de perdre l’un ou l’autre au ballottage d’avant saison et que c’est pour cette raison que Fleury pourrait se retrouver à Laval malgré qu’il mérite de commencer l’année à Montréal.

 

À moins, et ça c’est une possibilité, que l’état-major décide d’amorcer la saison avec huit défenseurs. Ce qui ouvrirait la porte à Fleury.

 

Bon débarras!

 

Bon! J’entends plusieurs partisans hurler que le Canadien ne devrait absolument pas craindre de perdre Reilly ou Folin au ballottage. J’en entends même hurler plus fort encore qu’il devrait espérer qu’ils soient réclamés.

 

Je vous comprends!

 

Mais si vous regardez une seconde la composition de la brigade défensive des Jets de Winnipeg, vous verrez tout de suite qu’un gars comme Folin serait le bienvenu sur un flanc droit qui est décimé. Nathan Beaulieu est le défenseur numéro deux des Jets. Ça vous donne une idée de la porosité de cette brigade.

 

Reilly? Ses aptitudes offensives – ses seules qui méritent d’être soulignées – lui valent un intérêt affiché par quelques organisations autour de la Ligue. Et de très bonnes à part ça qui cherche justement de la profondeur au sein d’un troisième duo ou simplement comme police d’assurance.

 

Le Canadien le sait sûrement.

 

Comme il en sait sans doute plus que vous et moi sur l’état de santé réel de Noah Juulsen. Si Juulsen est sur le point de jouer du vrai hockey. Si Juulsen est en mesure de donner et d’encaisser des impacts sans risque de se retrouver sur la touche pour une longue période, voire d’être contraint à mettre une fin abrupte à sa carrière, le Canadien peut se permettre de perdre Folin au ballottage.

 

Si l’état de santé de Juulsen soulève toujours plus de questions qu’il ne permet d’avancer des réponses, Folin doit demeurer avec l’équipe. D’où la possibilité qu’on le préfère «administrativement» et non sur le plan hockey à Fleury.

 

Même chose pour Reilly. Car si le gaucher devait mettre le cap sur une autre organisation, Xavier Ouellet deviendrait la police d’assurance à gauche.

 

Et j’ai bien l’impression que c’est à titre de capitaine du Rocket de Laval et non comme police d’assurance à Montréal que l’état-major entrevoit l’avenir du défenseur québécois au sein de son organisation.

 

Cela dit, si le Canadien décide de céder Cale Fleury à Laval au cours des prochaines heures, j’ai la conviction qu’il n’y passera pas l’année.

 

Non seulement serait-il le premier rappelé en cas de blessure, mais si Folin et/ou Reilly devaient confirmer dès le début de la saison que leur camp d’entraînement moribond était une indication du point où ils sont rendus dans leur carrière, Bergevin et son état-major prendraient rapidement la décision de les larguer.

 

Mais par mesure préventive, ils voudront se donner cette période de réflexion.

 

Car c’est souvent pour obtenir des joueurs de ce type dans le dernier droit menant à la date limite des transactions que des clubs paient trop cher. Il serait donc bête de les perdre sans rien obtenir en retour au début du mois d’octobre et d’avoir à la remplacer en échange de choix au repêchage ou de jeunes espoirs à la fin du mois de février.

 

Poehling : audition à prolonger

 

La décision de garder ou non Ryan Poehling à Montréal sera directement reliée à la décision finale rendue dans le cas de Cale Fleury.

 

Car si le Canadien décide de garder huit défenseurs, il ne pourra donc garder que 13 attaquants. Dans une telle éventualité, Nick Cousins, Nate Thompson et même Joel Armia devanceraient Poehling au sein de ce groupe.

 

Pour le moment!

 

De toute façon, tu ne veux pas garder des jeunes comme Poehling et Fleury avec le grand club pour bêtement les garder sur la galerie de presse. Ils doivent jouer. Et joueur souvent. Même si c’est dans la Ligue américaine.

 

À l’opposé, si le Canadien opte pour 14 attaquants, je vois très bien Poehling amorcer la saison avec le Tricolore ne serait-ce que pour prolonger son audition qui a été écourtée un brin par la commotion subie lors du deuxième match préparatoire.

 

Poehling est à un cheveu de faire le grand saut. Et contrairement à Suzuki qui devrait aboutir sur l’un des deux premiers trios, je vois très bien Poehling évoluer et connaître du succès au sein d’un ou l’autre des troisième et quatrième trios.

 

Il pourrait remplacer à moyen terme un gars comme Nate Thompson. Ou alléger le travail du vétéran en lui offrant des soirées de congé ici et là.

 

Mais pour l’instant, et dans leur rôle respectif, je crois que les Thompson, Nick Cousins, Jordan Weal et même Joel Armia devancent Poehling.

 

Mais ce n’est qu’une question de temps avant que les rôles soient renversés. Et je ne crois pas que cela prendra beaucoup de temps.

 

Comment je vois le Canadien amorcer la saison jeudi prochain en Caroline?

 

Avec les trios, les duos et les substituts suivants :

 

Tatar – Danault – Gallagher

Drouin – Domi – Suzuki

Lehkonen – Kotkaniemi – Byron

Weal – Thompson – Armia

 

Cousin – Poehling

 

Mete – Weber

Chiarot – Petry

Kulak – Folin

 

Reilly

 

Price – Kinkaid

 

Entre calme plat et nervosité contrôlée

 

Les décisions finales et non les projections de tout un chacun tomberont d’ici les 48 prochaines heures. Période au cours de laquelle les trois jeunes composeront comme ils le peuvent avec la nervosité normale associée à des moments aussi charnières d’une carrière, puisque le Canadien a congé d’entraînement dimanche et lundi.

 

Des trois, Nick Suzuki peut dormir sur des deux oreilles. Ça me semble évident. Et c’est un peu ce qu’il m’a dit qu’il ferait lorsque je l’ai croisé dans le vestiaire après le match de samedi.

 

«Je ne suis pas du genre à me faire du mauvais sang lors de situations semblables. Je crois avoir offert des performances susceptibles de me permettre de commencer l’année ici et je ne perdrai pas de sommeil en attaquant la décision finale», que le jeune Suzuki m’a lancé.

 

Fleury et Poehling dont l’avenir à court terme est intimement lié en raison des décisions de garder 14 attaquants ou huit défenseurs attendront ensemble.

 

«Nous sommes au même hôtel et nous passons beaucoup de temps ensemble. Je ne suis pas du genre à me ronger les ongles nerveusement. On va sûrement parler de nos camps, échangez nos analyses, mais je crois que c’est surtout en jouant aux cartes que nous attendrons décisions finales», a indiqué Poehling.

 

«Ce sera long, a pour sa part convenu Fleury. Mais je me sens bien parce que je suis fier de ce que j’ai accompli depuis le début du camp. J’ai tout donné et je crois avoir assez bien joué pour justifier ma place à la ligne bleue du Canadien. Ce n’est pas comme si j’étais torturé par des tas de mauvais jeu. Il y a toujours place à l’amélioration, mais dans l’ensemble je crois en mes chances. Je serai nerveux en attendant de savoir ce qui m’attend, mais ce sera de la nervosité contrôlée», a conclu le jeune défenseur.

 

Que Suzuki soit le seul à commencer l’année à Montréal qu’il soit accompagné de Poehling, de Fleury ou des deux, l’important ne sera pas qu’ils commencent l’année à Montréal, mais qu’ils la terminent.

 

Si tel est le cas, cela voudra dire qu’ils ont se bâtir sur les bases solides qu’ils ont coulées lors du camp d’entraînement.

 

Et c’est ça, tout compte fait, qui sera le plus important.