MONTRÉAL - Chanceux le Canadien d’avoir gagné vendredi soir? Certainement un brin. Peut-être même deux.

 

Mais il serait aussi bête qu’injuste de simplement imputer au facteur chance le fait que le Tricolore soit revenu de l’arrière pour niveler les chances avec moins de deux minutes à faire en troisième et ensuite l’emporter 3-2 en prolongation.

 

Oui, Marc-André Fleury a commis une gaffe monumentale lorsqu’il a offert une passe parfaite à Josh Anderson pour lui permettre de pousser la rondelle dans une cage déserte et marquer le deuxième but du Canadien. Une gaffe qui a privé le gardien québécois et ses coéquipiers d’une victoire qui, jusque-là, ne faisait aucun doute… ou presque.

 

Oui Anderson a été chanceux de voir « Flower » jongler avec la rondelle, se faire une passe dans les patins et lui offrir le but égalisateur. Mais Anderson n’a pas que joué de chance sur le jeu. Il a trimé dur le long de la bande pour toucher à une rondelle que Shea Weber venait de dégager. Sans cette intervention effectuée par Anderson sous les yeux d’Alec Martinez, le dégagement aurait été refusé et il y aurait eu mise en jeu à la droite de Carey Price retardant ainsi son rappel au banc pour envoyer un sixième attaquant sur la patinoire. Anderson s’est donné une chance de voir la chance le récompenser en effectuant un jeu bien anodin, mais qui a tout changé sur la séquence.

 

Et ce n’est certainement pas la chance qui a mené au but gagnant d’Anderson en prolongation.

 

Ce but est un véritable chef-d’œuvre d’exécution et de complicité entre Anderson qui l’a marqué et Paul Byron qui lui a offert sur un plateau d’argent.

 

Parce qu’ils étaient déjà en train de célébrer, de danser, de sautiller ou de se lancer dans les bras des uns et des autres, les partisans n’ont peut-être pas réalisé à quel point Anderson a dû faire preuve de dextérité pour intercepter, au vol et du revers, la rondelle que Jesperi Kotkaniemi venait de simplement tirer en zone ennemie. Cette interception s’est transformée en passe parfaite à Paul Byron qui s’est servi de sa vitesse pour prendre le territoire des Knights d’assaut et de servir ensuite une passe parfaite sur sa droite alors que tout le monde, Marc-André Fleury le premier, semblait convaincu qu’il allait tirer.

 

Josh Anderson dont le Canadien et ses partisans espéraient l’éveil offensif depuis un bon moment déjà a donc marqué ses deuxième et troisième buts des séries en poussant la rondelle dans des cages désertes.

 

Mais sur les deux buts, Anderson a fait bien plus que simplement tirer dans des cages désertes. Il n’a jamais lâché. Avec sa vitesse, sa fougue et surtout son agilité, il a transformé en buts égalisateur et gagnant des jeux qui auraient facilement pu mener à rien. À rien de rien.

 

Vols de but : Price ajoute des victimes

 

Avant de créer l’égalité, de gagner en prolongation et de prendre les devants 2-1 dans la série, le Canadien a eu 100 fois l’occasion de baisser les bras et de laisser les Golden Knights filer vers une victoire qui aurait même pu être aussi convaincante que leur première.

 

Peut-être même plus tant les Knights, qui ont tenu promesse en amorçant le match avec force, ont outrageusement dominé les 58 premières minutes de jeu.

 

Ils menaient 15-3 les tirs cadrés après le premier tiers. Ils menaient 24-7 les tirs tentés.

 

Des avances qui se sont accentuées après 40 minutes : 30-8 les tirs cadrés et 51-21 les tirs tentés.

 

Ils étaient partout sur la patinoire. Ils contrôlaient le jeu. Ils multipliaient les sorties de zone efficace. Pour la première fois en trois rencontres, ils avaient le plein contrôle de la zone neutre, s’offraient de longues séquences menaçantes en zone du Canadien. Ils dominaient carrément.

 

En plus de dominer en matière de contrôle de rondelle, les Knights dominaient les batailles de tranchées. Nick Suzuki et Artturi Lehkonen ont été foudroyés par des mises en échec monstrueuses, mais légales assénées par Brayden McNabb.

 

Suzuki et Lehkonen auraient pu laisser un genou sur la glace. Ils ne l’ont pas fait.

 

Carey Price aurait pu se laisser abattre lorsqu’Eric Staal a fait une passe parfaite dans l’enclave à Nicolas Roy pour permettre au Québécois de marquer le premier but du match.

 

Le gardien du Canadien aurait pu se dire que c’était fini lorsqu’il a été déjoué par un tir d’Alex Pietrangelo qu’il aurait pu et du stopper – il a multiplié des arrêts 100 fois plus difficiles depuis le début des séries – en début de troisième.

 

Il ne l’a pas fait. Au contraire.

 

Car loin d’abandonner, Carey Price a ajouté le nom d’Alex Tuch à sa liste de victimes auxquelles il a volé des buts certains, voire plus que certains, sur une séquence qui a suivi le but de Pietrangelo qui donnait les devants 2-1 aux Knights.

 

Price a volé Tuch en étendant le patin vers sa gauche à la suite d’une passe parfaite de Max Pacioretty. Cet arrêt représente non seulement le point tournant du match de vendredi, mais il pourrait devenir le point tournant de la série.

 

Bien plus que l’erreur de Fleury en fin de rencontre.

 

Car si Tuch avait doublé l’avance de Vegas sur ce jeu, jamais le Canadien n’aurait été en mesure de profiter de la bévue de Fleury en fin de rencontre.

 

Price s’est aussi imposé contre son ancien capitaine. Il s’est dressé devant Nicolas Roy qui a obtenu une échappée après qu’il eut marqué.

 

On va se le dire, avec ses 43 arrêts, Price s’est imposé tout court.

 

Il a gardé son club dans le match et le reste du club a pris les moyens pour s’accrocher.

 

Ce n’a pas été facile. Cela a même été ardu par moments. Mais des tas de petits jeux ont permis aux joueurs du Canadien d’aider la cause de leur gardien. Je pense ici à un beau plongeon défensif réalisé par Phillip Danault en première période. Je pense aux 14 mises en jeu gagnées par le Québécois sur les 18 qu’il a disputées.

 

Je pense à un tir que Nick Suzuki a bloqué en zone du Canadien. Aux quatre rondelles qu’Artturi Lehkonen a lui aussi bloquées tout en se donnant corps et âme à chacune des présences effectuées en compagnie de Danault et Gallagher pour contenir une fois encore le gros trio des Knights.

 

Lehkonen joue tellement bien, il est tellement efficace au sein de ce trio, qu’il n’y a pas la moindre raison de songer ne serait-ce qu’une seconde à redonner à Tomas Tatar sa place à la gauche de Danault et Gallagher. Peut-être que Tatar mousserait les chances que ce trio soit un brin plus productif en attaque. Mais il n’arriverait jamais à permettre à ce trio d’être aussi hermétique en défense. Et pour le moment, c’est le mandat premier de trio.

 

Pour Ducharme!

 

Les joueurs du Canadien auraient pu baisser les bras avant même que la mise en jeu donnant le coup d’envoi au match soit déposée.

 

Le retrait préventif de Dominique Ducharme qui a vu la COVID s’installer dans son organisme aurait pu déstabiliser l’équipe. Là encore, le Canadien a su faire preuve de résilience. De caractère.

 

Luke Richardson, qui a dirigé le club-école des Sénateurs d’Ottawa à Binghamton pendant quatre ans, est venu en relève derrière le banc. Ducharme a établi le plan de match, il s’est adressé aux joueurs virtuellement avant la rencontre, il a été de toutes les décisions qui ont précédé la rencontre. Mais c’est Richardson avec Alex Burrows et Sean Burke venu en relève pour s’occuper des défenseurs qui les a mises en application.

 

Ce retrait prive Dominique Ducharme d’une occasion de profiter pleinement de la présence de son équipe en finale d’association et de la frénésie d’un match de troisième ronde au Centre Bell. Même devant 3500 partisans seulement.

 

Mais peut-être qu’il aura la chance de se reprendre en grande finale…

 

Car si les Knights continuent de se satisfaire de ce qu’ils font de bien et ne prennent pas les moyens de corriger ce qui ne va pas, le Canadien pourrait finalement sortir gagnant d’une série que je ne pouvais me convaincre qu’il était en mesure de gagner.

 

Ma prédiction donnant les Knights gagnants peut toujours se réaliser. Mais il leur faudra plus de cinq matchs pour y arriver… s’ils y arrivent.

 

Coulés par l’attaque massive

 

Bien sûr abattus par le renversement de situation dont ils ont été victimes en fin de match et en prolongation, les Knights assurent qu’ils sont loin d’être démolis émotivement.

 

« C’est quoi cette question », que le capitaine Mark Stone a répliqué lorsqu’il a été question d’une forme de « détresse émotive » au sein de son équipe. « On s’est fait planter 7-1 lors du premier match contre Colorado avant de perdre une deuxième partie qu’on aurait dû gagner. Nous sommes malgré tout revenus dans cette série qu’on a gagnée. Il faudra juste trouver une façon de profiter davantage des occasions de marquer que nous créons », a répliqué Stone.

 

« L’erreur en fin de match a donné de l’élan au Canadien qui a su en profiter en prolongation. Nous n’avons pas été aussi dominants en prolongation que nous l’avions été lors des trois premières périodes.

Mais si on joue tous nos prochains matchs comme on l’a fait lors des 58 premières minutes ce soir, je ne vois pas comment le Canadien pourrait nous battre encore deux fois », que l’entraîneur-chef Pete DeBoer a lancé après la rencontre.

 

Une déclaration surprenante considérant que son équipe semble incapable de déjouer Carey Price. Ou de le déjouer assez souvent pour gagner!

 

Surtout en attaque massive alors que les Knights ont été blanchis quatre fois de suite vendredi et qu’ils ont été muselés 10 fois de suite depuis le début de la finale.

 

Price et le Canadien ont d’ailleurs écoulé les 25 derniers désavantages numériques avec lesquels ils ont dû composer sans accorder de but. Ce qui est un exploit on va se le dire…

 

« L’attaque massive nous fait très mal. Nous sommes inefficaces dans nos sorties de zone, nous réagissons mal face à la pression qu’ils appliquent. Nos insuccès en attaque à cinq sont en train de nous faire perdre cette série », que Reilly Smith a convenu après la rencontre.

 

De loin, de très loin, le commentaire le plus juste de tous les propos tenus par les Knights après la défaite de vendredi.

 

Comment Marc-André Fleury réagira-t-il lors du prochain match? Lui qui avait passé la partie à jongler avec la rondelle dans ses sorties loin du filet pourra-t-il oublier le but égalisateur?

 

Pourra-t-il faire abstraction des distractions associées au fait que les 3500 partisans – une chance qu’ils ne sont pas 21 000 – chantent son nom dès que la rondelle approche de son territoire?

 

Et Max Pacioretty? Déjà qu’il semble intimidé par ses anciens coéquipiers et son ancien uniforme, est-ce les huées nourries réservées à l’ancien capitaine l’éteindront pour de bon?

 

Autre question cruciale pour les Knights : où donc se cache de trio Marchessault-Karlson-Smith? Ces trois gars doivent en donner beaucoup plus à leur équipe et pour l’instant, ils manquent à l’appel.

 

Arbitrage aléatoire et affreux

 

En plus d’être dominé par un adversaire qui ne se contentait d’être plus fort sur papier, mais en faisait la preuve sur la patinoire, le Canadien a aussi eu à composer avec les arbitres Chris Lee et Dan O’Rourke qui ont connu un match affreux.

 

Et cela n’a rien à voir avec le fait qu’ils ont offert quatre attaques massives aux Knights contre deux seulement au Canadien. Vous le savez, ce genre de déséquilibre est loin d’être un facteur précis pour analyser le travail des officiels. Lee et O’Rourke ont été affreusement mauvais en raison de l’a peu près de la majorité des décisions qu’ils ont prises sur la patinoire.

 

Ils ont chassé Jesperi Kotkaniemi (accrochage) et Joel Armia (donné de la bande) alors qu’ils n’avaient pas touché aux mains de son adversaire dans le premier cas et que dans le deuxième, Brayden McNabb était en complet déséquilibre avant l’impact.

 

Les arbitres auraient pu chasser bien d’autres joueurs du Canadien et des Knights pour des infractions bien plus sérieuses que celles reprochées à KK et Armia.

 

Ils ont même laissé Jon Merrill s’impliquer dans l’action après qu’il eut perdu son casque derrière le but de Carey Price au premier tiers. Il ne faut pourtant pas plus de jugement pour rendre une décision dans un cas semblable que lorsque la rondelle est tirée directement dans la foule.

 

Les reprises ne permettent pas de confirmer si Corey Perry a été atteint au visage par un bâton ou par la rondelle en prolongation.

 

Mais quand même. Si la reprise n’est pas concluante, à vitesse normale il est impensable que les arbitres n’aient pas jugé bon lever le bras pour sanctionner un geste pareil.

 

Les mauvaises décisions, les décisions aléatoires et les non-décisions de la part des arbitres ont été très nombreuses vendredi soir. Trop!

 

Vous le savez : je soutiens toujours ou presque que les arbitres commettent beaucoup moins d’erreurs que les joueurs lors des matchs.

 

Pas sûr que cela ait été le cas vendredi.

 

De fait, la plus grosse erreur est peut-être de voir un gars comme Chris Lee en finale d’association. Me semble que d’autres, bien meilleurs, auraient dû lui être préférés au lieu d’être écartés après les deux premières rondes.

 

Mais bon!

 

On remet ça dimanche soir!