Président à 28 ans : les fruits du travail d'Alex Cousineau
MONTRÉAL – Anecdote : en 2021, un courriel du collègue Luc Bellemare arrive dans notre boîte de messagerie. L'animateur de l'Antichambre a lu nos récents portraits de jeunes entraîneurs québécois et nous suggère de fouiller l'histoire d'Alex Cousineau, alors entraîneur-adjoint avec les Foreurs de Val-d'Or.
L'idée est restée sur la glace et Cousineau n'est pas resté longtemps à Val-d'Or. Il n'est pas resté longtemps entraîneur non plus.
Quatre ans après la réception de ce message rempli de sagesse, Cousineau est à la tête de l'une des quatre équipes de hockey professionnelles du Québec. Le 14 avril, il a été nommé à la tête des Lions de Trois-Rivières. À 28 ans, il est la plus jeune personne à occuper la présidence d'une équipe dans l'histoire de l'ECHL.
La trajectoire de carrière du natif de Candiac n'est pas aussi étonnante qu'elle en a l'air. Il est vrai que Cousineau a mis un pied dans le monde du hockey comme enseignant. Avant d'atteindre la LHJMQ, il a travaillé comme entraîneurs des gardiens et responsable de la vidéo pour Hockey Canada, quelques institutions scolaires ainsi que l'équipe de l'Université Concordia.
« Mais j'aimais déjà l'aspect gestion dans le sport. C'est quelque chose que je voulais faire, transitionner du coaching vers le management », révèle en entrevue celui qui a obtenu un baccalauréat de la John Molson School of Business à Concordia et complète présentement à distance sa maîtrise à l'Université Bellevue au Nebraska.
Au fil de la conversation, Cousineau glissera – peut-être en s'appuyant sur une béquille linguistique, peut-être par excès d'humilité – qu'il a « tranquillement pas vite » monté les échelons chez les Lions. Tout est relatif. Sur LinkedIn, la liste des postes qu'il y a occupés remplit l'écran de notre ordinateur portable.
Cousineau a participé à la naissance des Lions en 2021. En plus de ses fonctions d'entraîneur, il a hérité d'un vaste éventail de responsabilités administratives. Le bon déroulement des voyages de l'équipe, l'hébergement des joueurs, la livraison de la paye, tout ça était dans sa cour en plus de ce qu'il appelle lui-même la « paperasse de la Ligue » : la gestion du plafond salarial en plus de l'inventaire des transactions et des contrats.
C'est ici qu'on vous rappelle qu'à leur première année d'existence, les Lions ont vu un nombre record de joueurs entrer et sortir de leur vestiaire. « 86 joueurs! », s'exclame fièrement Cousineau, dont la photo, dans un dictionnaire illustré des expressions québécoises, pourrait être insérée dès les premières pages (« A » comme dans « Apprendre sur le tas »).
Les années ont passé et le gestionnaire en herbe a pris du galon. « J'ai commencé à faire de la négociation de contrats avec des agents, des négociations d'échanges avec les directeurs généraux des autres équipes », énumère-t-il.
All in dans la tourmente
En 2023, les problèmes financiers des Lions ont fait surface. Le président Mark Weightman a quitté, l'entraîneur et directeur général Marc-André Bergeron a été congédié. Avant que l'avenir de la concession ne soit solidifié, les Félins ont longtemps traîné les pattes au bord du précipice. Cousineau parle d'une période où tout le monde « était un peu dans le néant », où l'organisation était « en chute libre », mais au cours de laquelle son allégeance n'a jamais flanché.
« J'étais all in dans le bateau, illustre-t-il. Je me suis dit : "Je suis embarqué dans le bateau, je vais couler avec le bateau ou je vais le faire sortir de l'eau". »
Après un processus de vente avorté avec un homme d'affaires local en 2024, le naufrage semblait imminent. Mais à minuit moins une, un investisseur américain a sorti le club des eaux troubles. L'une des premières décisions de Todd Mackin, président de Spire Holding LLC, a été de faire monter en grade Alex Cousineau, en qui on voyait « beaucoup plus qu'un gestionnaire hockey ».
« À ce moment-là, ça m'a mis des questionnements dans la tête, admet le principal intéressé. Où on s'en allait? Est-ce que j'étais capable de faire ça? Pourquoi il voyait ça en moi si rapidement? » Officiellement, Cousineau a hérité du titre de vice-président au développement des affaires. Quelques mois plus tard, un autre palier : on le nommait vice-président exécutif du club.
« Les gens me disaient au départ : "Toi Alex, on dirait qu'à toutes les années t'as une promotion!" Mon objectif, c'est toujours d'essayer de me mettre dans les bonnes situations. Les bonnes choses arrivent aux bonnes personnes et être un travaillant dans la vie, ça peut aider. Je me suis toujours dit que j'allais m'assurer d'être celui qui travaille le plus fort dans ce que je fais et les gens vont le remarquer. Je pense que c'est un peu pour ça que je suis dans la position dans laquelle je suis aujourd'hui. »
Jusqu'à maintenant, les réponses aux questions que se posait Cousineau sont positives. Sur la glace, les Lions ont complété la saison 2024-2025 au cinquième rang du classement général de la ECHL. Ils ne sont présentement qu'à une victoire de passer le premier tour des séries éliminatoires pour la première fois de leur histoire.
Dans les bureaux, les choses vont tout aussi rondement, affirme le président. Les assistances aux parties locales ont augmenté, tout comme les partenariats d'affaires avec la communauté. « Pour moi, ça c'est une belle réussite. »
Le Rocket de demain
Ces tapes dans le dos ne donneront pas d'ecchymoses à Cousineau, qui reste réaliste quant au travail qu'il lui reste à accomplir.
« C'est certain que le plus gros défi pour nous s'en vient. Cette année, on a commencé rock bottom et on pouvait juste s'améliorer. Notre plus gros défi, ça va être de s'assurer qu'on continue la croissance de notre organisation et de ne pas plafonner sur juste une année. »
L'homme à la tête des Lions veut « amener l'organisation ailleurs ». Son modèle se trouve à 150 kilomètres de son bureau, à Laval, où le club-école du Canadien s'est implanté de formidable façon dans sa communauté. Cette année, le Rocket a attiré une moyenne de 9925 spectateurs à la Place Bell, une augmentation de 7% par rapport à la saison précédente et le deuxième meilleur rendement de la Ligue américaine.
« Le Rocket de Laval, on l'a vu dans les premières années, ce n'était pas ce que c'est aujourd'hui, note Cousineau. Ils ont commencé quelque part, ils ont dû mettre les bouchées doubles pour se rendre où ils sont aujourd'hui. Moi, mon objectif, c'est de faire en sorte que les Lions de Trois-Rivières soient reconnus comme le troisième tiers d'une affiliation avec le Rocket et le Canadien de Montréal et qu'on devienne le Rocket de demain. »
L'affiliation entre le Canadien et les Lions, qui a été renouvelée pour une période de trois ans en avril 2024, n'est « pas là où on voudrait qu'elle soit », confesse Cousineau. Des progrès ont été réalisés au cours de la dernière année – par exemple, par l'ajout symbolique du logo du CH sur les uniformes de ses petits frères – mais c'est un lien que le nouveau président veut solidifier.
« Quand tu t'associes à une organisation aussi reconnue que le Canadien, tu veux bien faire les choses. Comme dans les dernières années, ça a été plus difficiles pour notre organisation, je pense qu'on avait des choses à prouver. Je pense que si on continue de faire les bonnes choses, cette affiliation va juste grandir », entrevoit le grand patron des rois de la jungle.