Section Repêchage 2020

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MONTRÉAL – À 16 ans, arrivé à la fin de son contrat junior avec le club de Lausanne, Théo Rochette avait deux options. Il pouvait poursuivre son développement avec une équipe de deuxième division en Suisse ou revenir au Québec, d’où son père est originaire et où il avait passé une partie de son enfance, pour jouer dans la LHJMQ.

À ses yeux, c’était un dilemme qui n’en était pas vraiment un.

« On avait amorcé les démarches [pour un transfert au Québec] en janvier, cinq mois avant le repêchage, explique Rochette en replongeant dans ses souvenirs. C’était sûr que je voulais éventuellement revenir. Pour moi, c’était le meilleur moment de le faire. Ça allait être la meilleure vitrine pour la LNH. Il n’y avait pas de raison d’hésiter. »

À l’époque, l’ajout du nom de Rochette sur la liste des joueurs admissibles au repêchage avait créé une certaine commotion dans le petit monde de la LHJMQ. Une sorte de mystère entourait cet attaquant qu’on savait talentueux, mais dont il fallait maintenant projeter les habiletés à un nouveau calibre de jeu. Les spéculations allèrent bon train. Les plus enthousiastes le voyaient même damer le pion à Hendrix Lapierre, qui était considéré comme le favori pour être sélectionné au premier rang par les Saguenéens de Chicoutimi.   

Deux ans plus tard, quelles réponses Rochette a-t-il fournies et quelles questions a-t-il laissées en suspens?

Voyons d’abord ce que disent les chiffres. Rochette, que les Saguenéens ont finalement repêché au septième rang avec leur deuxième choix de première ronde, a amassé 43 points en 59 matchs à sa saison recrue. Il s’agissait alors du troisième plus haut total parmi tous les joueurs de son groupe d’âge.

L’année suivante, le natif de Neuchâtel a récolté 16 points en 19 matchs avant d’être échangé aux Remparts de Québec.

« Au début, ça a été compliqué, admet Rochette à propos du changement de décor. J’avais encore les symptômes d’une mononucléose que je traînais depuis le début de l’année. Même sans ça, déménager et tout, ce n’est jamais facile. Mais ça allait mieux vers la fin. Je ne connais pas exactement mes chiffres pour la fin de saison, mais je sais que ça allait mieux et je suis quand même satisfait de la manière dont j’ai terminé. C’est dommage qu’il n’y ait pas eu de séries parce que dans le passé, j’ai toujours été bon en fin de saison. »

Rochette a eu le temps de cumuler 23 points en 30 matchs avant que sa deuxième saison au Québec ne prenne fin prématurément. Quand la Centrale de recrutement de la Ligue nationale a publié son classement de fin de saison, en avril, son nom y apparaissait au 89e rang parmi les patineurs évoluant en Amérique du Nord.

En comparaison, quatre des six joueurs qui lui avaient été préféré à l’encan de la LHJMQ ont reçu une meilleure cote dans l’œil subjectif de la Centrale. Lapierre est celui qui est répertorié le plus avantageusement au 13e rang.

« Je m’y attendais un peu quand même, répond Rochette au sujet de cette évaluation. Ma saison a été très compliquée. [Pendant les premiers mois], ça ne marchait pas comme je voulais, je n’étais pas vraiment en forme. Ça s’est replacé, mais pas assez pour dire que j’ai eu la saison souhaitée. »

Au-delà du physique

Tous les recruteurs sondés au sujet de Rochette tiennent sensiblement le même discours. Son talent ne fait aucun doute, mais l’ensemble de son jeu est à polir.

« C’est un très beau talent, mais pour moi, il est encore loin, résume un premier espion. Avec sa stature et son style de jeu, il faudrait qu’il soit plus vite, plus fort, plus combatif, plus dominant. Plus affamé, affamé de marquer. S’il veut percer, il faut qu’il ajoute ça à sa game et c’est urgent, parce qu’il lui reste seulement deux ans junior. »

Théo RochetteÀ 5 pieds 10 pouces et environ 160 livres, Rochette n’a effectivement pas une charpente génératrice d’espoir, celle qui peut vous valoir le bénéfice du doute auprès des évaluateurs.  

« Je suis quelqu’un qui se développe sur le tard physiquement, se défend-il. Je ne suis pas le plus gros, j’ai toujours été un des plus petits dans mon groupe d’âge. Mais récemment, même avec la mono, j’ai été capable de prendre du poids. Je travaille là-dessus. »

Pour un autre dépisteur, à l’emploi d’une équipe de l’Association Est de la LNH, cette poussée de croissance prédite par Rochette devra être accompagnée d’une nouvelle mentalité.

« Il a de la misère à jouer dans le trafic, mettons. Il n’aime pas ça, c’est un gars qui joue en périphérie pas mal. Ça fait que c’est difficile de le voir produire des points au niveau de la LNH. Il y a des gars qui sont petits et faibles, mais qui foncent dans le tas. Avec eux autres, tu te dis : "C’est sûr qu’il va y aller". Avec [Rochette], c’est loin d’être sûr. »

Comme joueur de centre, Rochette a dû s’ajuster aux exigences plus pointues qui viennent avec la position en Amérique du Nord.

« En Europe, j’avais connu un style quand même très offensif et moi, personnellement, j’ai toujours été un joueur offensif, donc je n’avais jamais vraiment été confronté à un rôle défensif. Mais ici, tu n’as pas le choix. J’ai vraiment beaucoup appris à Chicoutimi et ensuite en arrivant à Québec. Maintenant, je pense que je suis un joueur qui est assez responsable des deux côtés de la patinoire. Je pense que j’ai fait beaucoup de progrès à ce niveau-là ». Il note aussi son évolution sur les mises en jeu, un aspect du jeu sur lequel on s’attarde selon lui un peu moins dans le système de développement suisse.  

Où tous ces efforts, ceux qui ont été faits et ceux qui restent à faire, le mèneront-ils? Rochette ne peut le savoir, mais c’est sans regret qu’il repense au chemin parcouru et aux décisions qui l’ont mené jusqu’ici.

« Je n’ai jamais regretté ma décision de partir. Je suis en ce moment très heureux à Québec et j’ai passé du très bon temps aussi à Chicoutimi.  Je ne regrette pas cette décision. Quel aurait été mon parcours si j’avais choisi autre chose? Je n’y pense même pas. »

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