MONTRÉAL – Lorsque Martin Mondou dit qu’il a l’impression que Daniel Renaud n’a jamais quitté Shawinigan, il ne faut pas y voir une métaphore pour illustrer la fluidité avec laquelle son nouvel entraîneur-chef s’est réapproprié son ancien poste. Non, quand il a remis les pieds à l’aréna au début du camp d’entraînement, le directeur général des Cataractes s’est littéralement demandé, pendant un bref instant, s’il n’avait pas rêvé aux 18 derniers mois que venait de traverser sa franchise.

Retour en arrière en février 2020. Dans le dernier droit d’une saison qui ne répond pas aux attentes, Mondou congédie Renaud pour le remplacer par Gordie Dwyer. La décision vise à fouetter l’équipe en prévision de séries éliminatoires qui n’auront jamais lieu. Un mois plus tard, la menace d’une pandémie force l’annulation du reste du calendrier.

Parce que des engagements extérieurs l’empêchent d’intégrer la bulle dans laquelle ses joueurs s’isolent la saison suivante, Mondou passe une année complète à travailler sur son équipe à distance. Pendant cette période, il a le temps d'embaucher un nouvel entraîneur, Ron Choules, de le remercier et de lui trouver un successeur. Lorsqu’il retourne finalement dans ses quartiers du Centre Gervais Auto pour préparer la saison 2021, il renoue enfin avec ses joueurs et prend un café avec son nouvel entraîneur... qui était aussi, vous l’aurez compris, son ancien entraîneur.

 « C’était quasiment comme s’il n’était pas parti », raconte Mondou en riant.

Les deux hommes parlent aujourd’hui comme s’ils avaient toujours su qu’ils seraient un jour réunis. Mondou assure qu’il n’a jamais regretté d’avoir congédié Renaud deux ans et demi après lui avoir offert sa première chance de diriger une équipe de la LHJMQ, mais il qualifie sa décision d’« extrêmement difficile », « l’une des plus dures » de sa carrière. Pour justifier le divorce, il évoque notamment un manque de complémentarité entre Renaud et ses adjoints de l’époque.

« Moi pis Dan, on le sait ce qui n’a pas marché. Le reste, ce sont des décisions qui ont été prises en cours de route qui n’ont pas fonctionné, mais je ne veux pas tirer personne en dessous de l’autobus avec ça. On regarde vers l’avant. Dans le monde des affaires, souvent, un retour aux sources peut être très profitable. On va espérer que ça s’applique au hockey aussi. Des fois, on est têtus, on pense qu’on ne peut pas faire les choses d’une telle façon. Des fois, il faut essayer de voir plus loin. »

Renaud, qui avait été embauché par les Foreurs de Val-d’Or deux semaines après son départ de Shawinigan, dit qu’il a été contacté par son ancien patron dès le lendemain de l’élimination de son équipe en finale de la coupe du Président, en juin. Son contrat avec les Foreurs était à renouveler. Une offre lui avait même été déposée. On sent, dans sa chronologie de l’histoire, qu’il ne l’a jamais sérieusement considérée.  

« Ça a été un no-brainer, assure le pilote de 39 ans au sujet de son retour en Mauricie. On fait du hockey en sachant qu’un congédiement, ça va arriver un jour. Par contre, ma relation avec l’organisation a toujours été excellente. Le canal de communication est toujours resté ouvert et on s’est toujours respectés. Ma relation avec Martin n’a jamais changé à cause de ça. Les Cats, ça a toujours été mon premier amour. »

Au-delà du talent

En revenant chez son ex, Daniel Renaud a retrouvé les mêmes meubles, mais dans une déco un peu plus raffinée. 

Une dizaine de joueurs de l’édition actuelle des Cataractes ont évolué sous ses ordres entre 2017 et 2020. Deux d’entre eux, Mavrik Bourque (Dallas) et Xavier Bourgault (Edmonton), sont des choix de première ronde dans la Ligue nationale. Parmi les autres, on dénombre le meilleur marqueur de l’équipe la saison dernière en Olivier Nadeau, le défenseur de 20 ans Marc-Antoine Pépin et les gardiens Antoine Coulombe et Charles-Antoine Lavallée. Ils étaient de vertes recrues que Renaud a accueillies à Shawinigan aux balbutiements d’un projet de reconstruction. Ils forment aujourd’hui le noyau dur d’une équipe mature qui pourrait aspirer aux grands honneurs.

« Je pense qu’il mérite la chance de finir ce qu'il a commencé avec ces gars-là », indique Mondou.

L’une des premières décisions de Renaud au niveau de son effectif aura été de scinder ce qui a été l’un des trios les plus terrorisants de la LHJMQ la saison dernière. Charles Beaudoin, un ailier de 19 ans qui a connu une saison de 21 buts il y a deux ans, commencera la saison aux côtés de Bourque et Nadeau à la place de Bourgault. L’idée générale est de mieux répartir le talent au sein du groupe d’attaquants.

« Il y a tellement d’impondérables dans une saison que pour moi, pour le coaching staff, c’est important de voir qui est capable de jouer avec qui. S’il y en a un qui tombe au combat après Noël ou dans les séries, faut avoir une bonne idée d’où on peut trouver de la chimie ailleurs. Ce qu’on veut, c’est avoir la meilleure équipe possible et non le meilleur trio possible », justifie Renaud.

La perte de Vasily Ponomarev, un choix de deuxième ronde des Hurricanes de la Caroline qui a quitté pour évoluer en KHL, a pris la direction des Cataractes par surprise. On compte notamment sur la progression du Suisse Lorenzo Canonica, qui vient de participer au camp de développement des Kings de Los Angeles, pour amoindrir l’impact du départ du joueur russe.

Le Tchèque Marek Sramaty, un joueur « complet » dont on dit qu’il a « une certaine touche », comblera l’autre place réservée aux joueurs européens. L’organisation s’attend aussi à une plus grande production de William Veillette, un choix de deuxième ronde il y a trois ans. 

En défensive, la brigade est inexpérimentée derrière les vétérans Pépin et Zachary Massicotte. La recrue Jordan Tourigny, 16 ans, a impressionné au camp. Il pourrait être l’une des trois recrues à la ligne bleue de l’équipe certains soirs cette saison. Leur progression dictera en bonne partie les succès de l’équipe cette saison, ne cache pas leur entraîneur.

 « On va prendre le temps d’évaluer notre groupe, mais je ne te cache pas qu’avec ce qu’on a vécu en séries l’an passé, il y a certains gars qui vont devoir se regarder dans le miroir », prévient Mondou en référence à l’élimination en cinq matchs subie dès la première ronde contre l’Océanic de Rimouski. Les Cats ont été blanchis deux fois dans cette série. Mondou assure qu’il ne cible personne en particulier, mais on note Bourgault et Nadeau, deux des trois meilleurs buteurs de l’équipe en saison régulière, avaient été complètement tenus en échec.

« Même si on a plus de talent que certaines équipes, on a clairement eu la réponse que les séries, ça ne se gagne pas sur le talent. C’est notre éthique de travail qui va devoir monter d’une coche », renchérit le DG.