En ce 28 mai de l’an 2000, au lendemain du choc causé par le décès de la légende Maurice Richard, l’Océanic de Rimouski donnait à la LHJMQ un 3e titre canadien en cinq ans, après ceux des Prédateurs de Granby et des Olympiques de Hull en 1996 et 1997. Retour sur une conquête bien spéciale...

Depuis 1996, les équipes de la Ligue de hockey junior majeur du Québec ont mis la main sur neuf Coupes Memorial. Il y a eu Granby en 1996, Hull en 1997, Rimouski en 2000, Québec en 2006, Saint John en 2011, Shawinigan en 2012, Halifax en 2013, Bathurst en 2018 et Rouyn-Noranda en 2019. De toutes ces équipes championnes, une seule est parvenue à disputer un tournoi et maintenir une fiche parfaite de quatre gains en autant de matchs, soit l’Océanic de Rimouski, en 2000, à Halifax.

Quatre victoires en quatre matchs

La troupe de Doris Labonté a signé des victoires de 3-1 contre Kootenay, 7-2 contre Barrie et 5-3 contre Halifax dans la phase préliminaire, avant de remporter le match ultime, à nouveau contre les Colts de Barrie, au compte de 6-2. Seulement une fois dans le tournoi, en fin de première période contre les Mooseheads, l’Océanic a été en retard dans le pointage. 

« La conquête de ce 28 mai 2000 est restée dans la mémoire des gens ici dans le Bas-Saint-Laurent. C’est difficile de croire que les jeunes qui avaient 19-20 ans cette année-là en ont maintenant 40! », philosophe Labonté, qui vient de célébrer son 66e anniversaire de naissance il y a un mois.

« Brad Richards était notre leader incontesté même si c’est Jonathan Beaulieu qui était notre capitaine. Avec 186 points en saison régulière, dont 71 buts en 59 matchs, Richards a entraîné ses coéquipiers dans son sillage, et ce même si les autres équipes s’attaquaient à lui avec des menaces à peine voilées. On disait qu’il ne durerait pas cinq matchs dans la Ligue de l’Ontario! », s’exclame encore l’architecte et entraîneur-chef de cette équipe en repensant à ce tournoi, le premier disputé dans les provinces maritimes.  

« Nous nous sentions à la maison à Halifax, un peu comme dans nos pantoufles! Nous avions joué contre les Mooseheads en séries, nous les avions éliminés et nous étions habitués à l’amphithéâtre, à notre vestiaire et à l’ambiance. Nous comptions aussi sur quatre joueurs des Maritimes dans notre alignement, dont deux originaires de la Nouvelle-Écosse. Les Mooseheads étaient les favoris du public c’est évident, mais nous étions bien accueillis là-bas! »

L’Océanic avait une force de frappe offensive impressionnante. Oui il y avait Richards, mais aussi le Slovaque Juraj Kolnik (53 buts), le Suisse Jan-Philippe Cadieux (110 points) et le défenseur Michel Périard, qui lui aussi a terminé la campagne 1999-2000 avec 100 points au compteur. 

« Pour moi, une des révélations de ce tournoi fut notre gardien Sébastien Caron qui n’avait pas la même réputation que Bryan Finley avec Barrie, que Dan Blackburn avec Kootenay, ou même que les deux gardiens des Mooseheads, qui eux aussi avaient de bonnes statistiques. Il était le no name », image Labonté, lui n’a pas oublié que la fiche de son équipe lorsqu’elle menait après deux périodes cette année-là fut de 50 victoires en 50 matchs.   

« Caron avait été particulièrement solide dans le premier match contre Kootenay et aussi en première période lors de la finale. Barrie avait dominé 16-8 dans la colonne des tirs dans les 20 premières minutes.»

Le portier originaire de la vallée de la Matapédia a d’ailleurs été choisi meilleur gardien du tournoi et il aura finalement disputé 95 matchs dans la Ligue nationale, principalement avec les Penguins de Pittsburgh, contre seulement 4 pour Finley, qui avait pourtant été un choix de 1re ronde des Predators de Nashville, le 6e au total, un an plus tôt.

Le règlement Doris Labonté!

Labonté et l’Océanic sont retournés au Championnat canadien cinq ans plus tard, en 2005, un tournoi disputé dans le château fort des frères Hunter, à London en Ontario. Si en 2000 Rimouski comptait sur Brad Richards, son leader en 2005 n’était pas piqué des vers non plus avec Sidney Crosby, double récipiendaire du titre de joueur par excellence au hockey junior canadien.  

L’Océanic a trimé dur pour réussir à se qualifier pour le match ultime contre les Knights qui avaient déjà 78 victoires au compteur en saison et en séries avant ce match décisif du 29 mai 2005.

À cette époque, il n’y avait pas de journée de congé entre le match de demi-finale disputé le samedi et la grande finale du dimanche. Onze fois au cours des 12 années précédentes, l’équipe qui avait accédé directement au match ultime sans passer par la demi-finale avait soulevé la Coupe et les Knights n’allaient pas faire exception.

« Nous avions eu une séquence de 35 matchs sans revers après les Fêtes. Nous avions le gros joueur, mais nous savions que, sur papier, on manquait un peu de profondeur.  Nous avons été dans le coup quand même jusqu’en finale, mais je trouvais que c’était inhumain pour les joueurs de devoir disputer ces deux gros matchs en deux jours et la qualité du spectacle, présenté à l’échelle nationale, en souffrait. »

Après ce tournoi, Doris Labonté avait fait valoir ses doléances, que cela n’avait aucun sens et que la formule devait être révisée ce qui fut finalement fait à compter de 2006.

Depuis, l’équipe qui doit jouer le match de demi-finale le vendredi soir au lieu du samedi a réussi à aller chercher cinq victoires en 14 ans. À sa façon, Doris Labonté aura marqué la Ligue canadienne de hockey en s’insurgeant devant cette évidence qui était devenue presque un sujet de distraction à la classique annuelle. Depuis 15 ans on lui accorde la paternité de ce changement et on parle maintenant du « règlement Doris Labonté »

Un hommage remis à plus tard

L’Océanic de Rimouski avait prévu une fête pour honorer la carrière et l’apport de Labonté dans l’histoire de la concession, une cérémonie qui devait avoir lieu le 20 mars dernier, mais qui a été annulée avec la suspension de la saison.  

Labonté, qui a dirigé 554 matchs dans la LHJMQ entre 1992 et 2007 et qui se remet de quelques problèmes de santé, a bien hâte de vivre ce moment.

« Je te mentirais en te disant que cela ne fait pas plaisir!  J’imagine que ça pourra se faire un jour lorsqu’on aura le droit de mettre plus que deux personnes au Colisée!  La bannière est déjà faite alors... au pire on le fera en confinement! » conclut-il en riant.