MONTRÉAL – S’il n’est pas parvenu à atteindre la LNH en tant que joueur, Stéphane Julien s’est définitivement hissé dans les « ligues majeures » de l’immobilier au Québec avant de tout larguer pour revenir au hockey qui lui coule dans le sang depuis toujours.

 

Depuis sa création, la LHJMQ a formé une panoplie d’excellents entraîneurs qui sont devenus des figures bien connues dans le milieu sportif québécois. On n’a qu’à penser aux Claude Julien, Alain Vigneault, Bob Hartley, Michel Therrien, Dominique Ducharme, Benoit Groulx, Patrick Roy et compagnie.

 

Julien ne possède pas une telle réputation, mais il a vécu un parcours à la fois atypique et fascinant qui l’a ramené vers le hockey et duquel on peut retenir plusieurs leçons.

 

Stéphane JulienExpatrié en Europe après la déception de ne pas avoir convaincu des équipes de la LNH d’investir sur lui, Julien commence à investir en immobilier en 1998.

 

« Un de mes amis, Samuel Groleau, un ancien de la LHJMQ (avec St-Jean et Chicoutimi) jouait en Europe comme moi et il me disait que son frère avait acheté des blocs appartement. Ma réaction a ressemblé à ‘Ah ouais, ça m’intéresse’. Je suis un gars assez manuel et mon père l’était aussi », a entamé Julien dont la troupe se débrouille très  bien contre la forte opposition des Voltigeurs de Drummondville.

 

« J’en ai parlé avec mon beau-père qui était directeur bancaire et il m’a dit ‘Regarde, l’immobilier, c’est difficile présentement. J’ai une reprise de finances donc si tu cherches du trouble, tu peux l’acheter’. C’est comme ça que j’ai commencé, avec cet immeuble de neuf logements à Bromptonville », a-t-il poursuivi.

 

Astucieux, il a développé une méthode selon laquelle il achetait d’autres immeubles quand il revenait à Sherbrooke lors de la période estivale. Il en profitait également pour procéder à des rénovations après s’être entraîné en matinée.

 

Fasciné par le côté du financement, il a joué de créativité pour propulser son ascension tout en poursuivant sa carrière en Europe et il a fini par posséder plus de 200 logements! Il s’est retrouvé à gérer un parc immobilier avec des actifs d’environ 50 millions comme l’avait précisé Jérôme Gaudreau, de La Tribune, dans son article sur le sujet en 2017.

 

De retour de sa carrière de 13 saisons en Europe en 2012, il s’est joint au personnel d’entraîneurs du Phoenix à titre d’adjoint sans abandonner l’immobilier.

 

« Cette saison-là, c’est clair que je rushais solide. L’année d’après, j’avais ralenti un peu, en travaillant juste au développement des joueurs », a-t-il expliqué.

 

Malgré tout ce qu’il avait bâti dans le milieu des affaires, Julien n’a pas pu éviter la piqûre. Envahi par l’idée de s’impliquer à fond dans le hockey, il a été frappé par une « écoeurantite aiguë » de l’immobilier en 2016. Il a donc osé suivre son instinct pour se départir de la grande majorité de ses actifs.

 

« Quand j’ai eu l’occasion de revenir, la décision n’a même pas été longue à prendre. Même si j’aimais l’immobilier, j’ai toujours eu le hockey dans le sang. J’en ai discuté avec ma famille (sa femme et ses deux filles) et c’était vraiment ce que je voulais faire dans la vie même avec les risques qui viennent avec parce qu’on sait que la stabilité est pratiquement nulle pour ce métier », a-t-il témoigné au RDS.ca.

 

Stéphane JulienEn décembre 2015, il a succédé à Judes Vallée à titre d’entraîneur-chef et il a effectué le véritable saut à partir de la saison 2016-2017 quand il a accepté de camper ce rôle à temps plein, une décision « que je n’ai jamais regrettée ».

 

S’il adore le côté du développement des joueurs, Julien se sert de son bagage dans le milieu des affaires pour éveiller ses protégés à d’autres avenues.

 

« Je le fais régulièrement parce que l’école, c’est vraiment important dans notre milieu. Je pense à Thomas Grégoire que je connais depuis qu’il est tout jeune, on en parlait souvent. Son frère avait aussi de l’intérêt pour l’immobilier et leur grand-père était aussi impliqué dans ça », a convenu l’entraîneur qui a continué des études par correspondance en administration à l’Université de Montréal quand il jouait en sol européen.

 

Fidèle à sa personnalité, il s’est lancé à fond dans sa nouvelle aventure pas moins reposante que son ancienne carrière.

 

« Ma femme pensait que ce serait plus relax après ma carrière de joueur, mais elle a réalisé que le hockey était ma passion. Ç’aurait été plus difficile avec de jeunes enfants, ma famille m’appuie là-dedans », a noté celui dont les filles sont âgées de 20 ans et 18 ans.

 

Là où ça devient encore plus intéressant, c’est que Julien caresse maintenant des aspirations pour les échelons professionnels. Dire qu’il n’avait jamais envisagé devenir entraîneur-chef.

 

« Ce n’était pas ce que j’avais prévu pour mon après-carrière, vraiment pas. Mais j’adore ça et j’aimerais poursuivre mon ascension tranquillement dans la Ligue américaine », a admis celui qui a contribué deux fois, comme entraîneur, à des tournois internationaux avec le Canada.

 

La passion est une caractéristique évidente de sa personnalité et elle le définit comme entraîneur. Puisqu’il a souvent été le capitaine de ses équipes, il se sent en mesure de sentir le pouls de ses joueurs et ils espèrent que ceux-ci ressentent le plaisir qui l’anime à les développer.

 

D’ailleurs, le développement occupe une place importante dans son approche et ça vient surtout de ses arrêts en Suisse, en Italie, en Allemagne et en Autriche. C’est un aspect prioritaire pour les programmes européens qui démontrent plus de patience envers les jeunes et il prétend avoir « importé un peu de ça » dans ses équipes.

 

À posteriori, Julien se dit qu’il a pu connaître une belle carrière en Europe puisque sa femme et ses filles ne sont jamais allées là-bas à reculons. Ses enfants ont fréquenté l’école allemande et ils ont eu beaucoup d’amis à l’extérieur du hockey.

 

« Ça nous a fait adorer l’Europe. On a apprécié chaque moment. On n’était pas du style à dire ‘Ils n’ont pas la même bouffe qu’au Québec’. C’est plus facile quand ta famille embarque dans tes projets. »

 

Le Phoenix parvient à embêter les Voltigeurs

 

Sur le plan hockey, Julien voit son équipe tenir tête aux puissants Voltigeurs. Le Phoenix aurait même pu créer l’égalité 2-2 dans la série de deuxième ronde, mercredi soir.

 

« Les gars y croyaient depuis le début et ce n’est pas terminé. Quand tu regardes les deux formations, l’âge est un facteur considérable. À la défense, on a plusieurs joueurs de 17 ans et ça peut nous mettre parfois un peu dans le trouble. Mais il n’y a rien qui bat le niveau de compétition et les gars se sont battus lors des deux derniers matchs », a jugé Julien.

 

L’aspect le plus fascinant demeure que le Phoenix parvient à contenir les excellents Joe Veleno et Maxime Comtois.

 

« Notre top-6 a réussi à bien matcher leurs deux premiers trios avec les Comtois et Veleno. Comtois a eu un gros premier match, mais c’est tout. (Alex-Olivier) Voyer, (Félix) Robert et (Samuel) Poulin connaissent des séries extraordinaires. Ce sont eux qui nous ont traînés depuis le début. Souvent, ils sont opposés à Veleno et je trouve que nos joueurs ont plus souvent le dessus depuis le début de la série », a conclu Julien.