VICTORIAVILLE, Qc – Sylvain Couturier a donné cinq choix au repêchage – et probablement un ou deux atouts qui seront connus cet été – pour obtenir les services d’Olivier Galipeau. Pour un joueur qui n’allait passer que quelques mois avec son équipe, c’était cher payé.

Si c’était à refaire, le directeur général du Titan d’Acadie-Bathurst n’hésiterait pas une seconde et appuierait de nouveau sur la gâchette.

« Il y a un prix à payer pour le meilleur défenseur de la Ligue », raisonnait-il mardi après-midi, quelques heures avant le début du troisième match de la série entre le Titan et les Tigres de Victoriaville.

Victorieux en soirée, le Titan n’est plus qu’à un pas d’atteindre la grande finale de la LHJMQ pour la quatrième fois de son histoire néo-brunswickoise, la première depuis 2002. C’est exactement avec cette vision en tête que Couturier a négocié avec les Saguenéens de Chicoutimi afin de mettre la main sur son défenseur de 20 ans cet hiver.

La pression des séries? Il en faut plus que ça pour énerver Olivier Galipeau, qui a disputé l’équivalent d’une saison supplémentaire dans la LHJMQ seulement en matchs éliminatoires. Le match de mardi était le 76e de sa carrière junior. Encore trois autres et le record que se partagent présentement Marc Bouchard et Dany Groulx sera le sien.

« C’était exactement pour ça, la transaction, confirme Couturier. Olivier avait été capitaine à Val-d’Or et à Chicoutimi. On savait que c’était un très bon leader, mais c’était près de 70 matchs d’expérience en séries qu’on allait chercher. C’était primordial pour nous. Olivier a gagné pas mal partout où il est passé, donc on ne pouvait pas se tromper. »

Olivier Galipeau, c’est un joueur à qui le succès a commencé à coller à la peau dès son arrivée dans le circuit Courteau. À 16 ans, jeune choix de première ronde arrivé dans une équipe de vétérans, il s’est taillé une place au sein d’une brigade de vétérans dont le noyau était composé de Guillaume Gélinas, Randy Gazzola et Jérémie Fraser. Il a pris part aux 24 matchs des Foreurs de Val-d’Or dans leur conquête de la Coupe du Président. Au tournoi de la Coupe Memorial, son équipe a poussé l’action jusqu’en troisième période de prolongation avant d’être sortie en demi-finale.  

La saison suivante est arrivée comme un dur lendemain de veille pour les Foreurs, mais une irrésistible poussée après la période des Fêtes leur a permis de se positionner favorablement pour le tournoi printanier.

« En première ronde, on avait battu Rouyn dans ce qui est pour moi l’une des plus grandes rivalités de la Ligue, se remémore sans effort Galipeau. Puis en deuxième ronde, on avait surmonté un déficit de 0-3 contre Baie-Comeau et on avait gagné le septième match en prolongation, à la maison. C’est encore un des meilleurs souvenirs que je peux garder de ma carrière. »

Cette année-là, le parcours des Foreurs s’est arrêté en demi-finale, où ils ont été stoppés par les éventuels champions. C’est un scénario que Galipeau allait revivre deux ans plus tard après avoir été échangé aux Saguenéens.

« Les Sea Dogs de Saint John avaient une grosse machine de hockey, mais on les a tenus. On est les seuls à les avoir battus dans leur parcours », évoque fièrement le vétéran.

Vous commencez un peu à comprendre ce que le Titan a entre les mains avec son numéro 26?

Plus que les points

Outre cette fameuse expérience « qui ne s’achète pas », il y a une autre corde que Galipeau a ajoutée à son arc au gré de sa croissance dans le circuit junior québécois. Celui qui se décrivait comme un arrière « défensif et physique » à l’adolescence n’a amassé que 19 points à ses 47 premiers matchs de séries. Puis, l’an passé, explosion : dans l’aventure des Sags, il en a obtenu 13 en 16 matchs, un de moins que son coéquipier Frédéric Allard, un quart-arrière établi et choix de troisième ronde des Predators de Nashville.

Cette nouvelle vocation offensive s’est confirmée cette année. Pour son chant du cygne dans la LHJMQ, Galipeau a amassé 74 points en 67 matchs de saison régulière, la meilleure récolte parmi tous les joueurs à sa position. La hiérarchie n’a pas changé depuis le début des séries avec les 15 points qu’il a mis à sa fiche après 13 rencontres.

« Ça me surprend un peu, mais il a 20 ans et c’est un gars qui a une grande confiance en lui. Je pense que ça y est pour beaucoup, explique Sylvain Couturier. Il est sur notre première unité d’avantage numérique, il a un excellent lancer et une bonne tête de hockey. Dans le fond, je suis surpris du nombre de points, mais je sais qu’il récolte ce qu’il a semé. »

L’entraîneur du Titan, Mario Pouliot, se fait un plaisir d’énumérer la liste des tâches que Galipeau peut accomplir avec brio sur la patinoire. Mais ce n’est pas vraiment là-dessus qu’il désire s’attarder. « Ce qu’on voit sur la glace, c’est un grand apport, mais ce qu’on voit derrière la scène, c’est inestimable pour moi », veut-il faire comprendre.

« Olivier, c’est un professionnel, c’est un homme. C’est un gars qui va arriver à l’aréna trois heures avant le début des matchs, et les journées de congé, c’est encore là que vous allez le trouver. Lundi soir, j’étais à mon bureau et à un moment donné, j’entends la porte du vestiaire ouvrir. Qui c’était, vous pensez? Gally! »

Pouliot est d’autant plus comblé qu’il sait trop bien que l’attitude de son pilier défensif déteint sur celle de ses compagnons.

« Après les matchs, on le voit s’entraîner, s’étirer, prendre soin de son corps. Pour moi, être tough mentalement, c’est prendre les bonnes décisions chaque jour. Bien dormir, bien manger, bien se préparer. Tu sais, on a toujours le choix dans la vie. Olivier fait les bons choix et c’est contagieux, ça a un effet d’entraînement sur tout le monde. »

« Il ne parle pas plus qu’il faut, mais il fait ce qu’il a à faire et tout le monde le suit. Pour la culture de l’équipe, il a été excellent », résume le DG Couturier.

Très bientôt, Galipeau ne fera pas qu’agir en professionnel, il en sera un. Des équipes de la Ligue nationale lui feraient de l’œil et son souhait avoué est de signer un contrat d’entrée dans la LNH d’ici la fin de sa saison, comme l’a fait l’attaquant Alexandre Alain avec le Canadien mardi.

Mais en attendant l’appel de son agent, celui qui a participé aux camps de développement des Canucks de Vancouver et des Blackhawks de Chicago suit sa routine habituelle. Le mois d’avril, c’est sur la glace, et non perdu dans ses pensées, qu’Olivier Galipeau a l’habitude de le passer.

« Avant chaque match, j’ai encore les papillons. Plus que ça avance, pire c’est, l’enjeu est tellement gros. Je ne peux pas être moins excité que je l’étais à 16 ans! »