BUFFALO – Au début, rien ne laissait présager que la saison 2015-2016 de William Bitten allait tourner au vinaigre.

D’accord, les Firebirds de Flint n’ont pas connu un départ fulgurant, mais on avait déjà vu pire. Le 8 novembre, leur victoire de 4-3 en fusillade contre les Generals d’Oshawa leur permettait de porter leur fiche à 7-9-1. Bitten croit se rappeler que l’équipe s’accrochait alors au deuxième rang du classement de la division Ouest.

Après le match, l’entraîneur John Gruden est entré dans le vestiaire pour s’adresser à ses joueurs. Une ronde de high five? Un discours enflammé? Pas vraiment. Le coach voulait simplement leur dire qu’il venait d’être congédié.

« On s’est tous regardé avec la même question dans le regard : ‘Mais qu’est-ce qui se passe?’, se souvient Bitten. C’est arrivé de nulle part. En une journée, tout a éclaté dans toutes les directions. On ne savait pas ce qui arrivait. »

Ce qui s’est passé à partir de ce moment permet de comprendre pourquoi Bitten qualifie sa plus récente saison, son « année de repêchage », de « bizarre ».

Consternés par la décision du propriétaire Rolf Nilsen, décision qu’on disait motivée par le désir de voir son fils obtenir un temps d’utilisation accru, les joueurs des Firebirds se sont opposés en bloc au départ de Gruden et de son adjoint Dave Karpa. Un à un, ils sont tous allés remettre leur uniforme en guise de protestation.

Le moyen de pression a fonctionné. Le lendemain matin, Gruden et Karpa étaient de retour avec des nouveaux contrats de trois ans en poche. Mais le mal était fait.

« On a tous été affectés par cette histoire », admet Bitten, un Franco-Ontarien né de deux parents olympiens. Sa mère, la Québécoise Doris Piché, a représenté le Canada en badminton aux Jeux de Barcelone et Atlanta.

En février, Gruden et Karpa, que Bitten décrit comme les deux meilleurs entraîneurs qu’il a connus dans sa jeune carrière, ont été congédiés pour la deuxième fois. Connor Chatham, l’un des meilleurs attaquants de l’équipe, a été échangé à Windsor. À la date limite des transactions, le gardien Alex Nedeljkovic et le défenseur Josh Wesley, deux des meilleurs amis de Bitten, ont subi le même sort.

Dans un article publié dans le Hockey News, le père de Bitten a affirmé que son fils avait traversé une période dépressive et qu’il avait dû être convaincu par son agent afin de ne pas quitter le navire.

Là-dessus, Bitten offre une version différente. Bon, disons simplement qu’il n’est pas le premier adolescent de 17 ans à ne pas partager la vision de son père.

« Ce n’était pas une dépression! Ça m’a affecté, comme le reste de l’équipe, mais j’ai joué à 100% à tous les matchs. Tu ne sais jamais qui est venu pour te voir, alors tu dois toujours bien jouer. »

La Ligue junior de l’Ontario a éventuellement mis fin au cirque en suspendant Rolf Nilsen pour une période de cinq ans. En mai, Ryan Oulahen, un jeune entraîneur de 31 ans, s’est vu confier les rênes de l’équipe, qui a finalement terminé la saison avec le deuxième pire dossier de l’OHL. Deux semaines après son embauche, Bitten ne lui avait toujours pas parlé et préférait ne pas parler de son avenir immédiat avec les Firebirds.

« Pour l’instant, je préfère me concentrer sur ce que j’ai à faire ici », lâche-t-il poliment pour éviter le sujet.

Le repêchage comme un baume

La cote de Bitten ne semble pas avoir trop souffert de la tourmente qui a assombri son équipe au Michigan.

Bitten est le choix de 3e ronde du CH

Il a terminé la saison avec une respectable récolte de 65 points en 67 matchs, la meilleure de son équipe, et pour finir l’année en beauté, il a accepté l’invitation de Hockey Canada pour représenter le pays au Championnat du monde des moins de 18 ans. Il y a évolué sur le même trio que le joueur de centre Tyson Jost, le meilleur attaquant du tournoi, qui pourrait bien entendre son nom sortir dans le top 10 du prochain repêchage de la LNH.

« Je pense que j’ai vraiment eu une belle saison, se réjouit celui qui est répertorié au 43e rang de la liste des plus prometteurs patineurs nord-américains par la Centrale de recrutement de la LNH. Beaucoup de recruteurs ont vu à travers quoi je suis passé et toutes mes rencontres ont été positives. J’ai très bien fait, je suis juste content d’être ici et je prends ça une journée à la fois. »

Bitten dit avoir rencontré 27 équipes, dont le Canadien, lors du camp d’évaluation des espoirs de la LNH qui s’est tenu toute la semaine à Buffalo. Aucune n’a omis de le questionner sur les événements qui ont fait basculer la saison des Firebirds de Flint.

« Ce n’est pas la première fois que je la raconte! », assure-t-il, confiant qu’il pourra toutefois la laisser pour de bon derrière lui dans trois semaines, lorsqu’une équipe de la Ligue nationale l’appellera à sa table pour lui remettre ses nouvelles couleurs.