PHILADELPHIE - Au repêchage de 2014, les circonstances ont voulu qu’aucun Québécois ne soit repêché en première ronde. Pourtant, il y a seulement un an, l’attaquant Alexis Pépin était identifié comme celui qui devait accomplir ce fait d’armes et il avait même fait le voyage au New Jersey pour découvrir ce qui devait l’attendre.

Mais, preuve que le monde du hockey change rapidement, Pépin a dégringolé jusqu’en fin de quatrième ronde cette annéem, étant victime d’un passage éprouvant relié à un manque de maturité.

Dans le jargon sportif, on dit que Pépin possède le total package pour s’illustrer au hockey professionnel. Le hic, c’est que l’imposant athlète s’est présenté au dernier camp d’entraînement des Islanders de Charlottetown avec un surplus de poids considérable.

Le mal était fait pour ce joueur de six pieds deux pouces qui doit afficher – au sommet de sa forme - un poids avoisinant les 220 livres. Avec un tel physique, la machine a été difficile à repartir et il n’a pu éviter un début de saison ardu le menant à une transaction aux Olympiques de Gatineau.

Même s’il a l’intention de tourner la page sur cet épisode regrettable bientôt, Pépin s’est avéré très honnête lorsqu’il a rencontré un contingent de journalistes francophones plus réduit que s’il avait été sélectionné tôt dans la séance. Il a abordé sans rechigner ce détour dans son parcours.

« C’est un peu lié à un manque de maturité et au fait que j’avais changé certaines habitudes. Avant, je pouvais manger ce que je voulais sans prendre de poids, mais ce n’est plus le cas. Je n’ai pas surveillé ce que je faisais et j’ai payé pour… », a-t-il admis.

« Son plus grand défaut, c’est qu’il n’est pas arrivé à maturité, ce qui est le cas de plusieurs jeunes de son âge. Ça ne s’enseigne pas la maturité, ça doit venir naturellement, mais c’est un joueur doté de grandes habiletés », a pointé Benoit Groulx, l’entraîneur des Olympiques, qui a hérité de la tâche de le replacer dans le droit chemin.

« C’est évident que ce fut une année difficile pour Alexis, ses parents et nous parce qu’on traite nos jeunes comme nos enfants. Il a appris beaucoup de cette expérience et des épreuves qui se sont dressées devant lui », a confié son agent Stéphane Fiset.

« On est passé à travers et on tourne la page pour la prochaine étape. »

Le mot sur cet écart de conduite s’est rapidement transmis dans la petite planète du hockey et Patrick Roy a été bien clair quand il a accueilli Pépin à la table de l’Avalanche en lui remettant son chandail.

Alexis Pépin et Joe Sakic« Patrick m’a souhaité la bienvenue et il m’a dit : "On va te mettre en forme" », a confié Pépin qui ne pourra pas berner le passionné dirigeant.

Malgré ce message d’avertissement bien senti, Pépin était plus que ravi d’aboutir avec cette organisation qui a accompli un revirement exceptionnel la saison dernière sous les commandes de Roy.

« Je commençais à être un peu stressé avant de finalement entendre mon nom. Quant à l’Avalanche, j’ai été très content d’apprendre que j’allais poursuivre mon cheminement avec eux notamment en raison de la présence de Patrick », a reconnu Pépin qui pouvait miser sur le support d’un groupe bien garni de spectateurs.

Déjà que l’Avalanche se promet de corriger le tir avec Pépin quant à sa condition physique, la connexion qui existe entre Roy, ses adjoints québécois et Groulx saute aux yeux alors l’espoir de 18 ans a intérêt à ne pas dérailler.

« C’est certain que je serai surveillé et je devrai être à mon affaire. J’ai l’impression que ça peut m’aider que la communication soit présente parce que je saurai à quoi m’attendre pour percer leur formation éventuellement », a confirmé Pépin, originaire de Candiac, en voyant l’aspect positif.

Une aide salutaire pour frapper un circuit?

Lorsqu’un jeune dévie partiellement de la route, le rôle de l’entourage gagne en importance et Pépin a apprécié le support ressenti autour de lui.
« Je pense tout de suite à mes parents et mes frères. Mon agence était aussi constamment à mes côtés pour m’aider. Je ne voudrais pas oublier le thérapeute sportif à Charlottetown qui m’a aidé à développer de meilleures habitudes », a remercié Pépin.

« Quand une situation comme celle-ci se présente, c’est certain qu’on devient une ressource encore plus importante et on veut avant tout l’aider mentalement à traverser cela. On doit aussi épauler les parents parce que ce n’est pas facile pour eux de voir leur fils se faire lancer des bêtises par l’entraîneur ou l’organisation ou les spectateurs dans les gradins », a détaillé Fiset.

Dans l’éventail des 210 joueurs sélectionnés vendredi et samedi au Wells Fargo Center de Philadelphie, on décèle plusieurs différents types de personnalités et Pépin détient l’occasion de réagir avec éclat.

« Il a baissé au classement à la suite de ce qui est arrivé, mais le point demeure que tu peux te servir de cela comme motivation pour prouver aux autres équipes qu’elles ont laissé passer un joueur intéressant », a rappelé Fiset.

Sauf que la malchance est venue compliquer la relance puisque Pépin se remet d’une opération à une épaule à la suite d’une blessure qui l’avait ralenti en fin de saison.

« C’est dommage parce que son été sera encore éprouvant avec l’opération et il ne pourra pas recommencer avant septembre ou octobre. S’il passe à travers de tout cela, il va jouer dans la LNH », a prédit son conseiller qui travaille avec la firme de Don Meehan qui inclut aussi le Québécois Pascal Leclaire.

Son entraîneur sait bien que la blessure se dresse comme un obstacle supplémentaire, mais il affiche une confiance en son grand hockeyeur.

« Le processus de remise en forme n’est jamais évident et il gagnera en maturité à travers cela. Il s’est déjà amélioré depuis qu’il est arrivé avec nous et il était content de joindre notre organisation. Il a senti qu’on voulait le pousser, mais aussi qu’on l’aimait beaucoup comme personne », de dire Groulx.

Avec sa riche expérience à former des athlètes pour le niveau ultime, Groulx s’attache à un plan dans le cas de Pépin pour arriver au résultat désiré.

« Ça fait longtemps qu’on parle d’Alexis pour de bonnes et de moins bonnes raisons, mais on oublie qu’il a déjà compté près de 40 buts en deux saisons dans la LHJMQ. Je le vois jouer encore deux autres saisons dans notre ligue et deux dans la Ligue américaine par la suite avant de faire le saut dans la LNH. »

« À partir du moment qu’il sera en santé, on voit de belles choses pour lui et dans quatre ans, l’Avalanche se réjouira probablement d’avoir misé sur lui », a conclu Groulx.

*Avec la collaboration de Stéphane Leroux