TORONTO – Bien des choses ont changé depuis que la LNH a mis la rondelle en jeu pour la dernière fois pour un match avec un réel enjeu.

La pandémie de COVID-19 – qui a obligé des pays à se confiner et qui a dévasté les économies – a déjà causé plus de 17 millions de cas positifs confirmés et près de 675 000 décès à travers le monde.

Il y a également eu des bouleversements sociaux, avec de vastes manifestations partout sur la planète réclamant la justice sociale, l'égalité raciale et la fin de la brutalité policière aux États-Unis et ailleurs après la mort tragique de George Floyd, un homme noir, à la suite d'une intervention policière à Minneapolis.

C'était certainement un monde très différent le soir du 11 mars, quelques heures avant que la ligue décide d'interrompre son calendrier. Ce soir-là, les Kings de Los Angeles ont vaincu les Sénateurs d'Ottawa dans ce qui allait s'avérer le dernier match de la saison régulière 2019-2020.

Et 142 jours plus tard, dans un contexte compliqué, la LNH effectue sa relance.

« C'est l'une des entreprises les plus uniques et les plus difficiles auxquelles nous ayons jamais participé », a récemment affirmé son commissaire, Gary Bettman.

Toronto et Edmonton accueillent 24 équipes, dont six canadiennes, alors que la ligue reprend son calendrier samedi avec une ronde de qualification pour déterminer les têtes de série en éliminatoires et les huit équipes qui complèteront le tableau des 16 places disponibles.

Distanciation oblige

Les joueurs et le personnel sont séparés du grand public dans des zones sécurisées étroitement contrôlées – également appelées « bulles » – qui comprennent des hôtels, des amphithéâtres et des espaces récréatifs dans les villes-pôles.

Seulement deux tests positifs à la COVID-19 ont été révélés parmi les formations lors des camps d'entraînement entre le 13 et le 25 juillet, ce qui est mieux que quiconque aurait pu espérer en considérant que les joueurs étaient dans leurs villes respectives.

La LNH a estimé qu'elle ne croyait pas qu'un test ou des tests positifs à l'avenir compromettrait sa relance. Et tout en étant confiant dans ses mesures de santé et de sécurité, le principal médecin de la ligue a révélé qu'il s'attend à un test positif à un moment donné, mais des protocoles stricts supplémentaires sont en place si cela se produit.

Ce n'est pas un hasard si la LNH a choisi de s'installer au Canada – comme l'a dit Bettman – où le coronavirus est relativement sous contrôle, contrairement aux États-Unis, qui dominent le monde avec près de 4,6 millions de cas confirmés et 155 000 décès.

Beaucoup de lavage de mains, des tests quotidiens et une longue liste d'autres précautions font partie de cette nouvelle réalité de la LNH alors que la ligue se prépare à disputer ses tout premiers matchs au mois d'août et peut-être décerner la coupe Stanley à la fin septembre ou au début octobre.

Adieu l'ambiance

Cette nouvelle réalité comprend également des amphithéâtres sans spectateurs. Le Scotiabank Arena de Toronto et la Rogers Place d'Edmonton accueilleront des centaines de joueurs, une poignée de membres des médias et aucun partisan dans le but d'éviter la contagion.

Des parties des sections inférieures des deux amphithéâtres ont été recouvertes d'un revêtement bleu, tandis que huit écrans sont suspendus au plafond pour donner une atmosphère de spectacles sportifs. Et n'oublions pas les faux bruits de la foule et le délai de cinq secondes pour couper tout langage inapproprié pendant les émissions de télévision.

« Ce sera définitivement différent, a reconnu le centre Auston Matthews des Maple Leafs de Toronto. Il n'y aura pas beaucoup d'ambiance. »

La ligue a annoncé son intention de faire un geste à l'endroit des travailleurs de la santé et aux mouvements de justice sociale lors de la journée d'ouverture, samedi. Mais il sera intéressant de voir comment la LNH, historiquement très conservatrice, gèrera les choses après qu'un certain nombre de joueurs blancs aient démontré leur appui à leurs homologues noirs avec des déclarations fortes et, dans certains cas, des actions après la mort choquante de Floyd.

La NBA, qui est plus diversifiée à presque tous les niveaux, a vu des joueurs et des entraîneurs des quatre équipes lors de son coup d'envoi, jeudi, mettre un genou à terre et s'enlacer pendant l'hymne national devant le slogan « Black Lives Matter » peint sur le court à l'intérieur de la bulle de la ligue près d'Orlando, en Floride.

La LNH a repris l'idée de « Black Lives Matter » pour son nouveau mot-clé #WeSkateFor, et les joueurs se tenaient côte à côte ou par les bras lors d'une série de matchs préparatoires cette semaine. Mais le centre Nazem Kadri de l'Avalanches du Colorado, un Canadien d'origine libanaise, veut voir la ligue en faire plus.

Solidarité

Kadri, son coéquipier Pierre-Édouard Bellemare, et Matt Dumba et Jordan Greenway du Wild du Minnesota – les trois derniers sont noirs – se sont réunis pour l'hymne national avant le match préparatoire de l'Avalanche contre le Wild plus tôt cette semaine en signe de solidarité.

« Nous essayons tous d'améliorer les choses, a précisé Kadri. Nous essayons de rendre le sport plus diversifié, et la diversité ne peut s'épanouir avec le racisme toujours en cours. C'est une question importante pour nous.

« En tant que joueurs, nous avons abordé ce problème. Du point de vue de la ligue, je pense que nous aimerions voir un peu plus de reconnaissance et de les voir s'impliquer et voir qu'ils sont aux côtés de leurs joueurs. »

En ce qui concerne les matchs eux-mêmes, il sera fascinant de voir comment les joueurs réagissent à leur premier vrai match en quatre mois et demi – avec juste une poignée d'observateurs présents pour ce qui sera la saison la plus étrange jamais vue, une qui verra chaque match éliminatoire de la LNH joué au Canada pour la première fois depuis 1925.

« Une fois la rondelle en jeu et une fois qu'ils auront compris un peu ce que ça va être, ce sera une équipe contre l'autre, a précisé l'entraîneur-chef John Tortorella des Blue Jackets de Columbus. L'enjeu est grand. Je pense que c'est à ce moment que ça va devenir comme un autre match de hockey.

« Ce sera très compétitif. »