Gagner ou perdre avec les mains pleines
MONTRÉAL - Jon Cooper, Mike Sullivan, Sam Hallam et Antti Pannanen ont les mains pleines. Derrière les meilleurs joueurs de hockey du Canada, des États-Unis, de la Suède et de la Finlande, ces entraîneurs-chefs amorcent la Confrontation des 4 nations avec des formations à faire rêver.
S'ils se croisaient autour d'une table au Casino au lieu de le faire au Centre Bell, ils auraient tous la conviction d'avoir quatre as dans leur jeu. Dans le cas de Cooper et Sullivan on pourrait même parler d'une quinte flush royale tant les formations du Canada et des États-Unis sont sensationnelles.
Mais voilà : aussi puissantes et talentueuses soient leurs formations, aussi pleines soient les mains qu'ils gardent bien serrées contre leurs poitrines, trois de ces quatre entraîneurs-chefs auront l'impression d'avoir gaspillé une main gagnante.
Et ils le savent très bien.
Ce qui contribue à mousser la pression à l'aube d'un tournoi que les quatre équipes tiennent bien sûr à gagner. Un tournoi auquel les Américains partent favoris, du moins légèrement. Un tournoi que le Canada ne peut perdre pour garder sa place au sommet du hockey international.
« J'étais derrière le banc du Lightning ici il y a deux jours et nous voici à la veille du premier match du tournoi. On n'a pas eu le temps d'être envahi par la pression. Je me considère simplement privilégié de faire partie de cette équipe », a plaidé l'entraîneur-chef du Canada Jon Cooper.
Après avoir confirmé la présence de Jordan Billington devant la cage canadienne pour le premier match et la sélection d'Adin Hill à titre d'adjoint – ce qui relègue Samuel Montembeault au rôle de spectateur – Jon Cooper a toutefois reconnu que la qualité des formations en présence n'offrait aucune marge d'erreur.
C'est pour cette raison que les quatre entraîneurs-chefs n'hésiteront pas une seconde à apporter des changements si les combinaisons qu'ils ont pourtant passé des heures à concocter n'obtiennent pas les résultats anticipés.
« Placer Sidney Crosby avec Nathan MacKinnon allait de soi », a convenu Jon Cooper après l'entraînement du Canada, mardi après-midi, au Centre Bell.
« Ces deux gars-là se connaissent depuis toujours. Ils patinent et s'entraînent ensemble l'été. Dans le vestiaire, je les regarde parler de hockey et se relancer sur ce qui doit être fait. Il y a là une chimie qui me semble évidente. Une chimie qui devrait se traduire par des succès sur la patinoire », a poursuivi Cooper avant de reconnaître bien humblement : « Mais c'est seulement une fois sur la glace qu'on verra si la chimie se développe vraiment. »
Et si cette chimie ne se développe pas? Si la combinaison Crosby, MacKinnon et Mark Stone qui a hérité du privilège d'évoluer à la gauche de ces deux très grands joueurs de hockey implose au lieu d'exploser comme les dirigeants de Hockey Canada et les amateurs de hockey d'un océan à l'autre, à l'autre le souhaite?
« Il faudra réagir. Rapidement! Il faudra ne pas avoir peur de faire des changements et il faudra que les joueurs concernés comprennent qu'il n'y a rien de personnel dans tout ça », a insisté Jon Cooper qui a qualifié ses joueurs de « guerriers qui sont aussi des gagnants ».
De premier rôle, à rôle de soutien
Mike Sullivan, qui hérite de la meilleure formation américaine de l'histoire, a insisté sur le grand talent des joueurs des États-Unis et sur la plus grande encore volonté de gagner qui les anime.
Une volonté qui a pris tout son sens lors de l'entraînement des USA mardi matin.
Troisième dans la LNH au chapitre des buts marqués (12) en avantage numérique cette saison derrière Brayden Point et Jake Guentzel qui en revendiquent 13 avec le Lightning de Tampa Bay, Dylan Larkin n'était pas de la première unité d'attaque massive des USA : une unité pilotée par Jack Hughes, flanqué de Matthew Tkachuk et Auston Matthews avec Jack Eichel et Adam Fox à la ligne bleue.
Larkin n'était pas même au sein de la deuxième unité d'attaque massive formée de Jake Guentzel, Brady Tkachuk, Kyle Connor, Matt Boldy et Zach Werenski.
C'est au sein de la deuxième unité de désavantage numérique que le troisième marqueur de la LNH en attaque massive s'entraînait mardi matin. Et c'est le rôle qui lui sera confié par Mike Sullivan, jeudi, pour le premier match des USA contre la Finlande.
« Tous les gars qui sont ici sont des joueurs de premier plan au sein de leur formation régulière. Ils demeurent tous des joueurs de premier plan, mais pour des raisons évidentes auront à remplir des rôles qui seront différents, mais tout aussi importants pour les succès de l'équipe. Ce sont justement les sacrifices que les joueurs accepteront de faire qui rendront notre équipe encore meilleure que la grande qualité des joueurs qui la compose », a insisté l'entraîneur-chef des USA qui a déjà des plans B, C et D de prêts... au cas ou!
« Depuis la sélection des joueurs, mes adjoints (John Tortorella et David Quinn) et moi avons beaucoup échangé afin de concocter les combinaisons les plus complètes possibles. Nous avons mis une formation en place. On la lancera dans la mêlée jeudi et on verra ce que nous obtiendrons comme résultats. Dans un tournoi aussi court, tu n'as pas le luxe d'être patient. Si les choses n'évoluent pas selon les plans établis, nous réagirons », a conclu Sullivan.
McDavid enfin en vedette
Considéré comme le meilleur joueur de la planète hockey en ce moment, Connor McDavid aura un gros mot à dire sur les succès de l'équipe canadienne.
Jon Cooper est donc très heureux de pouvoir compter sur lui.
Mais il est plus heureux encore pour son joueur de centre vedette qui profitera enfin d'une compétition internationale pour mettre en évidence tout le talent qui l'habite. Il a disputé trois matchs, en 2016, à la Coupe du monde disputée à Toronto, alors qu'il était regroupé avec les meilleurs jeunes joueurs de la LNH, il a aussi pris part au Championnat du monde et à celui des moins de 20 ans. Mais il n'a jamais goûté aux Jeux olympiques.
« Ça fait une dizaine d'années déjà que Connor est dans la LNH et il n'a pas encore eu l'occasion de profiter d'une scène comme celle qu'il occupera au cours des deux prochaines semaines. Ce qui sera un tremplin pour l'an prochain aux Jeux olympiques. Il y a quelque chose de vraiment spécial de prendre part à des compétitions de si haut calibre. Ça lui permettra de démontrer encore davantage l'envergure de son talent et permettra surtout aux amateurs de partout de le voir aller, entouré des meilleurs joueurs au monde. Il était grand temps qu'il puisse profiter de cette vitrine », a conclu Cooper.
Impossible d'être en désaccord avec le coach d'Équipe Canada sur ce point...