MONTRÉAL – Le calendrier régulier de la LNH devait, en théorie, se conclure ce samedi. À cette période de l’année, l’action ne manquait pas dans le téléphone et la boîte courriel de Neil Glasberg, un agent qui représente quelques dizaines d’entraîneurs et de dirigeants dans le milieu du hockey.

Habituellement, Glasberg, un Montréalais établi à Toronto, recevait plusieurs appels durant les cinq ou six semaines qui précédaient la 82e partie de chaque équipe. Le tout se déroule dans la plus grande confidentialité, mais l’objectif des dirigeants qui le contactent s’avère de déterminer quels clients de Glasberg pourraient être disponibles advenant qu’ils procèdent à un changement à la barre du club.

« C’est toujours très informel comme conversation, mais on évoque des noms et je pose des questions sur les besoins de l’organisation. Je ne fournis pas une liste exhaustive de noms pour chaque équipe parce que j’essaie plutôt de faire un fit avec mes clients et le club. Pour chaque entraîneur, le bon emploi dépend de l’organisation, du style, de la composition de la formation... », a expliqué Glasberg au RDS.ca.

« Présentement, ces appels ont ralenti énormément. J’ai eu moins de cinq de ces appels jusqu’ici », a-t-il ajouté.

La routine ne tient plus dans une crise comme celle-ci et la pause décrétée par la LNH n’augure rien de bon quand on recense les plus récentes répercussions de la COVID-19. Toutefois, peu importe le sort qui sera réservé à la saison 2019-2020, des équipes voudront procéder à des changements derrière le banc.

« Normalement, au lendemain du dernier samedi de la saison, on vit un genre de Black Sunday. Ce n’est pas comme dans la NFL, mais c’est rendu ainsi dans la LNH. Qu’est-ce qui va se passer cette année? On traverse une période complètement folle et sensible à plusieurs égards. Selon moi, des décisions doivent être prises, mais elles ne seront sûrement pas prises dimanche », a-t-il mentionné en comprenant que des enjeux de société plus importants accaparent l’attention.

La différence résidera dans le délai. Le couperet devrait tomber plus tard ce printemps ce qui bousculera les échéanciers conventionnels.

« Le temps dont les directeurs généraux disposent normalement pour prendre une décision sera raccourci. Souvent, les équipes ont quelques candidats en tête et elles ont du temps en masse pour en parler, elles doivent demander des permissions pour parler à des candidats. Tout ça prend du temps », a précisé Glasberg qui représente des clients d’envergure comme Mike Sullivan, Gerard Gallant, John Tortorella, Jacques Martin, Kirk Muller et Pascal Vincent.

Même s’il demeure persuadé que quelques clubs de la LNH décideront de trouver un nouveau candidat pour diriger leur formation respective, Glasberg ne peut s’empêcher de se poser une autre question.

Neil Glasberg et Pascal Vincent« Avec les gens qui perdent leur emploi chaque jour, est-ce qu’une équipe va décider de garder son entraîneur pour la saison prochaine? Je ne connais pas la réponse, mais c’est une période délicate. Ça devrait être business as usual, mais ce ne l’est parce que la saison est sur la glace présentement », a prononcé l’ancien haut dirigeant de la Banque Nationale, HSBC et BMO.

Cela dit, il demeure persuadé que le statu quo ne prévaudra pas au terme de cette saison qui a déjà mené à huit changements d’entraîneurs. Il se fie en particulier sur un élément pertinent pour répondre à une question à propos de Pascal Vincent qui attend une occasion de grimper dans le circuit Bettman.

« On sait que des changements vont survenir, c’est certain. Pour quelqu’un comme Pascal qui mérite une chance dans la LNH, il y a cinq entraîneurs par intérim : mon client Geoff Ward à Calgary qui ne sait pas encore s’il va conserver le poste, (Alain) Nasreddine au New Jersey, (Bob) Boughner à San Jose, (Rick) Bowness à Dallas et Dean Evason avec Minnesota. Bref, des décisions vont être prises dans ces cinq cas et probablement que d’autres entraîneurs ne seront pas renouvelés », a précisé celui qui a défendu les intérêts d'Evander Holyfield pendant quelques années.

La semaine du repêchage de la LNH demeure, année après année, un moment très utile pour les équipes qui doivent embaucher un nouvel homme de confiance. Les rencontres qui s’y déroulent en marge permettent souvent d’éclaircir le portrait. Ce n’est pas pour rien que tant d’entraîneurs, en chef ou adjoint, se déplacent à cet événement en gardant le tout secrètement dans bien des cas.

« La journée avant le repêchage, l’Association des entraîneurs de la LNH tient une journée de conférences et je dirais que près de 95 % des entraîneurs de la LNH, de la Ligue américaine et du junior sont présents. Ça vient d’être annulé cette semaine. C’est une occasion qui tombe pour le réseautage », a reconnu Glasberg.

Gallant n’a pas besoin de promotion

Alors que le ciel gris persiste, les entraîneurs et les dirigeants des organisations se posent des questions comme tout le monde sur leur sort personnel. Glasberg devient une source précieuse pour répondre aux inquiétudes de ses clients.

« Des équipes ont commencé à couper des salaires. Ça ne s’est pas fait partout, ça se passe au cas par cas. Ça dépend de chaque propriétaire et de l’état financier du club. Je reçois des appels parce que mes clients ont des contrats et ils veulent savoir comment ça marche. Ça frappe tous les domaines. Si tu es sous contrat et que le propriétaire décide de couper ton salaire, ce n’est pas la meilleure décision de répondre que tu n’acceptes pas ce geste. Je parle pour garder ton carrière en bonne santé », a suggéré Glasberg comme avis alors que bien des gens sont dans le même bateau.

Du côté du Canadien, on a assisté à la mise à pied temporaire de 60 % des employés réguliers. Le directeur général Marc Bergevin et l’entraîneur-chef Claude Julien ont vu leur salaire réduit à l’image des employés des opérations hockey.

Tant qu’à parler du Canadien, Glasberg a profité de la conversation pour confirmer que la récente visite – qui a fait jaser – de son client, Gerard Gallant, à Montréal, n’avait absolument rien à voir avec le hockey.

Heureusement pour lui, Gallant n’a pas besoin d’une ouverture à Montréal pour retourner derrière un banc de la LNH. Il devrait susciter passablement d’intérêt ailleurs. Glasberg n’a pas besoin de le « vendre » à des dirigeants pour qu’ils soient attirés par lui.

« Dans son cas, ce n’est pas une question de le promouvoir. Si une équipe est intéressée parce qu’il est disponible, c’est leur responsabilité d’appeler Vegas pour demander la permission de lui parler. Si une équipe est intéressée, ça se peut qu’elle m’appelle pour savoir s’il a un intérêt réciproque. Ce n’est pas moi qui essaie de le vendre à une équipe parce que ces équipes ont des entraîneurs sous contrat, ce n’est pas de mes affaires. Je ne vais jamais pousser un entraîneur sous un autobus comme on dit en anglais. Je ne travaille pas de cette façon », a expliqué Glasberg qui a commencé cette étape de sa carrière avec des clients dans la Ligue canadienne de football dont Danny Maciocia.

*Dans un 2e article, on abordera notamment un aspect que Neil Glasberg a dénoncé publiquement récemment : la vieille mentalité perpétuée par les dirigeants de la LNH qui ont souvent tendance à embaucher leurs amis.