Sommaire du 6e match

MONTRÉAL - Le 11 août dernier, le Lightning de Tampa Bay a eu besoin de huit périodes pour battre les Blue Jackets de Columbus dans le cadre du tout premier match des séries.

 

Que serait-il arrivé si les Jackets, qui les avaient balayés en quatre petites parties dès la première ronde un an plus tôt, s’étaient sauvés avec la victoire avant que Brayden Point, à 10 :27 de la cinquième période de prolongation, ne mette fin au match à la faveur des Bolts?

 

Meilleur club de la LNH, grand favori encore cette année pour se rendre jusqu’aux grands honneurs, le Lightning se serait-il éteint bêtement pour une deuxième année consécutive?

 

On ne le saura jamais.

 

Fort d’une victoire de 2-0, la sixième consécutive depuis le début des séries dans le cadre d’une partie suivant un revers, le Lightning a finalement soulevé la coupe. Après 65 jours passés dans les bulles protectrices gonflées par la LNH à Toronto et Edmonton, tous les membres des Bolts ont finalement pu sortir les bulles et plonger dedans sans retenue.

 

« Cette victoire dans le premier match contre Columbus a servi de tremplin pour nous amener jusqu’ici. J’en suis convaincu », a reconnu l’entraîneur-chef Jon Cooper qui s’est présenté en salle d’entrevue entouré de tous ses adjoints.

 

« Nous formons un club résilient, mais si nous avions perdu ce match, les souvenirs de ce qui est arrivé l’an dernier seraient peut-être revenus nous hanter. On aurait réentendu parler de cette série qui a fait très mal. Nos gars ont encaissé cette élimination comme un solide coup de poing au menton. Il est essentiel d’apprendre dans la défaite pour comprendre ce qui doit être fait pour gagner. Mais en même temps, nous avions besoin de positif pour prendre notre élan en lever de rideau des séries. Cette victoire nous l’a donné. Ce gain a été très important », a poursuivi Cooper entre une gorgée de champagne dissimulé dans un verre de Gatorade et une touche du gros cigare qu’il tenait dans l’autre main.

 

Des mains de Steven Stamkos à celles de Brayden Point, en passant par Victor Hedman et Nikita Kucherov sans oublier les Québécois Alex Killorn, Cédric Paquette, Yanni Gourde et Mathieu Joseph, le plus beau trophée de tous les sports professionnels a fait un premier tour d’honneur qui a permis d’effacer les mauvais souvenirs de l’an dernier.

 

D’effacer tous les mauvais souvenirs point.

 

BriseBois : un long cri de satisfaction

 

À l’image de ses joueurs, le directeur général Julien BriseBois a profité de son tête-à-tête avec la coupe pour chasser le cauchemar de l’an dernier.

 

C’est du moins l’impression qu’il a donnée lorsqu’il a échappé un long cri en brandissant à bout de bras la coupe argentée avant de l’embrasser longuement. Un cri de satisfaction bien sûr. Mais un cri qui semblait aussi cacher le mot enfin!

 

Cette coupe, ce sont les joueurs du Lightning qui l’ont gagnée. Qui l’ont gagnée brillamment quand on considère qu’ils ont survolé les deux premières rondes aux dépens des Blue Jackets et des Bruins en cinq matchs. Qu’ils ont gagné la finale de l’Est aux dépens des Islanders et la grande finale en six parties. Qu’ils ont pris part à 15 périodes de prolongation dans le cadre de ces 22 matchs. Qu’ils ont maintenu une fiche de 6-2 dans le cadre des huit parties qui se sont décidé au-delà – et parfois bien au-delà – les 60 minutes de temps réglementaire.

 

Mais cette équipe c’est Julien BriseBois qui l’a peaufinée afin d’éviter la répétition d’une catastrophe comme celle de l’an dernier.

 

Julien BriseBois a hérité d’un véritable trésor lorsque Steve Yzerman a quitté le Lightning et qu’il lui a confié l’équipe qu’il avait mise sur pieds. Même si BriseBois avait grandement participé à la construction de cette grande équipe, il se devait d’apporter une touche personnelle. Il l’a fait en greffant des vétérans un brin anonyme aux yeux de bien des amateurs, mais deux brins essentiels dans un vestiaire de la LNH.

 

Patrick Maroon n’a jamais été et ne sera jamais Brayden Point ou Nikita Kucherov. Mais il a rempli le mandat que BriseBois et son ancien coach dans les mineures Jon Cooper lui avaient donné : changer l’attitude dans le vestiaire. Faire comprendre que le talent c’est bien, mais que le travail nécessaire pour mettre en évidence ce talent est mieux encore.

 

Blake Coleman, Barclay Goodrow et Zack Bogosian ont aussi été des acquisitions importantes effectuées par Julien BriseBois pour maximiser le talent de son équipe.

 

Sans oublier que BriseBois est demeuré de marbre lorsque son équipe perdait plus souvent qu’elle ne gagnait en début de saison et que bien des observateurs autour de la LNH suggéraient que le temps était peut-être venu de remplacer Jon Cooper derrière le banc.

 

Le Lightning qui a soulevé la coupe Stanley lundi soir à Edmonton, cette équipe qui paradera mercredi avec le trophée dans les rues de Tampa pour la deuxième fois de son histoire n’est plus seulement l’équipe que Steve Yzerman a créée. C’est aussi l’équipe que Julien Brisebois a améliorée. L’équipe qui a surmonté la catastrophe de l’an dernier pour se rendre jusqu’à la coupe Stanley.

 

Il y avait de quoi crier de joie, de satisfaction, de soulagement.

 

Hedman coiffe Point

 

Si l’issue du sixième match de la finale n’a jamais vraiment fait de doute tant le Lightning a joué du hockey efficace pour prendre les devants 2-0 et limiter ensuite au minimum les chances accordées aux Stars, l’issue de la course au trophée Conn-Smythe était beaucoup plus serrée.

 

Et cette course, c’est Victor Hedman qui l’a gagnée.

 

Personne ne peut contester le fait que le scrutin mené auprès de journalistes affectés à la couverture de la grande finale ait couronné Hedman. Après tout, il est le meilleur défenseur de la LNH et il a été un grand général non seulement à la ligne bleue du Lightning, mais dans les trois zones où il a su dominer ses adversaires et contribué à faire rayonner ses coéquipiers.

 

Cela dit, Brayden Point aurait pu soulever le Conn-Smythe qu’il aurait été tout aussi difficile de contester sa victoire.

 

Point a marqué 14 buts. Plusieurs buts très importants. À commencer par celui qui a permis au Lightning de gagner le premier match contre Columbus en cinquième période de prolongation.

 

Il a ajouté 19 passes.

 

Le Lightning a maintenu un dossier parfait de 11 victoires dans les matchs au cours desquels Point a touché le fond du filet.

 

Le Lightning a encaissé deux revers dans le cadre des matchs ratés par Point en raison d’une blessure qui l’a hypothéqué.

 

Des statistiques qui font contrepoids à celles tout aussi éloquentes affichées par son coéquipier défenseur qui a marqué 10 buts – tous en séries – amassé 22 points et maintenu une moyenne de temps d’utilisation de 26 min 28 s par partie.

 

Hedman et Point ont été tellement dominants qu’ils ont balayé de l’équation Nikita Kucherov pourtant le meilleur marqueur de la Ligue depuis la reprise des activités avec une récolte de 34 points dont 27 mentions d’aide en 25 matchs. Un point de plus que son compagnon de trio.

 

Et que dire d’Andrei Vasilevskiy? En plus de réaliser un premier jeu blanc en carrière en séries dans le cadre du match décisif – 22 arrêts dont 14 en troisième période alors que les Stars ont tenté une remontée – le meilleur gardien de la Ligue a maintenu une moyenne de 1,90 but alloué par match et une efficacité de 92,7 %.

 

Mais il y a mieux. Vasilevskiy a non seulement disputé les 25 matchs de son équipe, mais il n’a pratiquement jamais quitté sa cage. Il a passé 1708 minutes et huit secondes devant son but. C’est plus de 28 heures devant son but. C’est surtout 215 minutes de plus que son vis-à-vis Anton Khudobin qui a terminé au deuxième rang pour le nombre de minutes passées devant son but.

 

Malgré ces tableaux de chasse, Vasilevskiy et Kucherov ne pouvaient rivaliser avec Hedman et Point.

 

Ça en dit long sur la qualité du jeu qu’ils ont maintenu en séries. Surtout en grande finale dans le cas de Point.

 

Grande victoire de Bettman

 

Si le Lightning succède aux Blues de St. Louis sur le trône réservé aux champions de la coupe Stanley, il est important de souligner que la finale de 2020 s’inscrira aussi dans l’Histoire comme la victoire de Gary Bettman.

 

Une grande victoire!

 

Le commissaire a pris un pari audacieux lorsqu’il a claironné ses intentions de remettre la coupe Stanley au terme de séries éliminatoires dignes de ce nom alors que la Covid-19 l’avait contraint à mettre la saison en pause et que les signes laissant croire à une reprise étaient loin d’être convaincants.

 

Bettman ne s’est pas seulement contenté de lancer cette grande déclaration. Il a pris les moyens pour réaliser sa promesse audacieuse.

 

Flanqué de son bras droit Bill Daly, le commissaire a orchestré un plan avec l’Association des joueurs. Un tour de force qui a non seulement permis d’élaborer un plan qui a été un succès sur toute la ligne, mais qui a aussi, et surtout, permis de signer une prolongation de la convention collective alors que la paix syndicale semblait menacée.

 

La création des bulles de sécurité n’a pas été facile. La vie dans les bulles, loin de tous et de tout, a semble-t-il été plus difficile encore.

 

D’où la décision de modifier la manière de remettre la coupe Stanley.

 

Au lieu d’inviter le capitaine de l’équipe gagnante à venir le rejoindre pour lui remettre la coupe, le commissaire Bettman a plutôt invité – le directeur général Julien BriseBois a pris part au processus menant à ce scénario – tous les membres du Lightning à venir le rejoindre autour de la coupe.

 

Pas juste les joueurs qui venaient de disputer la rencontre en plus de Steven Stamkos qui, malgré la blessure qui l’a limité à 2 :27 d’utilisation lors du quatrième match, mais bien tous les membres de l’organisation. Les joueurs réservistes, les préposés à l’équipement, les membres de l’équipe médicale, les adjoints à Jon Cooper, les membres de l’état-major dont notre ancien collègue à RDS Mathieu Darche qui est maintenant l’adjoint de Julien BriseBois.

 

Tout le monde était là.

 

Après deux mois passés dans la bulle, c’était non seulement une bonne idée, c’était la meilleure façon de souligner l’importance de l’unité pour se rendre jusqu’à la coupe Stanley. Une coupe qui est déjà difficile à gagner et qui l’était davantage cette année en raison des circonstances qu’on connaît. Loin des membres de leurs familles, plus loin encore de leurs partisans, les joueurs ont dû se serrer les coudes plus encore que d’habitude pour se rendre jusqu’aux grands honneurs.

 

Et au lieu de se faire huer comme c’est le cas chaque année, Gary Bettman mérite d’être ovationné pour le leadership qu’il a affiché dans le cadre de la reprise des activités et de séries qui se sont non seulement bien déroulées, mais qui nous ont offert du très bon hockey.

 

Il ne reste plus qu’à déterminer quand et comment débutera et se déroulera la saison 2020-2021. Ce qui est loin d’être acquis. Ce qui pourrait même représenter un autre gros défi pour la Ligue et ses joueurs.




     
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