MONTRÉAL – Pendant que des milliers de jeunes, aux quatre coins de la planète, doivent redoubler d’ingéniosité pour ne pas s’ennuyer, Dawson Mercer a retrouvé son coin de paradis. Et ça tombe plutôt bien parce qu’il peut bombarder son jeune frère, Riley, un gardien de but, afin de ne pas perdre sa touche en vue du repêchage de la LNH. 

Exilé de son domicile familial de Terre-Neuve-et-Labrador depuis l’âge de 14 ans, l’attaquant droitier partait de loin également au niveau de son bagage de hockeyeur. 

Le cheminement de Mercer aurait toutefois pu frapper un mur en arrivant au Québec. Ça n’avait rien à voir avec le volet sportif puisqu’il détenait tous les attributs afin de progresser. C’était plutôt relié au fait que Mercer possède un attachement très fort avec sa famille. 

S’il diffère de bien des jeunes qui se démènent pour davantage d’autonomie à cet âge, Mercer a trouvé la destination idéale à Drummondville. Il est atterri dans la maison des Gauthier où Denis, sa femme et leurs trois enfants sont tombés sous le charme de leur premier pensionnaire des Voltigeurs. Dawson Mercer

« Quand je te dis qu’il très proche des membres de sa famille, c’est très proche. C’est difficile à expliquer à quel point il existe une complicité entre eux. Les racines sont très profondes en lui », a raconté l’analyste de RDS qui a disputé 554 matchs dans la LNH. 

« Dawson et mes enfants se textent encore toutes les semaines. Je considère qu’il fait encore partie de ma famille. Ce ne sont pas des frères de sang, mais ce sont des amitiés qui se forgent et qui vont rester à vie », a décrit Gauthier à propos du sympathique patineur. 

Réservé, frêle et extrêmement passionné à son arrivée, Mercer a quitté sa « deuxième famille » avec plus d’assurance dans sa personnalité et plus de possibilités pour sa carrière de hockeyeur. 

Devenu un rouage important des Voltigeurs, il n’a pas échappé à la réalité des cycles du hockey junior alors que les Saguenéens de Chicoutimi ont investi une poche de hockey pleine de choix au repêchage pour l’acquérir il y a quelques mois.  

Le directeur général des Voltigeurs, Philippe Boucher, avait pris soin d’informer Mercer des tractations à son sujet. Le choc a donc été moins brutal pour Mercer et pour Gauthier qui naviguent dans le hockey. 

« Ouais, ç’a été tough. C’est avec beaucoup d’émotions qu’on l’a laissé partir. […] Je comprenais un peu plus comparativement à ma femme qui était plus émotive et mes enfants aussi parce qu’on perdait quelqu’un d’important qui avait une grande place dans notre famille, un grand frère au quotidien », a admis Gauthier en rappelant que ça demeurait une superbe occasion, au niveau sportif, pour Mercer de se joindre aux Sags qui aspiraient aux grands honneurs à leur tour. 

Le moment idéal pour renouer avec les Gauthier devait être le repêchage de la LNH. 

« C’est un moment qu’on attendait, on allait être là pour le supporter. Ç’aurait quasiment été comme un de mes fils qui se faisait repêcher. C’est un peu comme ça que je me sentais. Ce dont on va se souvenir le plus, ce sont les amitiés au quotidien, la complicité, les fous rires avec mes enfants. C’est un jeune qui avait du temps pour chacun de mes enfants. Même ma fille qui aura 13 ans cet été. Il n’était pas comme un ado qui arrive quelque part en développant plus une complicité avec juste une personne », a vanté Gauthier avec reconnaissance. 

« Tu ne peux pas te tromper avec un joueur comme lui » 

Le repêchage n’aura rien d’aussi grandiose que les éditions habituelles, mais tout ce discours à propos de Mercer sonne comme de la musique aux oreilles des dépisteurs qui ne négligent aucun aspect avant de trancher sur un espoir.  

« C’est un joueur qui amène une culture à ton équipe et à ton organisation via son éthique de travail et son sens côté compétiteur. Pour l’instant, tu ne peux pas garantir que c’est un top-6, dans le sens qu’on ne sait pas encore s’il réussit à produire parce qu’il est tellement combatif ou parce que c’est un naturel. Mais, dans le pire des cas, il joue dans ton top-9. Tu ne peux pas te tromper avec un joueur comme lui », a exposé un recruteur de la LNH consulté récemment. 

« Ce qu’on se fait dire, c’est ‘Wow, ce kid-là, ça va au-delà du joueur, c’est un jeune incroyable », a-t-il tenu à ajouter sur celui qui avait aussi convaincu les dirigeants d’Équipe Canada Junior. 

À la lecture de la dernière liste de la Centrale de recrutement de la LNH, on aperçoit le nom de Mercer dès le 10e échelon des patineurs de l’Amérique du Nord. Ce classement se justifierait notamment par le grand potentiel qui existerait au bout de son bâton.  

« C’est un athlète qui joue vite, il a le puck sur la palette et il sait où il va l’envoyer dès qu’il le reçoit. Quand son physique va rattraper son niveau d’habiletés et son sens du hockey, tu devrais avoir un gars qui peut jouer sur tes deux premiers trios », a décrit une deuxième source anonyme qui travaille pour une équipe de l’Est dans la LNH. 

Gauthier n’œuvre pas en tant que recruteur, mais il connaît Mercer aussi bien qu’il pouvait contrer un adversaire physiquement à son époque. Il n’hésite pas à dire que Mercer constitue le meilleur joueur qu’il ait vu au sein des Voltigeurs depuis Sean Couturier. 

« Je suis convaincu qu’il va jouer dans la LNH parce que je n’ai aucune idée de son plafond comme joueur. Il est tellement en pleine évolution. Physiquement, il n’est pas encore super gros ou super fort. Le talent naturel et la passion, il a ça. Mettons qu’une équipe prenait un risque en le repêchant vers la fin du top-10, elle ne se trompera pas. Je vois mal comment il pourrait décevoir un club », a argué Gauthier avec conviction. 

Les bouleversements provoqués par la COVID-19 n’ont pas permis aux Saguenéens d’encaisser tous les bénéfices prévus par son arrivée. Mercer aura été limité à 16 parties avec eux après la transaction. Le directeur général et entraîneur-chef, Yanick Jean, n’avait pas besoin de plus de temps pour être convaincu de son apport. 

« Ça faisait longtemps qu’on essayait de mettre la main sur lui. Honnêtement, après quelques semaines, il assumait déjà du leadership. Ce n’est pas peu dire dans le vestiaire aussi fort qu’on avait avec les (Rafaël) Harvey-Pinard, (Félix) Bibeau et des gars comme ça. Quand il sera à maturité physique, je ne vois pas de faille, de faiblesse », a prononcé Jean qui n’est pas du style à se lancer dans les grandes envolées. 

Mercer est conscient qu’il doit développer sa force musculaire sans tarder. Le bon côté de la pandémie lui permet de s’y attaquer au lieu de passer ses journées à pêcher dans sa ville péninsulaire. Il a tout l’équipement requis et même plus. 

« Je suis très chanceux là-dessus et il ne faut pas oublier mon petit frère sur lequel je peux me gâter en enfilant mes patins à roues alignées. » 

Davantage un ailier dans la LNH ? 

Son profil laisse tout de même indiquer qu’il devra évoluer à l’aile dans la LNH ou du moins pendant les premières années. 

Dawson Mercer« Tu ne veux pas le surtaxer quand il travaillerait comme centre profondément en zone défensive. Tu veux Dawson pour ses skills et sa production offensive. Tu ne veux pas qu’il se brûle à défendre », a jugé un recruteur. 

L’inspiration de Mercer demeure toutefois Patrice Bergeron. Sans l’identifier à un joueur en particulier, Yanick Jean a trouvé un descriptif qui pourrait bien cadrer avec son style dans la LNH.

« Eh mon dieu, ce sera un gars qui peut être un métronome. C’est certain qu’il va jouer dans un top-6. Pour moi, c’est une valeur sûre! », a tranché Jean en comprenant bien la portée de ce compliment.  

« Il a un talent qui ne s’enseigne pas. Le puck colle après lui, t’as l’impression que la rondelle rebondit pendant qu’il tombe, mais il se lève et la rondelle est encore sur sa palette. Ça ne s’enseigne pas. Il a de très bonnes mains en espaces restreints. Jouer dans le trafic, ça ne l’intimide pas », a renchéri Gauthier. 

Une fois que le hockey reprendra, Mercer n’aura surtout pas peur de s’éloigner de sa famille pour vivre les prochains chapitres de sa carrière. 

« Évidemment, je suis content de passer beaucoup de temps avec les membres de ma famille. Mais je dois avouer que j’aurais grandement préféré vivre la fièvre des séries avec les Sags présentement et, eux aussi, ils aimeraient plus que j’en sois là », a conclu Mercer.