RDS présentera le documentaire Pat Burns l’homme derrière le coach, dans le cadre de la série 25 ans d’émotions, mercredi à 20 h 30.

Pat Burns n’a jamais vraiment permis qu’on découvre le type d’homme qu’il était. Il semblait se plaire à cacher une facette plus positive de sa personnalité. Sous des dehors de gros ours grognon, il était parfois intimidant, bourru et presque toujours à prendre avec des pincettes. Ça, c’était Burns, l’homme de hockey.

Dommage car le bagarreur ténébreux qu’il était nous a empêchés de le voir sous un meilleur jour. Un fin raconteur, il était même très drôle quand il rappelait quelques bonnes histoires liées à son premier métier de policier, sans doute pour en rajouter une couche sur l’image de dur qu’il aimait cultiver. Il était un coach tourmenté qui s’imaginait que le reste de la terre lui en voulait, surtout les journalistes avec lesquels il pouvait difficilement éviter les prises de bec.

Il était souvent impliqué dans des chicanes futiles avec les gens de la presse sportive, si bien que Serge Savard m’avait avoué l’avoir remplacé par un homme populaire et pondéré comme Jacques Demers pour acheter la paix dans les médias.

Dans le documentaire Pat Burns l’homme derrière le coach, présenté dans le cadre de la série 25 ans d’émotions, ce soir à 21 h sur RDS Info, le réalisateur Jean-Félix Maynard trace un portrait plutôt attendrissant de l’un des entraîneurs les plus colorés que la Ligue nationale ait connu en nous le faisant connaître davantage de l’intérieur grâce à la générosité de ses proches, dont sa veuve Line Gignac, son fils Jason, sa soeur Diane, le directeur général Lou Lamoriello, son cousin et agent Robin Burns, Martin Brodeur et quelques autres. D’ailleurs, Robin Burns, mieux renseigné que personne en raison de son rôle d’agent, confirme dans le documentaire que Pat a bel bien été congédié par Savard, une décision habilement déguisée en démission faisant l’affaire des deux parties.

Les dernières minutes de l’émission sont particulièrement émotives quand on revient sur son intronisation beaucoup trop tardive au Panthéon de la renommée du hockey et à ses funérailles qui ont réuni des gens de toutes les couches de la société, dont l’équipe au grand complet des Devils du New Jersey avec lesquels il a caressé le rêve de toute une vie, celui de remporter une coupe Stanley.

Pat a été un personnage intrigant mais respecté. En connaissez-vous beaucoup des petits gars de Saint-Henri dont les funérailles ont été célébrées par l’archevêque du diocèse de Montréal, monseigneur Jean-Claude Turcotte, dans une cathédrale bondée d’amis, de personnalités du monde du hockey, de gens des médias et de simples amateurs de hockey qu’il a rarement laissés indifférents?

Il aurait été touché d’apprendre qu’il a fait salle comble à l’heure de son départ. Ce jour-là, personne ne s’est interrogé sur le faste d’une cérémonie visant à honorer la mémoire d’un policier devenu un gagnant derrière le banc de quatre organisations de la Ligue nationale, dont celle de sa ville natale, le Canadien. Qui sait ce qui serait advenu de sa carrière si Savard ne lui avait pas accordé sa première chance?

Derrière le banc, l’entraîneur était un bulldozer. En exigeant un effort de 100 % de ses joueurs, il n’en attendait pas plus de leur part qu’il en donnait lui-même en se présentant chaque matin à l’aréna. Il n’a pas été un entraîneur reposant, mais il s’est totalement consacré à un métier appris sur le tas. J’ai eu mes différends avec lui, mais le lendemain, il agissait toujours comme si rien ne s’était passé. Le prétexte de nos engueulades était souvent le même. Il acceptait mal que je le prenne avec le sourire quand il levait le ton dans une vaine tentative d’intimidation à mon endroit. Après avoir passé huit ans dans l’entourage de Scotty Bowman, à subir ses moments d’arrogance et son langage châtié, je ne pouvais pas avoir peur de Burns. Bowman représentait le summum en matière d’intimidation.

Le cancer l’a stoppé alors qu’il était convaincu d’en avoir encore beaucoup à offrir. Trois cancers (au colon en 2004, au foie en 2005 et aux poumons en 2009) témoignent de la bataille sans merci qu’il leur a livrée. Il a finalement fermé les yeux en novembre 2010.

Cinq mois plus tôt, le comité de sélection du Panthéon lui avait refusé son admission pourtant fort méritée. On n’a jamais trop su pourquoi on l’avait privé de cet honneur qui lui aurait permis de savoir avant son départ tout le bien que la grande famille du hockey pensait de lui. Il possédait pourtant tous les critères d’admission : une coupe Stanley, plus de 1000 matchs et de 500 victoires, une quinzaine d’années derrière le banc et l’unique gagnant de trois trophées Jack-Adams avec trois formations différentes. Des entraîneurs détenant une feuille de route moins bien garnie que la sienne y étaient déjà admis.

Quand on l’a finalement accepté, quatre ans plus tard, ses statistiques n’avaient pas changé. S’il était finalement apte à entrer au Panthéon, pourquoi ne l’avait-il pas été quatre ans plus tôt? À ce jour, la réponse reste inconnue.

« Pour Pat, il n’y avait pas plus bel endroit pour passer l’éternité que celui du Panthéon », a résumé la femme de sa vie.

Le hockey avait occupé une telle place durant son existence que les cendres de Burns étaient entrées dans l’église à l’intérieur d’une coupe Stanley que Line avait pressée amoureusement contre sa poitrine. L’image la plus forte de cette touchante émission.