BOSTON - Pendant que les partisans des Bruins attisés par une majorité de collègues de Boston dénoncent la grande injustice dont leurs favoris ont été victimes lorsque Noel Acciari s’est fait passer le croc-en-jambe impuni que lui a servi Tyler Bozak et qui a mené au but gagnant marqué par David Perron, Bruce Cassidy et ses joueurs ont repris leur contrôle de leurs émotions.

Du moins c’est l’impression qu’ils donnent.

L’entraîneur-chef est toujours outré par le fait que les arbitres ont fermé les yeux devant le geste de Bozak.

Avec raison!

Car le geste de Bozak était bel et bien un croc-en-jambe. Le vétéran joueur de centre des Blues aurait donc dû être chassé sur le jeu ce qui aurait privé Perron du but crucial qu’il a marqué.

Mais bien qu’il ait maintenu ses commentaires à l’effet que la pénalité ratée représentait un œil au beurre noir de plus au visage de la LNH depuis le début des séries, Cassidy a convenu qu’il fallait tourner la page et s’assurer que la qualité du jeu offert par les Bruins définissent son équipe et ses joueurs bien plus qu’une décision des officiels. Qu’elle soit favorable ou non.

La pénalité non décernée était une erreur. Je le réécris une fois de plus pour ménager les petits cœurs des fans des Bruins et surtout contenir leur immense désir de vengeance à l’écart de tous ceux et celles qui osent les attaquer. Ou simplement tempérer leur colère.

Mais si on peut pardonner à Acciari le fait d’être demeuré sur la patinoire – il était sans doute sonné et c’est pour cette raison qu’on l’a retiré du match de manière préventive – pourquoi diable ses quatre coéquipiers sur la patinoire ont cessé de patiner? Pourquoi ont-ils cessé de jouer au hockey?

Et qui peut assurer sans le moindre risque de se tromper que les Bruins auraient profité d’une pénalité décernée à Bozak pour niveler les chances?

On peut faire appel à la loi de la moyenne et prétendre qu’après avoir été contenus trois fois plutôt qu’une lors du match de jeudi et cinq fois de suite lors des deux dernières rencontres, les Bruins se seraient réveillés.

On peut oui. Si on est fan fini des Bruins.

Mais une telle prétention tient davantage de la pensée magique que de la réalité.

Les Bruins ont commis bien plus d’erreurs que les arbitres jeudi soir. Ils ont eu tout plein d’occasions de marquer et n’ont pas su transformer ces occasions en but.

La décision de ne pas sévir contre Bozak a nui aux Bruins. C’est clair. Mais ce n’est pas la seule raison qui explique le fait qu’ils ont perdu et qu’ils soient à une défaite de voir la coupe Stanley leur filer entre les doigts pour la deuxième fois en six ans.

Suivre l’exemple de Berube

C’est pour cette raison qu’après avoir vu le président de l’équipe Cam Neely «garrocher» une bouteille d’eau à bout de bras dans sa loge pour décrier la décision des arbitres, après la sortie presque larmoyante de Cassidy après la défaite de 2-1 de son équipe jeudi, il est crucial pour la direction de Bruins de corriger le tir et de donner l’exemple. Et cette fois de donner le bon!

Craig Berube a justement donné l’exemple à suivre en finale de l’Ouest il y a quelques semaines. Était-il en colère après que les arbitres eurent accordé le but gagnant marqué par Erik Karlsson après qu’une passe avec la main de Timo Meier eut été ratée par les quatre officiels sur la patinoire.

Bien sûr. Il devait même être en furie. Et peut-être a-t-il lui aussi lancé ce qui lui tombait sous la main une fois dans son bureau. Peut-être aussi a-t-il lâché quelques sacres à l’endroit des officiels.

Mais quand il est arrivé devant ses joueurs, il leur a ordonné de ne pas se plaindre de la décision des officiels et les a sommés de mettre tout ça de côté pour se pencher tout de suite sur le prochain match. Berube a lancé le même message devant les journalistes, devant les partisans, devant la planète hockey au grand complet.

Berube avait même ajouté que ce n’est pas en raison du but illégal marqué en prolongation que son équipe venait de perdre le match numéro trois de la finale contre San Jose, mais plutôt en raison de toutes les occasions ratées et les erreurs commises en fin de match alors que la victoire était à leur portée.

Une sortie qui a calmé ses joueurs, calmé son équipe, calmé les partisans et qui a servi de tremplin pour propulser les Blues en finale de la coupe Stanley.

Il sera d’ailleurs intéressant de voir comment le coach des Blues s’y prendra maintenant pour maintenir le niveau de contrôle et de confiance de son équipe dans des circonstances tout à l’opposé de celles du troisième match contre les Sharks.

Car il serait ironique de voir les Blues sombrer dans un excès de confiance au surlendemain de la décision des officiels qui les a aidés à prendre à gagner 2-1 jeudi et à s’approcher à une victoire de la première conquête de la coupe Stanley de leur histoire. Une conquête qu’ils pourraient célébrer à St.Louis, avec leurs partisans, dès dimanche soir.

Un seul objectif : gagner

Alors que Zdeno Chara venait de donner une leçon de courage, de contrôle, de leadership, d’abnégation et de désir de vaincre en chaussant les patins en dépit d’une fracture de la mâchoire – diagnostic qui n’a pas encore été confirmé cela dit – il était surprenant de voir la haute direction des Bruins perdre les pédales comme elle l’a fait jeudi et ouvrir toute grande la porte à une dangereuse avalanche d’émotions négatives dans le vestiaire.

Une chance que des vétérans comme Patrice Bergeron ont pu calmer la tempête en affichant le contrôle nécessaire et salutaire dans une telle situation.

Un calme qui a ramené coach Cassidy sur des bases plus solides et qui l’a surtout ramené sur l’enjeu premier du match qui s’en vient.

«On doit maintenant aller à St.Louis et prendre les moyens nécessaires pour gagner. On l’a fait lors du premier match là-bas. Je me fiche du pointage final : il faut prendre les moyens pour marquer un but de plus qu’eux. Si on peine à marquer comme cela a été le cas hier soir (jeudi) on devra être encore meilleurs défensivement. Mais il faut un but de plus. Que ce soit 1-0 ou 6-5, on doit gagner.»

Les Bruins sont en pays de connaissance.

Ils tiraient de l’arrière 3-2 en première ronde lorsqu’ils sont allés niveler les chances à Toronto avant d’éliminer les Leafs lors du septième match présenté au Garden.

Un scénario que les Bruins sont maintenant obligés de répéter.

Quand l’impartialité prend le bord

Que Cam Neely soit en furie, je peux comprendre. Que son coach le soit, que les joueurs le soient, que les préposés à l’équipement et les chauffeurs de la zamboni soient en colère tout comme les chauffeurs de taxi et l’ensemble des partisans soient sur le bord de la crise de nerfs après une décision comme celle qui a marqué la fin de match jeudi, c’est normal.

C’est même correct. Du moins pour les partisans, les chauffeurs de taxi et les conducteurs des deux zambonis qui travaillent au TD Garden.

Mais quand les journalistes embarquent dans la danse, ça devient inquiétant.

Les Bruins, c’est connu et reconnu depuis des années, font l’objet d’une couverture médiatique très serrée. L’ennui, c’est que plusieurs collègues couvrent les Bruins comme s’ils étaient leur club. Leur club à eux. Pas juste le club qu’ils suivent au quotidien.

À lire et à entendre plusieurs des commentaires qui se multiplient depuis la fin du match de jeudi, c’est comme si les arbitres avaient amputé les journalistes de «leur» victoire.

Ça n’a pas de sens.

Surtout que les Bruins se sont souvent retrouvés à l’autre bout du spectre depuis le début des séries alors que des gestes douteux pour ne pas dire carrément illégaux n’ont pas été punis ou n’ont pas entraîné de mesure disciplinaire supplémentaire.

Et dans toutes ces situations, les collègues de Boston trouvaient tout à fait correct que «leurs» joueurs s’en tirent sans autres conséquences que les critiques des partisans des autres équipes.

Bozak méritait une pénalité. J’insiste encore. Mais un brin de retenue et de perspective serait le bienvenu. Du moins, il me semble.