SAN JOSE, Calif. – Voici donc les Sharks en finale d’association. En fait, on devrait écrire : revoici les Sharks en finale de l’Ouest, puisqu’ils y accèdent pour la 5e fois en 15 ans. Vous avez bien lu : 5 fois en 15 ans, ce n’est pas juste beaucoup : c’est énorme.

Bien qu’ils ne soient qu’à mi-chemin du parcours menant aux grands honneurs, il est permis de se demander si les Dieux du hockey ont décidé de finalement récompenser Joe Thornton et ses coéquipiers qui sont toujours en quête d’une première coupe Stanley.

Car en plus de former une très solide équipe de hockey, les Sharks profitent de concours de circonstances favorables ce printemps. Le genre de concours de circonstances favorables dont une équipe, aussi bonne soit-elle, a besoin pour mousser ses chances de se rendre jusqu’au précieux trophée.

Le retour en forme et en force de Joe Pavelski a donné du mordant aux Sharks. C’était évident. Sept matchs après être lourdement tombé tête première sur la patinoire où il a été inconscient quelques minutes, le capitaine a d’abord soulevé la foule qui a salué l’annonce de sa présence au sein de la formation partante. Il a ensuite soulevé son équipe en marquant le premier but. En se faisant complice du second. Et en brandissant le poing pour inciter les partisans déjà très bruyants et émotifs des Sharks à propulser leurs favoris vers la victoire.

« C’est un joueur spécial », a convenu l’entraîneur-chef Peter DeBoer.

« Après l’avoir vu étendu sur la patinoire, après l’avoir vu traverser tout ce qu’il a traversé depuis deux semaines pour se remettre de cet impact et retrouver la forme, c’était émotivement très stimulant de le revoir sur la patinoire. C’est notre leader. C’est notre meilleur joueur. Il nous a donné le surplus d’énergie dont nous avions besoin pour gagner ce match », a insisté Logan Couture qui a pris les bouchées doubles pendant l’absence de son capitaine.

Après avoir pris part à l’entraînement matinal de son équipe, lundi, à Denver, après s’être entraîné mardi et avoir chaussé les patins encore mercredi matin sans jamais ressentir de complications associées à la commotion cérébrale qu’il a subie – c’est Pavelski lui-même qui a confirmé le diagnostic –, le capitaine a demandé à son entraîneur-chef de lui refaire une place au sein de la formation.

Une demande que DeBoer aurait été fou de refuser.

MacKinnon amoché

Pendant que Pavelski moussait la confiance de son équipe, Nathan MacKinnon a partiellement éteint celle de ses coéquipiers lorsqu’il a dû retraiter au vestiaire après s’être écrasé contre la bande après une perte d’équilibre très tôt dans la rencontre.

Les visages sont devenus longs sur le banc de l’Avalanche lorsque MacKinnon, tête baissée, s’est laissé glisser vers le coin de la patinoire en suivant le thérapeute athlétique de l’équipe.

« Ça nous a frappés en plein front sur le banc. Personne ne parlait. On a tous été assommés », a admis candidement Derick Brassard croisé après la rencontre.

L’épaule amochée, sans doute sortie de son socle, MacKinnon a reçu une injection afin d’apaiser la douleur. Il a craint d’avoir à déclarer forfait, mais est revenu au jeu après une absence d’une dizaine de minutes.

Son retour au fait du bien. Mais le MacKinnon dont l’Avalanche avait besoin pour faire contrepoids au retour de Pavelski et mousser les chances de victoire dans le cadre d’un septième match qui s’annonçait déjà difficile est demeuré à l’infirmerie. Celui qui en est sorti était amoindri : incapable de disputer des mises en jeu et incapable d’être aussi incisif et imposant dans ses montées et ses assauts en direction du filet adverse.

Un hors-jeu qui a tout changé

Et il y a eu les officiels. Encore!

N’eut été de la pénalité majeure injustement décernée à Cody Eakin des Golden Knights en milieu de troisième période du septième match en première ronde, un match que les Sharks perdaient alors 3-0 est-il besoin de le rappeler, San Jose n’aurait jamais éliminé Las Vegas en première ronde.

Mercredi soir, une autre décision serrée, cette fois rendue par les responsables de la salle de contrôle à Toronto, a changé le cours du match.

Et une fois encore en faveur des Sharks.

Bien qu’ils dominaient outrageusement l’Avalanche depuis le début de la rencontre, les Sharks ne menaient que par un but lorsque Colin Wilson a nivelé les chances à la suite d’une poussée orchestrée par MacKinnon en début de période médiane.

Initialement accordé, le but a finalement été refusé en raison d’un hors-jeu très mineur, mais un hors-jeu quand même, dont s’est rendu coupable Gabriel Landeskog qui a mis une éternité pour sortir de la patinoire.

Face à son banc, donc le dos au jeu, déjà remplacé par un coéquipier, Landeskog a mis du temps à ouvrir la porte située tout juste à l’entrée de la zone ennemie. Là où Landeskog se tenait lorsque MacKinnon a fait son entrée en zone des Sharks.

Les juges de lignes n’ont rien vu. Les joueurs des deux équipes n’ont plus. De toute façon, il n’y avait pas grand-chose à voir en ce sens que des dizaines de fois par match, un joueur se traîne les pieds avant de prendre sa place au banc. Mais comme il n’est pas impliqué dans le jeu, les officiels n’en font pas de cas.

Sauf qu’hier, Dan Darrow, l’entraîneur adjoint responsable de la vidéo dans le camp des Sharks, celui qui est mandaté pour avertir l’entraîneur-chef DeBoer du bien-fondé de contester un but pour hors-jeu raté par les juges de lignes, a été le seul à remarquer le hors-jeu.

L’organisation des Sharks lui doit en partie la victoire. Car au lieu de se retrouver à égalité 2-2 dans un match qu’ils dominaient complètement, au lieu de se retrouver dans une situation où la pression aurait soudainement grimpé dans leur camp tout en fouettant les jeunes de l’Avalanche qui auraient pris confiance, les Sharks ont non seulement conservé leur avance, mais Joonas Donskoi a redonné une avance de deux buts quelques instants plus tard.

Méchant changement!

Contrairement à la décision rendue aux dépens de Eakin en première ronde, le refus du deuxième but de l’Avalanche était justifié. Landeskog avait bel et bien un patin au banc, mais l’autre sur la glace et en zone ennemie.

La LNH n’aura donc pas à offrir des excuses à l’Avalanche comme elle l’a fait à l’endroit des Golden Knights au lendemain de leur élimination.

Mais Landeskog était tellement hors d’état de nuire, qu’une telle décision tient plus de la théorie que de la pratique. Et la Ligue aurait grand intérêt à revoir le règlement, à le clarifier, à le modifier s’il le faut, car il est anormal qu’une situation aussi bénigne puisse avoir des conséquences aussi malignes.

Surtout que si Landeskog était considéré comme encore « actif » alors qu’un de ses coéquipiers l’avait remplacé depuis quelques secondes dans l’action, les arbitres auraient dû imposer une pénalité mineure aux Avs pour avoir eu trop de joueurs sur la patinoire.

Mais bon!

Landeskog a démontré son grand leadership lorsqu’il a été mitraillé de questions sur ce hors-jeu coûteux.

« J’ai plaidé ma cause avec les arbitres, je ne comprends toujours pas pourquoi ils ont annulé le but alors que je n’étais pas dans l’action. Mais à la base, c’est moi qui suis responsable. Je n’avais qu’à sortir de la patinoire plus vite au lieu de prendre mon temps comme je l’ai fait sans réaliser que je venais de coûter un but à mon équipe », a souligné le capitaine.

Buts gagnants de joueurs de soutien

Le but annulé pour un hors-jeu controversé n’a pas à lui seul conduit à l’élimination de l’Avalanche.

Ça non!

La performance de Pavelski a joué un bien plus grand rôle encore. Tout comme la blessure qui a contraint MacKinnon à jouer à 50 %, 60 %, 70 % de ses capacités. Le fait que Mikko Rantanen et Landeskog aient disputé un match très ordinaire dans des circonstances qui commandaient des performances extraordinaires n’a pas aidé non plus.

Sans oublier les arrêts aussi solides qu’importants qu’a effectués Martin Jones en fin de rencontre. Un gardien qu’on croyait démoli après des performances désolantes en début de première ronde contre Vegas. Un gardien qui semble maintenant capable de rivaliser avec tous les autres encore en lice et de donner une chance réelle à son club de se rendre jusqu’au bout.

Mais tous les impondérables qui ont très souvent un impact important sur l’issue des matchs ont encore favorisé les Sharks dans le cadre d’un septième match de séries. Le deuxième qu’ils gagnent de suite. Le huitième qu’ils remportent sur les douze qu’ils ont disputés, dont cinq qu’ils ont gagnés devant leurs partisans qui n’ont été témoins que d’un seul revers.

D’autres exemples d’impondérables positifs ou de concours de circonstances favorables?

Depuis 1997-1998, seulement quatre joueurs de soutien ont marqué des buts décisifs dans le cadre de septième match d’une série alors qu’ils ont passé moins de huit minutes sur la glace.

Deux d’entre eux sont des Sharks!

Donskoi (7:34 de temps d’utilisation) a inscrit le but décisif pour confirmer la présence des Sharks en finale de l’Ouest. Donskoi qui a raté le dernier match de la série contre Vegas et les quatre premiers de la série contre l’Avalanche en raison d’une blessure a imité Barclay Goodrow qui a joué les héros dans le septième match contre les Golden Knights alors qu’il avait marqué le but gagnant, en prolongation, bien qu’il avait passé la majeure partie du match cloué au banc comme le confirme son utilisation de 7:26.

Et il y a la foule. Les partisans des Sharks sont parmi les plus fervents de la LNH. Ils l’ont démontré encore hier.

Même que DeBoer a indiqué que son équipe qui donnait des signes de fatigue en troisième période aurait sans doute perdu la rencontre si elle avait été disputée à Denver.

« On se bat toute la saison pour s’offrir l’avantage de la patinoire en séries. Ce soir ça nous a grandement aidés parce que nos partisans ont su nous énergiser en fin de rencontre », a lancé l’entraîneur des Sharks.

Je veux bien que les partisans des Sharks aient aidé la cause de leurs favoris. Mais le facteur le plus important associé au fait que les Sharks jouait au SAP Center et non au Pepsi Center, n’était pas la foule bruyante. C’était bien plus le fait que les vieux joueurs des Sharks évoluaient au niveau de la mer où l’oxygène est plus abondant qu’à Denver où il se fait plus rare en raison de l’altitude.

Vraiment, quand les astres s’alignent comme ils le font depuis le début des séries pour guider les Sharks vers des victoires lors des matchs sans lendemain, il est permis de se demander si les Dieux du hockey ont finalement décidé de favoriser San Jose.

Avec tout ce qu’ils leur ont fait endurer au fil des années, remarquez qu’il serait peut-être temps!