MONTRÉAL – William Dufour disposait de 10 matchs. Un mois pour atterrir sur ses pieds et faire bonne impression, après quoi les entraîneurs des Voltigeurs de Drummondville lui formuleraient quelques recommandations.

 

Tout ce que demandait Steve Hartley à l’attaquant acquis des Saguenéens de Chicoutimi en retour de Dawson Mercer à la période des fêtes, c’était de travailler. Rien de plus. Ses qualités allaient prendre le dessus, espérait-il.

 

« Des gars comme lui, ça ne court pas les rues », expose l’entraîneur-chef.

 

« C’est une force de la nature. C’est un gros bonhomme, un gars fait sur mesure pour jouer chez les pros juste par son gabarit, son tir et ses habiletés individuelles. Il n’a pas peur d’aller jouer dans le trafic. C’est vraiment le prototype de l’attaquant de puissance », développe Hartley.

 

À Drummondville, l’ancien choix de premier tour des Huskies de Rouyn-Noranda en 2018 (6e) obtenait l’occasion de prendre son envol dans un rôle offensif de premier plan.

 

« Je pensais arriver là et avoir une excellente fin de saison, mais au début, ça n’allait vraiment pas comme c’était supposé aller. »

 

L’imposant ailier droit de 6 pi 2 po et 198 lb tardait à affermir son autorité sur les défenses adverses. Son jeu, trop en périphérie au goût de son entraîneur, n’apportait pas les résultats escomptés, si bien qu’après 10 rencontres, Dufour ne revendiquait que 3 buts et 2 passes.

 

L’heure était aux recommandations.

 

L’électrochoc

 

Denis Gauthier n’est pas là pour faire de la discipline. Si l’ancien défenseur de la LNH gravite dans l’entourage des Voltigeurs, c’est avant tout pour s’offrir en soutien aux entraîneurs et aux joueurs en partageant ses expériences.

 

« Je ne suis pas là pour les chicaner quand ça va mal, sauf qu’une fois de temps en temps, entendre une nouvelle voix ça peut faire du bien. Ça peut saisir. »

 

Avec l’accord du personnel d’entraîneurs, c’était l’électrochoc qu’il proposait d’administrer à Dufour.

 

« J’ai été poli, mais il fallait lui dire ses quatre vérités », résume l’analyste de RDS.

 

« Il y en a parfois qui se voient meilleurs qu’ils le sont vraiment et probablement qu’il rentrait dans [cette catégorie-là], cerne-t-il. Ça prenait peut-être juste quelqu’un pour lui faire réaliser qu’il n’était pas aussi bon qu’il le pensait à ce moment-là. Il avait le talent, mais il ne performait pas au maximum de son potentiel. »

 

Dufour ne s’en cache pas, le coup n’a pas été facile à encaisser.

 

« Dur, c’est le mot à employer, concède-t-il. Denis n’a pas été méchant, mais il m’a dit de A à Z ce qu’il fallait que j’améliore. »

 

« Il y en a qui auraient peut-être pu s’écrouler ou bouder dans leur coin en se disant qu’ils ne méritaient pas de se faire parler de même. Mais à son crédit, le kid s’est retroussé les manches et il a travaillé », souligne Gauthier.

 

L’impact de cet implacable état de fait a été presque instantané. Dans les 18 rencontres qui ont suivi, Dufour a ajouté 15 buts et 13 passes à son dossier, amassant notamment au moins un point dans 14 matchs de suite. Lorsque la COVID-19 a abruptement mis un terme à sa saison, le hockeyeur originaire de Québec venait d’inscrire deux tours du chapeau de suite.

 

« J’étais ouvert d’esprit et j’ai écouté ce qu’ils avaient à dire sur moi. Ç’a juste très bien fonctionné après. »

 

« J’ai vraiment apprécié le diriger, surtout lors de ses 15 derniers matchs, apprécie de son côté Hartley. C’était le jour et la nuit comparativement à ses dix premiers matchs. Il était plus impliqué. »

 

En à peine 28 matchs avec les Voltigeurs, Dufour a affiché une récolte de points (33) supérieure à celle (22) de ces 31 premières rencontres de la campagne avec les Saguenéens et à celle (21) de sa saison précédente partagée entre Rouyn-Noranda et Chicoutimi.

 

« Il a changé l’opinion que bien des gens avaient de lui en peu de temps, estime Gauthier.  Ç’a parti d’une certaine façon, mais là les dépisteurs se demandent c’est qui le vrai William Dufour? Celui qu’on voyait avant ou celui qu’on a vu en fin de saison? »

 

« C’est un gros attaquant capable de marquer des buts. Ça, c’est tout le temps intéressant », corrobore un éclaireur de la LNH consulté par le RDS.ca, avant d’émettre une réserve partagée par plusieurs de ses confrères.

 

« Il faudra qu’il commence à jouer comme un gars de 6 pi 2 po. Il est gros, il faut qu’il utilise cette charpente-là. S’il peut prendre confiance en ce qu’il a, je pense qu’il peut être un bon choix. »

 

Ce réveil tardif de Dufour se reflète d’ailleurs dans le dernier rapport de la Centrale de recrutement de la LNH, qui le répertorie au 69e rang des meilleurs patineurs nord-américains, une progression de 30 échelons par rapport à son classement de mi-saison.

 

« C’est le genre de gars où en 5e ou 6e ronde tu te dis coudonc, on prend une chance à condition qu’on soit certain qu’il veuille y mettre du temps », spécule un autre recruteur.

 

Là réside le principal défi auquel est confronté Dufour. Il a tout pour réussir et tout dépend maintenant de lui.

 

« S’il fait tout en son pouvoir pour se développer, qu’il fait les choses correctement et qu’il marche droit, c’est un gars qui a un gros potentiel et qui a les outils pour jouer professionnel; Ligue américaine et plus, projette Gauthier. C’est à lui maintenant de s’assurer qu’il a le coffre pour tous ces outils-là. »​