BUFFALO – La question est revenue en boucle, une question qu’assurément aucun autre joueur présent au camp d’évaluation des meilleurs espoirs de la Ligue nationale de hockey ne s’est fait poser.  

Pourquoi n’étais-tu pas ici il y a deux ans?

Chaque fois, Brett Leason exposait sa théorie, expliquait pourquoi, selon lui, aucune équipe n’avait démontré le moindre intérêt pour ses services la première fois qu’il est arrivé sur le marché.

« Je n’ai pas fait grand-chose cette année-là. Tri-City avait une équipe plus vieille avec un groupe d’attaquants expérimentés. Je n’ai jamais vraiment eu la chance de montrer ce que je pouvais faire. »

Même s’il n’avait amassé que 18 points en 68 matchs, Leason avait été remarqué par la Centrale de recrutement de la LNH après sa saison recrue dans la Ligue junior de l’Ouest (WHL). Non sans un brin de fierté, Dan Marr souligne qu’il avait vu les signes prometteurs bien avant que les habiletés du grand attaquant ne fassent consensus.

 « Chaque fois qu’il était sur la glace, il faisait un jeu, se souvient le directeur de la Centrale, qui avait à l’époque classé Leason au 133e sur sa liste finale des meilleurs espoirs nord-américains. C’était un gros bonhomme avec de bonnes mains qui, évidemment, devait améliorer son coup de patin et sa force physique. »

Leason n’avait récolté qu’un point en douze matchs l’année suivante quand les Americans l’ont échangé aux Raiders de Prince Albert en retour d’un choix de troisième ronde. Le changement de décor a eu un certain effet – il a atteint des sommets personnels avec 15 buts et 32 points en 54 matchs – mais une série de blessures l’a tout de même empêché de répondre aux attentes. Encore une fois, aucune équipe de la LNH n’a voulu prendre de chance sur son cas. 

Après deux saisons dans le junior majeur, le colosse de Calgary était vu comme une énigme pour les uns, un échec pour les autres.

Le 9 décembre 2018, Leason a été tenu en échec dans une défaite de 1-0 contre les Blades de Saskatoon. À ce moment, les doutes à son sujet avaient depuis longtemps été dissipés. Il s’agissait du 31e match de son équipe et du premier dans lequel il était blanchi de la feuille de pointage. Il avait 64 points à sa fiche. Le lendemain, il quittait pour le camp de sélection d’Équipe Canada junior.

L’entraîneur d’ÉCJ, Tim Hunter, connaissait bien Leason. L’année précédente, ses Warriors de Moose Jaw avaient éliminé Prince Albert au premier tour des séries de la WHL.

« C’est un Brett Leason différent de l’an passé, a fait remarquer Hunter dans une entrevue accordée à TSN à l’ouverture du camp de l’équipe nationale. Il était gros, il patinait bien et maniait bien la rondelle, mais il n’avait pas cette deuxième vitesse dans ses déplacements et sa confiance n’était pas au même niveau. Son patin a pris une coche durant l’été. On peut voir qu’il a énormément travaillé là-dessus. »

Leason a fait sa place au sein d’ÉCJ, avec qui il a récolté cinq points en cinq matchs avant de retourner à ses moutons à Prince Albert. Il a ajouté 25 points à sa fiche pour finir au huitième rang du classement des compteurs de la Ligue, puis a maintenu le même rythme pendant 22 matchs de séries.

« L’autre soir, il a obtenu quatre ou cinq bonnes chances de marquer, faisait remarquer Dan Marr après un match des Raiders au tournoi de la Coupe Memorial. Il lit bien le jeu et il sait où se placer pour être dangereux. S’il veut un jour toucher le gros lot dans la LNH, il devra apprendre à produire de façon constante. L’équipe qui le choisira devra travailler avec lui en ce sens, mais je suis confiant qu’il y arrivera. »

À 20 ans, Leason est le doyen de la cuvée 2019 du repêchage de la LNH. Quand ils le compareront aux jeunes de 17 et 18 ans de sa cohorte, certains évaluateurs verront en lui un athlète mûr et donc un projet moins risqué. D’autres considéreront son âge comme un avantage justifiant sa progression subite et qui s’effacera une fois rendu chez les pros.

Le principal intéressé se range sans réserve dans la première catégorie. L’ailier de 6 pieds 4 pouces et 210 livres croit fermement que la maturité physique et mentale que les deux dernières années lui ont permis d’acquérir lui permettra d’atteindre la LNH sans escale dès la saison prochaine.

« C’est mon but et je crois qu’il y a de fortes chances que ça arrive », déclare-t-il avec assurance.

La majorité des experts voient Leason trouver preneur vers la fin de la première ronde. La Centrale de recrutement de la LNH, qui l’a fait glisser du 17e au 25e rang en Amérique du Nord lors de son recensement final, est plus conservatrice.

« Je ne sais pas s’il sortira en première ronde, mais je crois qu’il a une bonne chance d’être pris en deuxième, estime Marr. Pour un directeur général qui veut ajouter du caractère à son organisation, voilà un jeune qui a déjà tous les atouts physiques pour réussir et qui a simplement besoin d’un peu de polissage. C’est un investissement qui en vaut la peine. »