Quels sont vos classiques printaniers favoris? Depuis le début de la semaine, RDS revisite des moments marquants de l'histoire récente des séries éliminatoires de la LNH. Aujourd'hui, le parcours magique de Martin Gélinas.

 

MONTRÉAL – Des 21 joueurs qui ont été sélectionnés en première ronde du repêchage de 1988, Martin Gélinas est l’un des sept à avoir disputé plus de 1000 matchs de saison régulière dans la Ligue nationale. Mais au-delà de ce plateau déjà fort impressionnant, ce sont ses accomplissements en séries éliminatoires qui frappent l’imaginaire.

 

La liste des réalisations printanières de Gélinas au fil de ses 18 saisons dans la LNH se lit  comme le résumé d’une carrière parallèle. Si les milléniaux ont surtout été marqués par sa létale efficacité dans le parcours des Flames de Calgary en 2004, les plus vieux se rappellent avec nostalgie son entrée fracassante au sein de la « Kid Line » des Oilers d’Edmonton. Sur l’itinéraire tracé par ces points de départ et d’arrivée, Gélinas a joué un total de 147 parties en séries, atteignant la finale de la coupe Stanley avec quatre équipes différentes.

 

Aujourd’hui entraîneur-adjoint chez les Flames, celui qui fêtera ses 50 ans en juin a accepté de nous accompagner dans le récit de sa première vie professionnelle.

 

Une Coupe à 19 ans

 

Gélinas s’était promené d’un trio à l’autre à sa première saison complète avec les Oilers. Et puis on dit « complète », mais l’adjectif vient avec un bémol. « Je n’avais pas joué tous les matchs cette année-là, juste la moitié à peu près », précise l’ancien ailier gauche, qui avait fait le saut dans la LNH après un passage de deux ans chez les Olympiques de Hull.

 

La recrue n’avait pas plus de poste fixe quand les séries du printemps 1990 se sont amorcées. Gélinas a joué le premier match contre les Jets de Winnipeg, mais son différentiel de -2 dans une défaite de 7-5 lui a valu d’être laissé de côté pour les deux matchs suivants. Sauf que les choses ne se sont pas arrangées pour les Oilers qui, une semaine plus tard, faisaient face à l’élimination.

 

Martin Gélinas avec la Kid Line

« On manquait un peu de jus, alors John Muckler a décidé de me mettre avec Joe Murphy et Adam Graves. Tout de suite, quand on a commencé à jouer ensemble, on a vu qu’il y avait quelque chose qui se passait. On s’entendait bien, mais ce qu’on amenait sur la patinoire, c’était vraiment de l’énergie », se remémore Gélinas.

 

Graves, qui a terminé sa carrière avec plus de 1200 minutes de pénalité, était déjà reconnu pour son affection du jeu robuste. Murphy, le tout premier choix du repêchage de 1986, était le plus doué de la bande. Entouré de ces deux coéquipiers de trois ans son aîné, le jeune Québécois s’est trouvé une vocation.

 

« On finissait nos mises en échec, on patinait, on était vraiment dans leur face. Mais on était aussi capable de contribuer offensivement », note-t-il.

 

Dans le premier match de la série de deuxième ronde, contre les Kings de Los Angeles, chacun des membres du trio a participé avec un but et une aide. Deux jours plus tard, Gélinas marquait un deuxième but en autant de matchs contre l’équipe qui l’avait échangé pour obtenir Wayne Gretzky. Avant longtemps, le «buzz » qui entourait ces jeunes qui complétaient le solide noyau de l’équipe a inspiré un journaliste local. Quand les Oilers ont finalement soulevé la Coupe après avoir éliminé successivement les Kings, les Blackhawks et les Bruins, ceux qu’on avait identifiés comme les membres de la « Kid Line » avaient amassé un total de 30 points.  

 

« J’étais entouré de tellement de bons joueurs, c’était une belle année pour un gars de 19 ans. On n’était pas les favoris pour tout gagner, mais après l’échange de Gretzky, les gars dans la chambre voulaient vraiment prouver que ce n’était pas juste un gars qui faisait l’équipe. »

 

Une chance tombée du ciel

 

La « Kid Line » fut rapidement fragmentée. Un an après la conquête, Graves a signé un contrat comme joueur autonome avec les Rangers de New York. En 1993, Murphy a été échangé à Chicago et Gélinas aux Nordiques de Québec.

 

Le petit gars de Shawinigan n’est pas resté longtemps au bercail. Le courant ne passait pas avec l’entraîneur Pierre Pagé et après seulement 31 matchs, son nom a été inscrit au ballottage. « C’est probablement le moment dans ma carrière où ma confiance était à son plus bas. J’espérais que quelqu’un me réclame, mais je ne savais pas ce qui m’attendait. »

 

2004 : but gagnant de Martin Gélinas contre les Sharks

Pat Quinn a offert à Gélinas le plus beau des cadeaux. L’entraîneur et directeur général des Canucks de Vancouver l’a ajouté à son effectif et lui a permis de se refaire une santé mentale en l’unissant à Pavel Bure et Trevor Linden. Puis, une fois les séries arrivées, Gélinas s’est retrouvé sur un trio avec Cliff Ronning et Sergio Momesso.

 

« Personne ne s’attendait à ce qu’on se rende très loin », se souvient Gélinas. En première ronde, les Canucks ont été confrontés à un déficit de 1-3 contre les Flames avant de remporter la série en sept matchs. Gélinas a inscrit son premier but gagnant en séries au tour suivant contre les Stars de Dallas, qui ont été éliminés en cinq, tout comme les Maple Leafs de Toronto en finale de l’Ouest.

 

Dans le premier match de la finale, remporté par les Canucks en prolongation, Gélinas a marqué le but égalisateur avec une minute à jouer à la troisième période. La petite équipe canadienne a réussi à pousser les riches Rangers à un septième match, mais n’a ultimement pu contrarier la logique.

 

Le bon Dieu en haut

 

Ça n’allait pas être la dernière fois que Gélinas incarnerait le rôle de l’étonnant négligé. En 2002, il s’est frayé un chemin jusqu’en finale avec les Hurricanes de la Caroline, une épopée qui lui avait permis de vivre sa première série contre le Canadien de Montréal. Les Canes avaient dû exécuter une remontée épique dans le quatrième match de la série, au Centre Molson, afin de renverser la vapeur et poursuivre leur route.

 

« Ça a été un autre parcours fantastique. On avait des bons joueurs, mais on avait surtout une équipe qui travaillait très, très fort. C’est certain qu’en finale contre Detroit, on n’avait pas beaucoup de chance. »

 

Martin Gélinas se voit refuser un but contre TB

La fin de l’histoire rase la perfection. Deux ans plus tard, Gélinas a participé à ses dernières séries dans la LNH avec les Flames. Les trois premières têtes de série dans l’Ouest sont passées par Calgary cette année-là et chacune a été envoyée en vacances par un but décisif de Gélinas.

 

Le 5 juin, jour de son 34e anniversaire, Gélinas a cru marquer le but qui donnait l’avance aux Flames dans les dernières minutes du sixième match de la finale contre le Lightning de Tampa Bay. Les officiels n’ont toutefois pas jugé que la reprise vidéo permettait de déterminer avec certitude que la rondelle qui avait dévié sur son patin avait complètement franchi la ligne rouge avant d’être repoussée par la jambière de NikolaÏ Khabibulin. Les Flames ne s’en sont jamais remis, mais Gélinas oui.

 

« Le lock-out avait frappé l’année suivante et au retour de la pause, la technologie avait changé, se souvient-il. La Ligue nationale a ajouté des angles de caméra différents. J’étais allé à  Toronto et je leur avais demandé. Là-bas, ils pensaient encore que la bonne décision avait été prise. Moi, de la manière que j’étais placé, directement à côté, ça avait l’air que la rondelle avait rentré. Mais je ne suis pas amer. Le bon Dieu en haut a dit que ce n’était pas notre temps. »

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