BUFFALO – Par respect pour leurs pairs, les entraîneurs sont souvent hésitants à commenter le travail d’un joueur d’une équipe adverse. André Tourigny ne se formalise pas de ce genre de détail. Pas si le joueur concerné est Andrei Svechnikov, en tout cas.

« Ça ne me dérange pas de t’en parler. De toute façon, c’est sûr qu’il ne jouera pas dans l’OHL l’année prochaine », a prédit Tourigny lorsque RDS a sollicité son opinion au sujet de celui qui sera probablement le premier attaquant sélectionné vendredi en première ronde du repêchage de la Ligue nationale.

Tourigny, qui vient de terminer sa première saison à la barre des 67’s d’Ottawa, n’a pas tardé à faire connaissance avec la plus populaire recrue de la Ligue de l’Ontario. Son tout premier match aux commandes de sa nouvelle équipe l’opposait aux Colts de Barrie, qui avaient repêché Svechnikov avec le premier choix de l’encan européen de la LCH. À son baptême du hockey junior, le  Russe a marqué deux buts dans un massacre de 11-2.

« Je l’avais vu aux moins de 18 ans quand il était underage et encore une fois l’année dernière. Je le connaissais déjà, j’avais une bonne idée à quoi m’attendre. Il était encore meilleur que je pensais, par contre. Il était encore plus fluide. Il était gros, il était fort, il était vite. Honnêtement, je suis un gros fan. »

En raison des blessures qu’il a subies en cours de route, Svechnikov n’a plus été dans les pattes des 67’s avant la dernière semaine de la saison régulière. Il n’a récolté qu’une mention d’aide à cette occasion, mais six mois après leur première rencontre, Tourigny a néanmoins remarqué un jeune joueur amélioré.

« Au début de l’année, on voyait qu’il était bon, mais il faisait des jeux à haut risque. À la fin de l’année, ses prises de décisions étaient meilleures. Il est très efficace, très difficile à contrer. C’est le genre de gars, si tu lui ouvres un trou, il va le prendre. Il va tirer, il va passer... Il a des yeux tout le tour de la tête. »

Entre ses deux matchs contre Ottawa, Svechnikov a gardé la pédale au plancher. Il a terminé la saison régulière avec 40 buts, dont seulement neuf en avantage numérique, en 44 matchs. Parmi tous ceux qui ont marqué au moins 30 buts cette année dans l’OHL, seuls Boris Katchouk (0,72 but/match), Owen Tippett (0,70) et Jordan Kyrou (0,69) se sont approchés de son rythme de production. Deux d’entre eux étaient des vétérans de 19 ans appartenant déjà à des équipes de la LNH. L’autre était un joueur de 18 ans repêché au dixième rang par les Panthers de la Floride en juin dernier.

« Même en le comparant aux plus vieux, il était dominant, atteste Tourigny. On dirait que certains ne veulent pas voir ses statistiques. À un moment donné, j’entendais le monde dire ‘Si tu veux un marqueur, tu prends Zadina...’ Je vais te dire de quoi, regarde le nombre de goals que Svechnikov a scoré! »

La touche de Bure, le cœur de Radu

Un dépisteur d’une équipe de la LNH sondé par RDS abonde dans le même sens que Tourigny.

« C’est un power forward qui marque des buts. Il est très fort sur la rondelle et possède beaucoup d’habiletés pour créer des jeux dans le bas de la zone. Patineur puissant, bonne accélération. Tu sais, il est dominant. Quand il voit une opportunité, il va lire le jeu, il va couper une passe. Il a l’air d’un gars qui a faim pour faire des points, mais il réussit quand même à se démarquer quand il n’en inscrit pas. »

Notre espion soulève une mince crainte, celle de voir Svechnikov opter pour une carrière dans sa Russie natale, mais ce scénario semble improbable. L’ancien académicien du Ak Bars Kazan a pris la décision de poursuivre son développement en Amérique du Nord il y a quatre ans, quand son frère Evgeny, un éventuel choix de première ronde des Red Wings de Detroit, a traversé l’océan pour venir jouer avec les Screaming Eagles du Cap-Breton. Le cadet des Svechnikov a joué une saison en USHL, un circuit junior américain, avant de traverser au nord de la frontière.

« Je voulais me familiariser avec le style nord-américain. C’était le plan depuis le début, de me développer pour être prêt pour la LNH », a-t-il spécifié lors de la semaine d’évaluation des espoirs qui s’est tenue au début du mois à Buffalo. Il y était accompagné d’une traductrice, mais a osé quelques réponses dans un anglais suffisamment bon pour rassurer quiconque douterait de sa volonté à s’adapter aux coutumes du continent.

 « Je n’ai jamais rencontré son entraîneur, mais tous ceux à qui j’ai parlé n’avaient que de bons mots à dire au sujet de son attitude. Ça semble être un gars un peu comme celui que vous aviez l’année passée à Montréal, celui qui est parti à Dallas, compare notre recruteur en faisant allusion à Alexander Radulov. Il possède ce style de leadership. C’est un gars qui veut gagner. »
 
« J’aime aussi le jeu robuste et je suis toujours volontaire pour jouer en désavantage numérique », précise lui-même Svechnikov quand on lui demande les atouts pour lesquels il aimerait être reconnu, outre sa facilité à marquer des buts.  
 
La fougue de Radu, donc, avec la touche de marqueur de son idole de jeunesse, Pavel Bure.
 
« Il serait un premier choix si ce n’était pas de Rasmus Dahlin, je te le dis, insiste André Tourigny. Il est vraiment bon. »

Top-5 Andrei Svechnikov