Passer au contenu principal

RÉSULTATS

Expansion de la LPHF : des émotions partagées dans le vestiaire de la Victoire

Publié
Mise à jour

MONTRÉAL – La ville de Montréal occupe une place importante dans le cœur d'Erin Ambrose.

En 2017, l'Ontarienne s'y est réfugiée après avoir été libérée du camp de sélection de l'équipe canadienne en vue des Jeux olympiques de PyeongChang. C'est une époque de sa vie où elle broyait du noir, où ses problèmes de santé mentale lui faisaient de l'ombre.

« Si je n'étais pas venue à Montréal, je ne sais pas où je serais aujourd'hui », nous disait-elle en entrevue l'année dernière.

Ceux qui connaissent cette partie de son histoire n'ont pas été surpris de voir Ambrose retenir ses larmes mardi alors que les joueuses de la Victoire défilaient devant leur casier pour une dernière fois avant de partir officiellement en vacances.

Dans n'importe quelle circonstance, certaines auraient quitté le vestiaire en se disant qu'elles n'y seraient peut-être jamais de retour. C'est la réalité du sport professionnel. Mais cet entre-saison sera différent. La LPHF ajoutera deux équipes à sa structure durant l'été. Un impitoyable processus d'expansion, dont les détails ont été révélés lundi, grugera le noyau dur de chacune des six formations originales du circuit.

La Victoire perdra de gros morceaux. En supposant que Marie-Philip Poulin, Laura Stacey et Ann-Renée Desbiens seront les trois joueuses mises à l'abri, Ambrose deviendrait une cible attrayante pour une concession naissante. Elle ne s'en cache pas : l'idée ne lui plaît pas.

« Plus que toute autre chose, je suis anxieuse à l'idée de ne plus être à Montréal, de ne plus faire partie de la Victoire. C'est quelque chose qui signifie beaucoup pour moi. Je repense au repêchage, à quel point mon stress s'est transformé en soulagement quand j'ai su que je reviendrais ici. Présentement, c'est le retour de l'inconnu et de l'anxiété qui vient avec. »

Ambrose était toutefois en mesure de mettre sa situation personnelle de côté pour apprécier le pas vers l'avant que prendra la LPHF en s'implantant dans l'ouest du continent. « Ça veut dire que notre ligue fait bien les choses, qu'on prend de plus en plus de place », se consolait-elle.

Toutes ses coéquipières ont prononcé une variation de ce discours. Elles ont parlé des nouvelles joueuses qui profiteront de l'ajout de deux franchises et des nouveaux partisans qui embarqueront dans le train du hockey féminin. La directrice générale Danièle Sauvageau, malgré les maux de tête que lui donneront la réorganisation de son effectif, est celle qui a abordé le sujet avec le plus d'enthousiasme.

« C'est difficile, mais pas problématique. Ce sont quand même des emplois que la ligue crée pour plus de joueuses. Et ça, jamais vous n'allez m'entendre parler contre ça parce que ça fait des zillions d'années qu'on essaie justement d'offrir des emplois à des joueuses et à des gens qui travaillent dans le hockey féminin. »

Des heureuses

Toutes ne voyaient pas l'expansion imminente comme une fatalité.

La gardienne Ann-Renée Desbiens a exprimé clairement son souhait de rester à Montréal, mais la possibilité de déménager ses jambières ne la traumatisait pas outre mesure.

« J'ai toujours rêvé de jouer au hockey professionnel et ça vient avec le territoire, interprète froidement Desbiens. Si je dois faire ma valise pour aller quelque part, ça va me faire plaisir de la faire et d'aller jouer dans un autre marché. C'est ce qu'on voulait. On voulait une ligue qui nous traite de cette façon-là. Oui, j'aurais aimé qu'on puisse protéger plus de joueuses. J'adore mon équipe ici, on a connu une saison exceptionnelle. Par contre, c'est la réalité de ce qui nous a été imposé. Peu importe les scénarios qui arrivent pour moi ou mes coéquipières, ça va me faire plaisir de continuer de représenter la ligue et de faire grandir le hockey féminin. »

Cayla Barnes, qui a grandi en Californie, rêvait presque éveillée en envisageant la possibilité d'aller poursuivre sa carrière sur la côte ouest.

« Il n'y a pas de hockey féminin présentement là-bas, même pas au niveau universitaire, alors c'est une grosse étape de pouvoir y implanter le sport en amenant un circuit professionnel. Ça serait une occasion fantastique pour moi », a dit Barnes avec beaucoup de transparence.

Puis il y a les joueuses comme Gabrielle David, qui font partie de la LPHF depuis ses débuts mais qui peinent à y faire leur niche. Après s'être contentée d'un rôle de réserviste au terme du camp d'entraînement, David n'a pris part qu'à trois matchs cette saison. Elle avait pourtant récolté six points en 23 parties lors de la saison inaugurale de la ligue.

« C'est l'inconnu, on ne sait pas ce qui va arriver concrètement, mais personnellement je suis contente qu'il y ait une nouvelle opportunité pour d'autres joueuses de se démarquer et de pouvoir être dans la ligue », n'a pas caché la Drummondvilloise.  

Même si elle ne l'a pas eu facile cette année, David serait ouverte à un retour à Montréal. « Ma maison est ici. Si on m'offre une place, c'est sûr que je la prendrais. Mais si l'opportunité n'est pas là, c'est sûr que ça ne me dérangerait pas d'aller jouer ailleurs », envisage-t-elle.

Peu importe où elle aboutit, elle y retrouvera sans doute des visages familiers. C'est précisément cette pensée qui aide Ambrose, dans les moments plus difficiles, à accepter le sort qui pourrait être le sien.

« Faire partie de la Victoire a été un immense honneur, s'émouvait l'internationale canadienne. Je dis ça en ne sachant toujours pas si ce chapitre est complètement fermé pour moi, mais je suis arrivée à Montréal pour me réparer en tant qu'être humain et j'ai fini par en faire mon chez-moi. Cette ville m'apporte de la joie et il y a tant de personnes dans ce vestiaire qui resteront mes amies pour la vie. C'est ce qui me fait dire que même si ce qui s'en vient est décevant, je suis chanceuse de pratiquer ce sport et d'avoir fait partie de ce groupe. »