OSTRAVA, République tchèque – Tire-toi une bûche, Akil Thomas. La pièce est bondée, c’est vrai, mais tu y seras en sacré bonne compagnie.

Thomas est devenu dimanche le plus récent héros de la petite histoire d’Équipe Canada. Son but, inscrit avec 3:58 à faire à la troisième période, l’a placé à la suite des Tyler Steenbergen, Jordan Eberle et autres Jonathan Toews en procurant à la sélection canadienne une victoire de 4-3 sur la Russie en finale du Mondial junior 2020.

Le but de Thomas, un membre du quatrième trio qui n’avait même pas passé quatre minutes sur la patinoire après les deux premières périodes, a mis un point d’exclamation à une spectaculaire remontée du Canada, qui tirait de l’arrière 3-1 avec onze minutes et des poussières à écouler au cadran.

Parmi les joueurs qui n’ont été ni blessés ni suspendus, Thomas a été le deuxième attaquant le moins utilisé par l’entraîneur-chef Dale Hunter sur la durée du tournoi. Mais un petit je-ne-sais-quoi qu’il n’arrive pas à décrire lui a donné l’impression, dès le réveil, que cette journée serait sienne.

« Je suis habituellement super nerveux avant un match, ce n’est pas rare que je vomisse. Mais aujourd’hui, je me sentais cool. Je n’ai même pas eu besoin de sieste. Je sentais que mon tour s’en venait. En troisième période, il commençait à rester de moins en moins de temps au tableau et j’avais l’étrange impression que Dale allait m’envoyer sur la glace. Heureusement, il l’a fait. »

« Je cherchais une étincelle et je l’ai vu marquer tellement souvent dans notre ligue, raisonnait Hunter pour expliquer sa décision. Il a de superbes mains et un instinct naturel autour du filet. Mon petit doigt m’a dit de lui donner sa chance. »  

L’intuition du coach ne l’a pas trahi. Synchronisant sa descente vers la zone adverse avec une longue passe en sortie de zone de Calen Addison, Thomas a récupéré la déviation de Connor McMichael à la ligne bleue adverse, a battu un défenseur de vitesse et s’est présenté seul devant le gardien Amir Miftakhov. Ce dernier a hésité avant de tenter un harponnage, mais Thomas l’a devancé et, en chutant, a placé un tir du revers dans les cordages.

Le but a immédiatement ramené au goût du jour celui de Steenbergen, qui avait deux ans plus tôt marqué un but en or contre la Suède alors qu’il avait été le 13e attaquant de Dominique Ducharme pour la majorité du tournoi.

Thomas, comme si son histoire n’était pas déjà assez invraisemblable, avait assisté à ce match dans les gradins du  KeyBank Center de Buffalo.

« Je me rappelle avoir dit à mes amis, à la blague, que c’était moi qui allais marquer un but comme celui-là un jour. J’implorais sans le savoir les Dieux du hockey, j’imagine. C’est drôle la vie des fois. »

« C’est exactement ça, a agréé l’entraîneur-adjoint André Tourigny lorsque la comparaison lui a été présentée. Killer jouait plus qu’un treizième attaquant, mais si vous aviez fait un pool, si t’avais le premier choix, t’as pas pris Killer, c’est sûr. »

Hayton avec un bras

Barrett Hayton avait le bras gauche en écharpe, dimanche midi, en rentrant à l’hôtel où logeait Équipe Canada à Ostrava. La veille, le capitaine d’ÉCJ était rentré au banc en douleur, son épaule gauche amochée dans un bête contact avec la bande. La version officielle, à ce moment précis, était qu’une décision sur sa participation à la finale serait prise avant le match.

Le Canada a encore trouvé une façon de triompher

Hayton a admis avoir douté jusqu’à la dernière minute de sa capacité à en prendre une pour l’équipe, mais il a finalement pris part à la période d’échauffement et quand Alexis Lafrenière et Dylan Cozens ont sauté par-dessus la bande pour leur première présence, le numéro 27 a suivi.

« Je pensais qu’il essayerait de jouer, mais je ne pensais pas qu’il serait capable de le faire, a admis Thomas. Ça ne regardait pas bien. »

Hayton est entré dans le match prudemment, mais les signes de son malaise sont devenus plus difficiles à déceler à mesure que la soirée prenait de l’âge. Tard en troisième, le Canada venait de réduire l’avance des Russes de moitié quand l’espoir des Coyotes de l’Arizona, posté en haut du cercle de mise en jeu lors d’un avantage numérique, a créé l’égalité avec le genre de tir qu’on ne devrait pas décocher avec un seul bras opérationnel.

« J’ai assurément senti un petit quelque chose, mais j’ai absolument tout mis dans ce lancer », a dit Hayton, qui a fini au deuxième rang du classement des compteurs avec douze points.

« C’est un guerrier et c’est pour ça qu’il était notre capitaine, a dit Hunter, admiratif. Il tenait absolument à jouer et ce tir... eh bien c’était tout un tir! Dans les circonstances qu’on connaît, c’est un moment spécial qu’il nous a fait vivre. Il a montré le chemin à cette équipe, il a été un vrai battant et cette attitude résume bien l’identité que cette équipe a su se donner. »

« Ce qui est le plus impressionnant, c’est que rien n’a jamais semblé nous déranger, a conclu André Tourigny. Lafrenière se blesse, on n’a pas senti de panique. Des gars ont été malades, Bowen Byram a manqué un match, Cozens et McMichael n’ont pas été capables de finir le dernier match. Et ce qui résume tout ça, c’est la performance de Barrett aujourd’hui. On lui a donné toutes les opportunités possibles de ne pas jouer. Il voulait jouer. C’était ça notre équipe cette année. »

Le Canada a remporté l’or pour la deuxième fois en trois ans, un an après avoir dû se contenter d’une décevante sixième place à Vancouver. Les nouveaux champions ont maintenant remporté cinq de leurs six derniers duels en finale contre la Russie.  

Médaille d’or au cou, Hayton a été appelé au centre de la glace pour recevoir le trophée remis à l’équipe championne. Même avec un bras, il n’était pas question que cette beauté ne se retrouve pas le plus haut possible au-dessus de sa tête.    

« Ce truc était léger comme une plume. C’était le meilleur feeling au monde. »

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