MONTRÉAL – Après avoir goûté à la Ligue nationale pour la première fois de sa carrière l’été dernier, à l’âge de 28 ans, Alex Belzile serait pardonné s’il souffrait d’une légère baisse de motivation à l’amorce du camp d’entraînement du Rocket de Laval.

Belzile a disputé six matchs avec le Canadien lors du parcours éliminatoire de l’équipe en août. Il avait même récolté son premier point dans la grande ligue, une mention d’aide sur un but de Joel Armia dans une victoire de 5-0 contre les Flyers de Philadelphie.  

Six mois plus tard, il est l’une des principales victimes collatérales des gestes posés par le directeur général Marc Bergevin pour ajouter de la profondeur à son effectif. Maintenant que le Canadien a le luxe de pouvoir placer Artturi Lehkonen et Paul Byron sur un quatrième trio et de compter sur des vétérans comme Corey Perry et Michael Frolik dans les gradins, la fierté de St-Éloi est de retour dans la Ligue américaine, dans laquelle il compte 239 matchs d’expérience.

Il faut toutefois mal le connaître pour croire qu’il pourrait se laisser abattre par ce recul.

« Ce sont des choses sur lesquelles je n’ai aucun contrôle, raisonnait-il après la première sortie officielle du club-école. Les saisons sont vraiment longues, il y a beaucoup de choses qui peuvent arriver, surtout dans une saison comme celle-ci. Je ne suis pas un moins bon joueur de hockey que je l’étais l’an passé, au contraire, je pense que je m’améliore encore à chaque année et j’ai prouvé que je pouvais jouer dans la Ligue nationale. Certains soirs, on pouvait être dominant dans les parties que j’ai jouées. Donc je ne suis pas inquiet là-dessus. L’important pour moi en ce moment, c’est de garder mon tempo et mon niveau de jeu très élevé et essayer d’amener de l’énergie pour notre camp d’entraînement, que tout le monde soit de bonne humeur et qu’on fasse ça dans le plaisir. »

Belzile, qui a bourlingué dans sept clubs de la ECHL et de la Ligue américaine avant de revenir au Québec, en est à sa troisième saison dans l’organisation du Canadien. En mars dernier, il a signé une prolongation de contrat d’un an, à deux volets, qui lui rapporte 225 000$ dans les mineures.

À sa première saison avec le Rocket, il a amassé 54 points en 74 matchs et représenté l’équipe au match des étoiles de la LAH. L’an dernier, une blessure à un muscle pectoral l’a limité à 20 matchs avant la suspension de la saison en raison de la pandémie.

« Je crois qu’on est juste chanceux de pouvoir jouer en ce moment, relativise-t-il. C’est comme ça que je le vois. Je jouerais 40 matchs contre la même équipe s’il le fallait. On est privilégié de pouvoir jouer au hockey et il faut l’apprécier. »

Des conditions incertaines

Sans dire qu’il faille considérer sérieusement cette option, l’idée que le Rocket doive disputer tous ses matchs contre un adversaire unique n’est pas totalement utopique. Vendredi, la Ligue américaine a dévoilé le calendrier de 24 des 28 équipes qui participeront à ce qu’il reste de la saison 2020-2021. À deux semaines de la date prévue pour la première mise en jeu, les quatre équipes canadiennes du circuit font toujours face à une page vierge. Le retard dans la livraison de l’horaire complet s’expliquerait par les pourparlers dans lesquels seraient toujours impliqués les clubs de Toronto et Belleville avec la Santé publique ontarienne.

Pour prouver qu’il ne rigole pas lorsqu’il dit qu’il se contenterait d’un seul adversaire jusqu’au printemps, Belzile raconte qu’il y a quelques années, alors qu’il portait les couleurs des Steeleheads de l’Idaho dans la ECHL, son équipe avait joué neuf matchs de suite contre le Thunder Stockton.

« Je m’en rappelle très bien, on avait gagné les neuf matchs! C’est pas facile à faire, mais quand t’as pas le choix, t’as pas le choix », résume le grand optimiste.

« Il y a des gens qui vont toujours trouver une raison de se plaindre, ajoute Belzile. Je me répète, mais je nous considère chanceux de jouer et il faut profiter de cette expérience, même si elle est inhabituelle. Au moins, on joue au hockey. »

« Ça va créer des rivalités, c’est sûr, anticipe le défenseur Xavier Ouellet, qui a lui aussi dû passer par-dessus la déception d’être laissé de côté par le CH après avoir terminé la saison dernière dans la bulle torontoise. Quand tu joues plusieurs matchs contre la même équipe, souvent c’est ce que ça fait. Donc ça va être extrêmement compétitif. Avec la dernière année qu’on a eue, avec la pandémie et tout, je pense que juste le fait de pouvoir jouer des matchs, c’est déjà un gros bonus pour nous. Rendu là, on est juste chanceux. »

L’entraîneur du Rocket, Joël Bouchard, ne manquera pas non plus de sommeil en attendant la résolution du dossier du calendrier.

« Ça fait deux ans que je suis dans la Ligue américaine comme entraîneur, j’y ai joué aussi. Le 5 février, c’est dans dix ans pour nous autres. C’est comme ça que ça marche dans cette ligue. On peut pratiquer l’avantage numérique une journée et le lendemain, trois de nos joueurs sont partis. C’est notre réalité, on ne peut pas se projeter trop loin dans l’avenir. La bonne nouvelle, c’est qu’on a du temps. »

« Non, les équipes canadiennes ne connaissent pas encore leur horaire, mais ça ne veut pas dire qu’on ne jouera pas le 5 février et ça ne veut pas dire qu’on jouera uniquement contre le Moose du Manitoba, a conclu Bouchard. Je crois qu’il faut juste laisser du temps aux personnes concernées pour trouver une solution. Je suis très confiant qu’on sera capable de commencer le 5 février. »