LAVAL – Quelques minutes après l’heure prévue pour le début de l’entraînement du Rocket de Laval, lundi matin, Jesse Ylönen s’exerçait avec comme seuls partenaires une douzaine de rondelles.

Bien installé dans le cercle de mises en jeu à la gauche de son objectif, Ylönen répétait le même genre de tir qui lui avait permis de marquer son premier but des séries deux jours plus tôt à Syracuse. Un peu plus tard, le Finlandais a changé de tactique. Plutôt que de décocher son foudroyant lancer frappé, il s’est mis à retenir systématiquement son geste et à s’avancer vers sa cible avant de rebrousser chemin, à reculons, pour ensuite diriger une passe soulevée vers un coéquipier imaginaire à l’embouchure du filet.

 « Aucune idée. Je ne l’ai jamais vu faire ça », a répondu son entraîneur Jean-François Houle, sourire en coin, quand on lui a demandé s’il savait ce qui trottait dans la tête de son attaquant pendant cette simulation inusitée.  

Le manège fut de courte durée. Personne n’a finalement rejoint Ylönen sur l’immaculée surface glacée. En début de matinée, Houle avait décidé de déroger de son plan initial et avait annoncé à ses joueurs qu’ils auraient congé d’entraînement pour une deuxième journée consécutive.

Le retour au boulot officiel en prévision du troisième match de la série qui oppose le Rocket au club-école du Lightning de Tampa Bay n’aura donc lieu que mardi.

« C’est sûr qu’on prend à bras ouverts les congés en séries, n’a pas caché Joël Teasdale. C’est vraiment important de pouvoir bien se reposer, de ne peut-être pas trop pratiquer et garder un peu d’énergie pour les matchs. Rendu en séries, t’es sensé connaître le plan de match et les stratégies de jeu. Donc c’est juste de gérer l’énergie pour arriver prêt au match. »

« On joue du hockey serré, physique et je pense que le repos est très important, a corroboré Houle pour justifier sa décision. C’est pour ça qu’aujourd’hui on a pris une journée de plus pour reposer le corps des joueurs. On a eu un calendrier assez chargé dans les mois de février, mars et même avril. Les trois derniers mois n’ont pas été faciles pour nous. Gérer l’énergie, c’est très important présentement. »

Les bonnes intentions de Houle pourraient-elles se retourner contre lui et ses ouailles? Est-ce qu’à trop vouloir protéger ses hommes contre les rigueurs du hockey de printemps, l’entraîneur du Rocket risque de les sortir d’une sorte de routine qui leur est d’ordinaire si précieuse?  

C’est que déjà, le calendrier de la Ligue américaine offrait au Rocket et à leurs adversaires une belle occasion de reprendre leur souffle. Après la victoire qui a permis aux Lavallois de créer l’égalité 1-1 dans la série samedi, les deux équipes ne recroiseront pas le fer avant jeudi.

D’ailleurs, malgré son penchant assumé pour la récupération, Houle est le premier à admettre que dans un monde idéal, sa cravate chanceuse ne serait pas restée si longtemps dans le placard.

« Surtout quand tu gagnes et que tu as un peu le momentum, tu veux continuer avec ça. Mais de l’autre côté, ça nous permet d’avoir un peu de repos et de nous remettre de nos petits bobos. Je pense que rejouer le plus vite possible, c’est bon, mais on va être prêts à tout. Deux bonnes journées de pratique et on va être prêts pour le match. »

Alex Belzile, qui a marqué trois buts dans les deux premiers matchs de la série, aurait lui aussi repris le collier plus tôt s’il avait eu son mot à dire dans l’horaire de la semaine. Mais après avoir attendu quatre ans pour disputer son premier match éliminatoire à la Place Bell, ce ne sont pas quelques journées de plus qui vont le perturber.

« Je ne suis pas très picky sur ce côté-là. Dites-moi la date à laquelle on va jouer et on va s’arranger pour être prêts. »

Belzile explique son geste

Belzile vient peut-être à peine de disputer ses premiers matchs de séries dans la Ligue américaine, mais ça ne veut pas dire qu’il manque d’expérience dans les tranchées pour autant.

Au niveau junior, l’orgueil de St-Éloi a inscrit 43 points en 38 matchs de séries répartis sur trois années avec l’Océanic de Rimouski. Dans la ECHL, il a remporté deux fois la coupe Kelly remise aux champions du tournoi éliminatoire. En 2020, il a aussi fait sa place dans l’alignement du Canadien pour six matchs de l’improbable parcours du Canadien.

En fin de semaine, le vieux renard a rappelé à tout le monde son amour des grands rendez-vous en marquant trois buts. On l’a aussi vu sortir un lapin de son chapeau après le troisième de ces buts, qui donnait l’avance 2-1 au Rocket en deuxième période du match de samedi.

Après avoir profité d’un revirement de Rémi Elie en territoire du Crunch pour déjouer Maxime Lagacé, Belzile a enlevé son gant droit et a pointé un doigt au ciel avant d’aller frapper sa paume contre la baie vitrée. À qui était destiné le message et quelle était sa signification? La collègue Andrée-Anne Barbeau lui a soutiré une partie de réponse lundi.

« C’était juste un joueur de l’autre côté qui avait fait cette célébration lors de la première partie. Je sais qu’au point de vue des médias, des fois on ne se rend pas compte de tout ce qui se passe dans l’interne d’une série comme ça. Ce sont des séries émotives, il n’y a pas d’amis, tu t’en vas à la guerre et tu fais n’importe quoi pour essayer de déranger et d’être en contrôle, juste pour avoir un petit edge. Je n’avais pas planifié de faire ça, c’était juste l’émotion. Je suis un joueur très émotif. Je ne sais pas, je pensais que c’était la bonne chose à faire. »