En juin 2013, quand Marc Bergevin et Trevor Timmins ont sélectionné Michael McCarron, au 25e rang du repêchage de la LNH, ils ont fait grand état de ce « projet » qu’ils souhaitaient développer et polir. Ils voulaient faire de ce grand gaillard de 6 pieds, 6 pouces un joueur capable d’évoluer dans la LNH, sur une base régulière.

Un peu plus de 4 ans plus tard, alors que le joueur est maintenant âgé de 22 ans, les dirigeants de l’équipe avaient grand espoir que le « projet » était venu à maturité.

Après une saison 2016-2017 au cours de laquelle McCarron avait disputé 32 matchs dans la Ligue américaine et 31 avec le Canadien, les astres étaient alignés pour l’attaquant format géant. Le hic, c’est que la performance de McCarron a déçu ses patrons. Claude Julien n’est d’ailleurs pas passé par quatre chemins :

« Il n’a pas connu le meilleur camp. C’est dommage, parce qu’il est capable d’en donner plus. »

En écoutant l’entraîneur, on ne pouvait que constater que McCarron est assurément un joueur qu’il avait en tête quand il a lancé quelques fois pendant le camp que « certains joueurs ne semblent pas saisir l’opportunité qui leur est présentée ».

Dimanche, au terme d’une victoire de 7-5 du Rocket, contre les Senators de Belleville, McCarron a eu l’occasion de commenter son renvoi à Laval pour une première fois. Il avait une lecture similaire de la situation.

Notre conversation de quelques minutes dans le vestiaire, où j’étais assis à ses côtés, sans caméra, m’a permis de constater la sincérité de ses propos et le besoin d’exprimer sa déception. McCarron est un jeune homme brillant et articulé. Clairement, il est le premier à admettre qu’il n’a pas répondu aux attentes. Les attentes de l’organisation envers lui, mais surtout, ses propres attentes.

« Mon camp n’a pas été bon. Je n’ai pas joué de la façon dont je le souhaitais. C’est décevant, surtout après avoir fourni tant d’efforts à m’entraîner au cours de l’été. Mes jambes sont plus fortes et je me sens plus rapide, mais il y a des choses qui clochent. Je me présente ici (à Laval) avec une bonne attitude, pour rebâtir ma confiance et tout mettre en œuvre pour qu’ils me rappellent. »

Pour ce premier match avec le Rocket de Laval, McCarron évoluait au centre de Chris Terry et Nikita Scherbak, deux joueurs offensifs avec lesquels il aime jouer. Scherbak a également déçu au camp du Tricolore, mais il est un joueur dynamique, qui doit continuer de grandir. Dans le cas de Terry, on parle d’un vétéran de 28 ans, qui a marqué 30 buts en 58 matchs dans l’uniforme des IceCaps de Saint John’s, la saison dernière.

McCarron admire les qualités offensives de ses compagnons de trio, surtout les talents de marqueur naturel de Terry, mais il fait aussi preuve d’une grande humilité en ce qui concerne ses aptitudes offensives :

Michael McCarron« C’est bien d’évoluer avec ces joueurs de talent, mais je ne dois pas modifier mon style de jeu. Je dois m’efforcer de leur créer de l’espace, afin de leur ouvrir la porte à créer de la magie sur la patinoire. L’an dernier, je suis tombé dans le piège d’essayer de jouer comme eux. Ce n’est pas dans mon ADN. »

J’ai ensuite demandé à McCarron s’il avait le sentiment de réfléchir un peu trop sur la patinoire, au lieu de simplement s’amuser et jouer à sa façon :

« C’est ce qui arrive lorsque ta confiance est ébranlée. Tu veux profiter d'une place au soleil et te faire remarquer, au lieu de jouer comme tu le devrais. C’est ce qui est arrivé au camp. »

Voilà des propos qui illustrent un peu à quel point les attentes peuvent être lourdes à porter quand un joueur est sélectionné au premier tour. Année après année, les dirigeants du Canadien ont parlé du coup de patin de McCarron pour expliquer ses contre-performances. On a souvent fait mention du fait qu’il doit être plus explosif dans ses premières enjambées. Mais soyons honnêtes, un joueur de 6 pieds 6 pouces, aussi fort puisse-t-il travailler, n’aura jamais des enjambées aussi fluides qu’un Paul Byron, qu’un Johnny Gaudreau ou qu’un Andrew Cogliano.

On a pu constater une amélioration au chapitre du patinage de McCarron cette année, mais le principal intéressé comprend aussi qu’il en faut davantage pour évoluer dans la LNH sur une base régulière :

« Plusieurs joueurs de la LNH ne se distinguent pas par leur vitesse, mais leur positionnement sur la patinoire est incroyable. Tomas Plekanec est un bon exemple. Il est rapide, mais il n’a pas à se servir toujours de sa vitesse. Son niveau d’expérience lui permet d’être toujours bien positionné. J’essaie constamment de prendre de petits trucs, pour tenter de m’améliorer. »

Le fait que Claude Julien était déçu du rendement de McCarron nous a également démontré que l’entraîneur du Canadien croit en son potentiel :

Michael McCarron« Il a les atouts d’un bon espoir de la LNH. Il doit aller à Laval afin de retrouver la bonne voie et pour devenir le joueur que nous savons qu’il peut être. »

McCarron a baissé la tête, en guise de soulagement, quand je lui ai rapporté les propos de Julien :

« C’est bon d’entendre qu’ils croient toujours en moi. Cela dit, je ne veux pas trop y penser, parce que je suis déçu de ma performance et parce que je souhaite profiter de l’opportunité de jouer ici avec une équipe talentueuse à Laval. Je veux me défoncer à chacune de mes présences sur la patinoire. »

Sylvain Lefebvre a eu une bonne conversation avec McCarron au cours des derniers jours. Il lui a rappelé une discussion qu’ils avaient eu la saison dernière, quand McCarron a été cédé à la Ligue américaine, environ au même moment, en 2016. Son entraîneur l’avait alors prévenu de ne pas trop prendre les choses à la légère :

« L’an passé, il a produit rapidement avec nous et il a pensé qu’il serait facile pour lui de maintenir la cadence sur le plan offensif. Je lui ai rappelé notre discussion, mais je vois qu’il s’est présenté ici avec la bonne attitude. Il est un professionnel, qui a côtoyé des joueurs de la LNH et qui a appris des choses. »

Il n’y a aucun doute que McCarron est prêt à tout pour prouver une fois pour toutes à ses patrons qu’il mérite une place au sein de la formation du Canadien. Il espère d’ailleurs que la proximité du club-école servira de motivation pour afficher des performances constantes :

« Ils assisteront souvent aux matchs et me surveilleront de près. Je fournirai toujours un maximum d’effort. Il était difficile pour les dirigeants de se déplacer pour voir nos matchs quand nous étions à Terre-Neuve. Sur le plan mental, on avait parfois le sentiment d’être moins motivés et on ressentait un relâchement lorsqu’ils n’étaient pas sur place pour analyser nos performances. Maintenant, je suis heureux de me présenter ici avec une bonne attitude et je me concentre sur une seule chose…un rappel du Canadien. »

L’avenir nous dira si ses efforts seront récompensés, mais pour le moment, on ne peut que saluer le fait que McCarron reconnaît ses torts. Les patrons ont fixé la barre à un niveau élevé pour leur espoir. Le joueur est déterminé et veut démontrer qu’il a les outils pour réussir, mais surtout, la compréhension du jeu nécessaire pour déménager à Montréal sur une base permanente.