LAVAL – Les ménages à trois ne sont pas reconnus pour mener à des conclusions heureuses. Même si ce contexte n’est pas de tout repos pour Zachary Fucale, les dirigeants du Canadien et du Rocket de Laval considèrent qu’il s’agit de la meilleure option de développement pour lui.

 

À première vue, la logique voudrait qu’un gardien de 22 ans repêché en deuxième ronde dispute le plus de matchs possible pour favoriser son développement.

 

Pourtant, Fucale a été impliqué dans un triangle de gardiens pour la majeure partie de la saison actuelle. Étant le troisième gardien dans cette hiérarchie du club-école du CH, le Québécois s’est contenté de miettes. À preuve, il a obtenu, vendredi, son premier départ dans la Ligue américaine en près de deux mois puisque Charlie Lindgren, le gardien numéro un, était malade.

 

Bien sûr, l’état-major l’a envoyé se dépoussiérer pour quelques matchs avec le Beast de Brampton, de la ECHL, pendant cette attente. Tout de même, Fucale n’a participé qu’à huit matchs avec le Rocket et six avec le Beast en 2017-2018.

 

Ce total augmentera puisqu’il a été cédé de nouveau, mercredi après-midi, à Brampton. Si l’on se fie à la logique des dirigeants, il ne devrait pas rester là-bas trop longtemps.

 

Jusqu’à présent, l’entraîneur Sylvain Lefebvre avait conservé une certaine prudence dans ses propos à ce sujet. Mercredi, il en a révélé un peu plus sur les motivations de l’organisation pour le garder à Laval plus souvent qu’autrement dans un rôle de spectateur.

 

« On trouve qu’il y a une meilleure structure et de meilleures ressources ici pour des jeunes joueurs et particulièrement pour un jeune gardien », a admis Lefebvre.

 

« Ce ne serait pas juste pour lui de simplement l’envoyer à Brampton et l’oublier là-bas. Ce n’est pas ce qu’il mérite, ce n’est pas ainsi qu’on veut faire les choses », a-t-il ajouté.

 

Lefebvre ne s’est pas arrêté là, il y est allé de deux précisions supplémentaires.

 

« Il faut savoir que les gars ne pratiquent pas beaucoup dans la ECHL. Si tu leur demandes, ils vont le dire, les entraînements ne sont pas ce qu’il y a de mieux. Ils sont un peu laissés à eux-mêmes. C’est ainsi que ça fonctionne, ce n’est pas pour les critiquer. Ils n’ont simplement pas les ressources.  

 

« Zach mérite aussi de passer du temps avec Marco (Marciano), notre entraîneur des gardiens », a raconté Lefebvre.

 

En dépit des embûches, Fucale s'accroche

 

Depuis qu’il a été repêché par Montréal en 2013, Fucale a exposé sa personnalité joviale et sa passion du hockey. Il n’a jamais voulu démontrer qu’il était affecté par l’ascension de Lindgren et Michael McNiven qui l’ont dépassé dans l’organigramme des gardiens de la relève.  

 

Mercredi, Fucale se sentait plus prêt à parler des obstacles qui sont survenus sur son chemin.Zachary Fucale

 

« Au bout de la ligne, cette période d’attente a été positive, mais ça ne veut pas dire que c’est toujours facile.

 

« Je ne peux pas dire que tout est beau tout le temps. Ce n’est pas toujours comme ça. Mais ça fait partie de la réalité des athlètes professionnels. Ça vient avec des bas et c’est quand même là qu’on apprend », a avoué Fucale sans enjoliver la situation.

 

Fucale y est allé de ces confidences alors qu’il venait tout juste de quitter la patinoire après un entraînement de deux heures. Avant même d’avoir retiré ses jambières, il a pris le temps d’exprimer son point de vue sur sa saison plutôt particulière.

 

« Les derniers mois n’ont pas été très faciles, mais j’ai pris le temps de m’asseoir et me dire que je devais revenir à travailler sur la glace. Je reste longtemps après la fin des entraînements et je travaille sur des choses tous les jours. Je suis confiant que ce travail va m’aider pour l’avenir, ça va payer », a-t-il lancé avec assurance.

 

Fucale a donc redoublé d’ardeur pour accélérer la tangente de son développement, mais il n’a pas perdu la flamme, ce plaisir qui disparaît pour certains hockeyeurs.

 

« Non! Jouer au hockey, c’est la chose qui compte pour moi.  Il y a des moments plus difficiles dans la vie, mais c’est le cas pour tout le monde et c’est pareil pour nous. On est chanceux de faire ce métier. Je me considère privilégié d’être ici et je suis très optimiste que les choses vont s’améliorer », a réagi le cerbère originaire de Laval.  

 

« Pour garder le moral, il faut juste que tu continues à croire en tes moyens. Je sais comment je peux aider une équipe et je pense que mes coéquipiers aussi le savent. C’est la chose qui me donne l’énergie de continuer chaque jour. La chance de jouer dans la LNH est encore là, c’est mon but. Je ne vais pas laisser quelques mois sans jouer me décourager. J’ai mis beaucoup de travail pour arrêter ça là », a poursuivi Fucale.

 

Vendredi, contre Hartford, Fucale n’a pas été parfait. Il a alloué deux mauvais buts, mais le résultat était plus que satisfaisant après un tel exercice de patience.

 

« C’est certain que je ne suis vraiment pas content des deux buts que j’ai donnés, on les a vus, ce n’était pas beau. Mais, en fin de compte, on a eu la victoire et c’est tout ce qui compte pour moi. »

 

Fucale n’a pas encore atteint le niveau désiré, celui dans lequel évolue ses anciens coéquipiers des Mooseheads de Halifax Nathan MacKinnon, Jonathan Drouin et Nikolaj Ehlers. Mais personne ne peut le critiquer pour son attitude qui est demeurée exemplaire.

 

« Tous les gars étaient contents pour lui, on sait à quel point il travaille fort. Il est enjoué chaque fois qu’il arrive dans le vestiaire. En plus, c’est mon coloc, j’étais vraiment heureux pour lui », a commenté Jérémy Grégoire qui est assez rétabli pour effectuer un retour au jeu vendredi.  

 

« Zach a été merveilleux durant tout ce temps, il a été très professionnel, il essaie de progresser le plus qu’il le peut. Il aurait pu accepter cette situation de manière plus difficile. Je lui lève mon chapeau pour ça », a souligné l’entraîneur.

 

Un problème pour le développement

 

Le cas de Fucale soulève tout de même un grand problème quant au développement des gardiens. Est-ce préférable de pratiquer régulièrement avec une équipe de la Ligue américaine en ne jouant que sporadiquement ou obtenir le filet plus souvent dans le niveau inférieur de la ECHL?

 

« Quand il y va, on sait qu’il voit beaucoup d’action alors qu’ici, il est confronté aux lancers des joueurs de la LAH. Mais ça reste une bonne question, je ne suis pas un expert des gardiens », a répondu Lefebvre.

 

« C’est difficile, mais on essaie de tirer le maximum de la situation et des ressources que nous avons. On pense que pour notre organisation et pour Zach, c’était la meilleure décision », a noté l’entraîneur.

 

Fucale ne veut surtout pas dénigrer le contexte qui prévaut avec le Beast.

 

« Je ne veux rien enlever à Brampton parce que j’ai appris énormément là-bas l’an passé, des choses que je n’avais pas apprises ailleurs avant. Cette année, je suis un meilleur gardien que je ne l’ai jamais été », a-t-il jugé.  

 

« Le ménage à trois, ce n’est pas évident, mais ce n’est pas la fin du monde. Les choses peuvent changer vite. Mon rôle, c’est de travailler et de mériter les départs que je vais obtenir », a conclu Fucale.