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Une réforme attendue et Hockey Canada se fera épier de près

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MONTRÉAL – Avec tous les scandales qui ont éclaté dans le sport canadien récemment – et pas uniquement à Hockey Canada – il était essentiel que la ministre Pascale St-Onge impose une réforme et il faudra voir si les mesures mèneront à un véritable changement sur le terrain. 

La réforme dévoilée, jeudi, par la ministre vise à améliorer la gouvernance des fédérations sportives nationales qui devront se conformer à un code de conduite afin de pouvoir bénéficier du financement du gouvernement fédéral. 

Plusieurs mesures sont au cœur de cette réforme qui se veut évolutive et qui espère changer la culture néfaste qui a gangréné de nombreux sports. Parmi les plus importantes, la ministre St-Onge s'attarde beaucoup aux conseils d'administration en exigeant une représentation des athlètes et une diversité tout en limitant la durée permise (à 9 ans) pour y siéger.

Un comité d'athlètes sera également mis en place pour que Sports Canada s'inspire davantage de la perspective des athlètes dans ses opérations. 

Un accent se dirigera aussi vers les entraîneurs alors que ceux-ci devront posséder les certifications requises et leur passé sera examiné de manière approfondie pour participer aux compétitions internationales. 

« Le but de toute la réforme, c'est de briser la culture du silence, amener plus de transparence et d'imputabilité dans le système. Une façon d'y arriver, c'est en donnant du pouvoir aux athlètes dans le système. Parce que le système existe d'abord pour qu'ils puissent pratiquer leur sport et rayonner », a réagi, en entrevue à RDS, la ministre des Sports et de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec. 

Les bonnes intentions de la réforme ne vont cependant pas éliminer, par magie, les abus (psychologiques ou sexuels) qui surviennent sur le terrain. 

« Pour vraiment changer la culture d'un sport, ce n'est pas une ministre dans son bureau, en décrétant de nouvelles politiques, qui y parviendra toute seule, a convenu la ministre. On jette des fondations pour changer la culture et on donne des outils aux organisations pour la changer. Mais c'est collectivement qu'on va y arriver et c'est à tout le monde dans le système sportif de prendre conscience de ses droits mais aussi de ses responsabilités. Quand on est témoins de gestes qui sont de l'abus ou des mauvais traitements, c'est important de dénoncer. »

Ce n'est pas évident non plus de surveiller le comportement et les pratiques des entraîneurs. 

« On est à l'étape d'investir beaucoup en éducation et en prévention autant pour les enfants qui font du sport que les entraîneurs pour qu'ils aient une compréhension commune de ce qui est correct et ce qui ne l'est pas. Il reste beaucoup de travail à faire, mais ce sont les bases pour y parvenir », a cerné la ministre St-Onge. 

De plus, un coup de barre s'imposait du côté de Sports Canada qui disposera de meilleures ressources pour jouer un rôle plus autoritaire auprès des fédérations. 

« Il y a une prise de conscience qui s'est produite qu'on devait aller plus loin. On ne pouvait plus laisser les organisations s'autoévaluer. Ça prenait une évaluation externe », a admis la ministre St-Onge. 

Hockey Canada sera parmi les priorités de la ministre

Les histoires d'horreur qui ont éclaboussé Hockey Canada ébranlent encore les citoyens qui attendent la suite dans ce dossier. 

« Pour Hockey Canada, mais aussi toutes les autres organisations, il va y avoir une vérification serrée qui sera faite par Sports Canada désormais. Hockey Canada sera assurément parmi nos priorités. Tout comme Gymnastique Canada et Soccer Canada, un organisme sur lequel on entend plein de choses. Ces organisations aussi vont devoir se conformer aux exigences, elles vont devoir le faire en priorité », a-t-elle indiqué alors que les parents et les athlètes auront un plus grand mot à dire. 
 
« Oui, on a rétabli leur financement, mais ça vient avec plusieurs conditions. Ce n'est pas un chèque en blanc qu'on donne à Hockey Canada. Ce qu'il faut comprendre aussi, c'est que lorsqu'on suspend le financement d'une organisation, l'argent paie les entraîneurs, l'équipement, les voyages... Ça finit par avoir des impacts sur les athlètes et ce sont justement eux qu'on ne veut pas pénaliser et qu'on veut protéger », a justifié la ministre. 

En ce qui concerne les trois enquêtes distinctes menées par un cabinet d'avocats mandaté par Hockey Canada, la LNH et le service de police de London, la ministre St-Onge patiente. 

« Les coupables, c'est vraiment du côté de la police qui poursuit son enquête. Évidemment, on ne se mêle pas de ça. On va voir ce qui va arriver. »

Un vent de changement suffisant ?

La ministre St-Onge avoue qu'elle a été ébranlée par les scandales incessants qui ont été déterrés notamment à Hockey Canada, Gymnastique Canada, Soccer Canada, Bobsleigh Canada Skeleton et Natation artistique Canada.  
 
« Pas juste comme ministre, d'abord et avant tout en tant que femme et ancienne athlète. J'ai eu de belles expériences dans le système sportif, mais d'entendre que des enfants sortent du système traumatisés car ils ont vécu de l'abus et de mauvais traitements, c'est absolument horrible. Comme ministre, je sens une immense responsabilité d'apporter des correctifs et tout faire ce que je peux pour prévenir d'autres abus comme ça dans le système », a répondu Mme St-Onge. 

Au cours des derniers mois, deux comités parlementaires (le Comité permanent du Patrimoine canadien et le Comité permanent de la condition féminine) ont posé plusieurs questions sur le milieu sportif tout en recueillant de précieux témoignages. 

« Beaucoup d'éléments de la réforme répondent à des choses entendues de la part des victimes, des athlètes et des organisations pendant ces témoignages. On va étudier de manière très sérieuse ce qui se retrouvera dans les recommandations deux comités, je retiens toutes les bonnes idées », a assuré la ministre. 

Le vent de changement se ressent déjà dans quelques fédérations sportives et cette réforme vient lui donner de la force. La ministre St-Onge demeure consciente que le défi est colossal. 

 « Je pense que le message a été compris, mais on ne change pas une culture du jour au lendemain. Comme ministre, je ne peux pas changer la culture dans le sport canadien, ce sont vraiment les gens qui participent dans le sport qui vont finir par briser les éléments toxiques dans le sport. Parce qu'il y a plein de belles choses dans le sport aussi. Il faut que tout le monde mette l'épaule à la roue. Il faudra continuer de s'ajuster et investir dans notre système sportif pour le rendre à la hauteur de ce que les parents et les enfants souhaitent », a conclu la ministre St-Onge.