Écrire l’Histoire en lettres de bronze, c’est ce qu’ont fait les filles de l’équipe canadienne de rugby aujourd’hui dans un match enlevant, spectaculaire, qu’elles ont pris en mains dès l’engagement. Un match qui clôturait leur tournoi de belle façon, alors qu’elles auront vécu toute la gamme des émotions au cours de ces trois jours bien remplis.

La défaite sévère subie 22 à 0 en match de poule devant la Grande-Bretagne aurait pu les démolir. Elles se sont plutôt admirablement bien reprises pour aller chercher le quart de finale contre la France, pavant ainsi la voie à la demi-finale contre l’Australie. Celle-ci, très conquérante, n’a laissé aucune chance au Canada, réussissant très vite deux essais pour arriver à la mi-temps avec une avance de 12-0. Il aurait fallu que les Canadiennes marquent aussitôt après la reprise, elles ont plutôt encaissé un autre essai et à 17-0, la cause était entendue. Charity Williams a mis un peu de baume sur la plaie en aplatissant le ballon dans l’en-but, mais c’était pour l’honneur, et éviter un deuxième blanchissage dans le tournoi.

Les Canadiennes ont quitté le terrain en larmes, et n’ont même pas voulu s’approcher des représentants de la presse qui couvraient l’événement. Elles ont préféré aller se ressaisir loin des réflecteurs et des micros, chercher des réponses à leurs questions plutôt que d’en donner à celles des journalistes. Ce n’est pas un reproche loin de là. La suite des événements montrera que c’était la chose à faire, que ce moment de regroupement aura été bénéfique et leur aura permis de chasser les idées noires pour laisser place à une attitude positive, assurée, résolue.

Lorsqu’elles sont entrées sur le terrain, dans le sprint caractéristique des ouvertures de matchs, on pouvait sentir qu’il y avait quelque chose de changé, que leur façon de marteler le sol n’était plus tout à fait la même. Qu’elles étaient à Rio pour une médaille et entendaient bien en repartir avec. L’entraîneur John Tait avait fait un changement sur la formation face à celle qui avait affronté la Grande-Bretagne la première fois, titularisant Karen Paquin plutôt que Britt Benn, quelque peu erratique dans les derniers matchs. Ce fut là une excellente décision puis que c’est Paquin qui a ouvert la marque avec le premier essai du match. La transformation réussie de Landry allait permettre aux Canadiennes de garder les devants malgré la réplique de Waterman quelques instants plus tard, quand McLean a raté les deux points supplémentaires. Si cet essai britannique laissait craindre une montée en régime des adversaires, cette inquiétude est bien vite disparue avec les trois essais enfilés coup sur coup par le Canada. Landry-Farella- Russell dans une litanie qui a permis d’arriver à la mi-temps avec déjà des étoiles plein les yeux. 26 à 5, c’était insurmontable.

Les Canadiennes ont continué de jouer avec brio, les mains sûres et les jambes alertes et le dernier essai de Landry, transformé par elle-même, auront permis de conclure sur un brillant 33-10. Les filles n’en finissaient plus de célébrer par la suite alors que les Britanniques se voyaient glisser à la place dont personne ne veut, la quatrième. Il y avait une obligation de résultat pour le Canada, après la médaille d’or des Jeux Pan-Am de l’an dernier, mais on savait que les choses seraient différentes aux Jeux. Les pays de l’hémisphère sud ne sont pas aux Jeux panam...

Ce n’était donc pas surprenant de voir en finale deux pays de cet hémisphère s’affronter en finale, dans une rencontre épique par ailleurs. Australie-Nouvelle-Zélande, on ne pouvait rêver de plus grand duel et l’une ou l’autre aurait pu l’emporter. Mais ce sont les Wallabies qui ont eu le meilleur sur les kiwis, l’Australie remportant ainsi cette première médaille historique. 

Le grand gagnant dans tout ça, c’est le rugby à sept qui a profité d’une vitrine formidable et qui s’est fait connaître partout sur la planète. Cela aura pris 92 ans pour ramener le rugby dans le giron des Jeux et chose certaine, il est maintenant là pour y rester. Le rugby à XV n’aurait pas pu y revenir pour des raisons de calendrier et de temps de récupération. Mais il a sa Coupe du monde aux quatre ans, et le rugby à sept voit la sienne remplacée par les Jeux olympiques. Un juste compromis qui fera simplement plus d’adeptes pour les formes différentes de ce sport spectaculaire. En attendant, continuons de savourer la médaille de bronze canadienne. Elles l’ont bien mérité!