MONTRÉAL - La reine incontestée des Jeux paralympiques de Tokyo, Aurélie Rivard, l'admet d'emblée: elle flotte encore sur un nuage deux semaines après être rentrée du Japon.

Rivard, qui est âgée de 25 ans, a décroché un impressionnant total de cinq médailles, dont deux d'or et une d'argent, en paranatation. Elle compte maintenant 10 médailles en carrière aux Jeux paralympiques.

De plus, si on combine sa récolte tokyoïte à celle de quatre disques d'argent du para-athlète Brent Lakatos, de Dorval, alors on recense neuf des 21 médailles acquises par la délégation canadienne dans la capitale japonaise. Du jamais vu.

« Je n'avais pas réalisé ça. C'est tout de même le `fun' à savoir. C'est un bel accomplissement, je pense », a-t-elle d'abord dit, simplement, en entretien téléphonique avec La Presse Canadienne.

La Québécoise assure toutefois qu'elle n'a pas été surprise de se retrouver si souvent sur le podium au Japon. Après tout, elle a travaillé d'arrache-pied au cours des dernières années pour être au sommet de sa discipline.

« C'est la raison pour laquelle je m'entraînais. Il était hors de question que je me rende à Tokyo en laissant des choses au hasard. Je m'entraînais pour améliorer mes performances, pour battre les records du monde, et pour ramener le plus de médailles possible. Les médailles au 100 m dos (argent) et le relais 4x100 m VI (bronze) ont été de belles surprises, et ç'aurait pu partir dans tous les sens, mais je suis contente du résultat finalement », a résumé Rivard.

Rivard est parvenue à défendre deux de ses trois titres paralympiques acquis à Rio de Janeiro en 2016: ceux au 100 m libre S10 et au 400 m libre S10. Elle a cependant laissé filer celui au 50 m libre S10, se contentant finalement du disque de bronze. Une performance qu'elle a toujours de la difficulté à digérer.

« C'est une grande déception pour moi. Je m'en allais là pour gagner l'or, a-t-elle admis. Il n'y a même pas eu de piège; c'est ma performance qui est carrément inexplicable. Ce n'est pas une erreur que j'ai commise ou quoi que ce soit, je ne sais pas ce qui s'est produit. Point. C'est ce qui me fâche. Le lendemain de ce résultat au 50 m libre, j'ai fait la même course à l'entraînement et j'ai nagé plus vite. C'est donc très frustrant, sauf que ça m'a servi de tremplin pour mes résultats suivants au 100 m et au 400 m libres. »

Évidemment, ses statistiques ahurissantes entraînent nécessairement son lot de comparaisons avec le légendaire paranageur québécois Benoît Huot. Ce dernier a récolté 20 médailles , dont neuf d'or, en cinq éditions des Jeux paralympiques. Rivard jure cependant qu'elle n'a pas les marques de Huot dans sa ligne de mire.

« Ce que `Ben' a accompli au cours de la dernière décennie, c'est unique en soi. Et plus ça va aller, plus ce sera difficile à reproduire. Il va rester pour toujours une légende dans notre milieu (de la paranatation). `Ben' serait le premier à vouloir que je batte ses records, mais ça ne fait pas partie de mes objectifs, aux choses qui me trottent en tête. Ceci étant dit, c'est déjà un très grand honneur d'être comparé à lui, qu'on mentionne mon nom dans la même phrase que le sien », a-t-elle confié.

Il reste que Rivard considère sa plus récente récolte de médailles à Tokyo comme étant la plus représentative de son illustre carrière.

« Plus je vieillis, plus je trouve qu'elles prennent de la valeur. C'est difficile de se faire une place dans le milieu, et c'est encore plus difficile de la maintenir. Je trouve qu'après l'année qu'on vient de passer, avec la pandémie et tout, je trouve ça très gratifiant d'avoir été en mesure de connaître de telles performances (à Tokyo). Nous avons tout de même été limités dans nos entraînements ici, au Canada, donc ces 21 médailles là sont encore plus spéciales que celles acquises il y a quatre ans, par exemple », a-t-elle expliqué.

Rivard s'accordera maintenant une pause de quelques mois, loin de la piscine, afin de poursuivre ses études à l'université (en droit à l'Université Laval). La principale intéressée prévoit retourner dans la piscine à compter de février 2022.

Quant à savoir si elle compte être de nouveau sur la ligne de départ aux Jeux paralympiques de Paris en 2024, il faudra patienter encore un peu avant de connaître sa réponse.

« C'est difficile à dire, car on n'a jamais vécu de cycle olympique de trois ans. On a moins de temps pour peaufiner les détails, et je pourrai peut-être en parler dans trois ans - si je me rends. Mais pour l'instant, je ne change pas mon plan, je veux prendre une pause », a-t-elle confié.

« En ce moment, je veux simplement dire `oui' à tout ce que j'ai dit `non' depuis un an. Je veux revoir mes amis, ma famille, mes proches, et profiter un peu de la vie. Ensuite, je saurai qu'il est temps de retourner nager quand je vais commencer à tourner en rond dans la maison », a-t-elle conclu, en riant.