Boycott diplomatique et menace épidémique : en dépit de nuages noirs qui ont plané sur ses Jeux olympiques, la Chine peut s'enorgueillir d'un sans-faute dans l'organisation malgré des circonstances difficiles et un enthousiasme quelque peu refroidi.

COVID-19 oblige, sportifs, organisateurs et journalistes sont restés tenus pendant ces Jeux à l'écart de la population, dans une bulle sanitaire et soumis quotidiennement à des tests de dépistage.

Pékin est devenue la première ville du monde à recevoir à la fois des Jeux d'été et des Jeux d'hiver.

Mais la version 2022 n'a pas eu grand-chose de commun avec l'atmosphère de fête populaire qui avait accueilli l'édition 2008, perçue comme un symbole de l'émergence du pays sur la scène mondiale.

Les Jeux étaient cette fois boycottés diplomatiquement par plusieurs pays occidentaux, États-Unis en tête, au nom de la défense des droits de l'Homme.

« Avant même qu'ils ne commencent, ces Jeux étaient les plus chargés politiquement » de l'histoire, relève Richard Baka, spécialiste du mouvement olympique à l'Université Victoria (Australie).

Au point que certains redoutaient des prises de position politiques d'athlètes en réponse aux violations supposées de la Chine dans sa région du Xinjiang (nord-ouest).

Pékin y est accusée d'avoir enfermé dans des camps de rééducation politique plus d'un million de Ouïghours, une minorité musulmane. La Chine dément ces accusations.

« Sûrs et splendides »

Au final, rien n'est venu perturber l'esprit olympique.

« On s'en sort pas trop mal, parce que la Chine a tout bien contrôlé », estime M. Baka.

En revanche, les Jeux de Pékin resteront marqués par une retentissante affaire de dopage.

À 15 ans, la prodige russe du patinage Kamila Valieva s'est retrouvée au coeur d'une tempête médiatique après un contrôle antidopage positif à une substance interdite.

Durant ces Jeux, les spectateurs durant les compétitions ont brillé par leur absence.

Pour cause d'épidémie, seuls une poignée d'invités ont été conviés en tribune. Et tous ont été priés de respecter un strict protocole sanitaire... dont l'interdiction d'applaudir pour ne pas propager la COVID.

D'un point de vue festif, « les Jeux ne sont pas un carton, mais ils ont le mérite d'avoir été organisés avec succès malgré des circonstances difficiles », relève David Bachman, spécialiste de la Chine à l'Université de Washington.

En ce sens, l'objectif du président chinois Xi Jinping, qui voulait des JO « sûrs et splendides », est atteint.

Record de médailles

L'événement a également permis au pouvoir communiste d'offrir à sa population du « pain et des jeux », estime M. Bachman, usant d'une expression latine pour évoquer la paix sociale.

Le triomphe de la skieuse de freestyle Eileen Gu, 18 ans, qui a cimenté son statut de vedette en Chine en remportant trois médailles, dont deux en or, a aussi renforcé le prestige des autorités.

« Rien ne vaut la compétition pour participer au récit de sa propre histoire », souligne M. Bachman, voyant dans la championne un atout pour Pékin pour projeter une image glamour.

Née en Californie d'un père américain et d'une mère chinoise, la championne n'a toutefois pas clarifié si elle avait encore un passeport américain.

La Chine termine ces Jeux à la troisième place au classement des médailles (15 médailles, dont 9 titres), avec un nouveau record pour des Jeux d'hiver, juste devant le grand rival américain et devant plusieurs puissances européennes des sports d'hiver.

Une performance perçue comme la preuve que la Chine est désormais une nation de sports d'hiver.

« L'ensemble du paysage des sports d'hiver a changé (avec ces JO). La Chine a un bon point de départ pour développer son sport de haut niveau. J'espère qu'à l'avenir nous verrons plus de sportifs d'élite qui pourront être compétitifs au niveau international », s'est réjoui Yang Yang, la présidente de la commission des athlètes du Comité d'organisation des Jeux.

En décrochant l'organisation des JO-2022, Pékin s'était aussi fixé pour objectif d'initier 300 millions de Chinois aux sports d'hiver. Si le pouvoir affirme avoir atteint cet objectif, les observateurs se montrent cependant plus mesurés.