ZURICH, Suisse - À trois jours de l'élection du président de la FIFA vendredi, l'un des cinq candidats, le prince Ali, a demandé le report du vote, pas assez transparent à ses yeux, et a saisi le Tribunal arbitral du sport (TAS), qui s'est engagé à se prononcer jeudi matin au plus tard.

Ces derniers jours, ce candidat dont les chances pour l'élection de Zurich paraissent infimes, a fait de la mise en place d'isoloirs transparents son cheval de bataille procédural. Il a été rejoint dans ce combat par un autre « petit » candidat, le Français Jérôme Champagne, qui lui a apporté son soutien mardi en fin de journée.

Le prince Ali a saisi mardi le TAS via ses avocats parisiens Maîtres Szpiner et Semerdjian, après le refus de la FIFA de faire installer ces isoloirs transparents, comme il l'avait demandé dans un premier recours.

« En conséquence, nous avons déposé un nouveau recours devant le TAS demandant le report des élections prévues ce vendredi », ont indiqué les avocats du prince jordanien dans un communiqué.

« La décision sera prise jeudi matin au plus tard », veille de l'élection, a répondu le TAS moins de quatre heures après l'annonce du camp Ali.

« La question ne porte que sur l'installation d'isoloirs transparents et la désignation de scrutateurs indépendants », a précisé en fin de soirée Matthieu Reeb, secrétaire général du TAS.

« Le report de l'élection n'avait été demandé qu'au cas où il n'aurait pas été possible au TAS de se prononcer sur la question des isoloirs avant vendredi. La question du report de l'élection est donc sans objet dans la mesure où une décision du TAS devrait tomber jeudi matin », a-t-il encore assuré.

Téléphone mobile

« Seul un isoloir transparent permettrait de prouver (...) qu'il n'y pas de vote forcé, en empêchant les votants de photographier leur bulletin pour prouver qu'ils auraient suivi une éventuelle consigne de vote », avait expliqué dès samedi à l'AFP Me Semerdjian.

Interrogée sur la demande de mise en place d'isoloirs transparents, une porte-parole de la FIFA avait déclaré samedi à l'AFP : « Les votants pourront avoir avec eux leur téléphone mobile dans la salle du congrès mais devront le laisser au moment où ils iront voter ».

« Cette attitude est incompréhensible, sauf à vouloir s'obstiner à ne pas garantir la transparence des opérations de vote et la sincérité du scrutin », ont répliqué mardi les avocats du prince Ali, alors que la FIFA est embourbée depuis mai dernier dans un vaste scandale de corruption et se trouve dans le collimateur des justices américaine et suisse.

L'élection de vendredi sera la conclusion, en tout cas provisoire, d'une saga judiciaire de neuf mois. Trois jours avant ce vote, les acteurs se mettent peu à peu en place.

Les membres du Comité exécutif de la FIFA sont à Zurich, où ils se réuniront mercredi à huis clos. Ils ont pris leurs quartiers au luxueux hôtel Baur au Lac, où avaient eu lieu deux vagues d'interpellations de responsables du foot mondial le 27 mai et le 3 décembre.

Les représentants des 209 fédérations votantes, eux, arriveront à Zurich d'ici vendredi matin.

Deux poids lourds

Lors de la précédente élection, en mai dernier, le prince Ali avait poussé Joseph Blatter à un second tour en recueillant 73 voix au premier (contre 133 pour le Suisse), avant de se retirer. Depuis, Blatter a dû renoncer à son poste à cause du scandale qui ébranle la FIFA, ce qui a rendu nécessaire l'élection de vendredi.

Cette fois-ci, contrairement à mai, les chances du prince jordanien paraissent infimes face aux deux grands favoris, le cheikh bahreïni Salman, président de la Confédération asiatique (AFC), et l'Italo-Suisse Gianni Infantino, secrétaire général de l'UEFA.

Salman est appuyé par l'Asie et l'Afrique, Infantino par l'Europe et l'Amérique du Sud, ainsi qu'une partie de l'Amérique du Nord (l'Union centre-américaine, regroupant sept fédérations). Les autres fédérations d'Amérique du Nord et l'Océanie n'ont pas officialisé de consigne de vote.

C'est pourquoi l'activisme procédural du prince Ali à quelques jours du scrutin ressemble à un baroud d'honneur, d'autant qu'il coïncide avec celui de Champagne.

Le Français a dénoncé lundi devant la commission électorale de la FIFA le trop grand nombre « d'observateurs » de l'UEFA et de l'AFC accrédités pour le congrès. Il soupçonne ces invités d'agir en tant que lobbyistes afin de faire campagne jusqu'à la dernière seconde pour Infantino et Salman.

Deux poids lourds face auxquels le dernier des cinq candidats, l'homme d'affaires sud-africain Tokyo Sexwale, semble lui aussi promis à faire de la figuration, comme Ali et Champagne.

Quel que soit le futur président de la Fifa, il aura bientôt de la lecture : une biographie autorisée de Blatter, signée par un ancien porte-parole, sortira en mars en allemand, avant une version anglaise prévue en juin.