MONTRÉAL – La performance de Ballou Tabla à Halifax risque de raviver les discussions au sujet de ce joueur polarisant qui avait quelque peu sombré dans l’oubli cette saison chez le CF Montréal.

Outre trois apparitions avec l’équipe nationale des moins de 23 ans au mois de mars, Tabla n’avait pas été vu sur un terrain en 2021. Au club, on expliquait son absence par une blessure à l’aine qui tardait à guérir.  

Mercredi soir, alors que le Club de Foot était en Nouvelle-Écosse pour y disputer les quarts-de-finale du Championnat canadien, le jeune milieu de terrain est entré dans le match comme substitut au retour de la mi-temps. Il s’agissait de sa première apparition dans l’uniforme montréalais depuis le 24 octobre 2020.

Son retour a fait grand bruit. Au terme de 45 minutes d’un effort collectif peu inspirant, Tabla a signé un coup d’éclat en marquant deux buts en l’espace de trois minutes, délivrant son équipe en lui offrant une victoire de 3-1.

« Je travaille fort à l’entraînement et je veux continuer à prouver à l’entraîneur que je peux aider l’équipe », a déclaré Tabla après la rencontre.

Mais quelles attentes doit-on entretenir envers cette ancienne pépite qui ne suit plus depuis longtemps la courbe de progression espérée et qui arrive dans un groupe qui affiche une forme splendide et qui est engagé dans une lutte relevée pour une place en séries?

« Constance et persévérance, a répondu du tac au tac l’entraîneur Wilfried Nancy au lendemain du doublé salvateur de Ballou. Il nous a aidés à gagner ce match-là, donc je suis content pour lui. Maintenant, Ballou, comme je l’ai dit auparavant, c’est un joueur qui a du talent, mais il doit être constant. Et c’est son objectif. Est-ce qu’il est capable d’être persévérant, d’être constant dans les moments difficiles comme dans les bons moments? »

Au CF Montréal, et anciennement à l’Impact, l’histoire de Tabla est celle d’un potentiel qui n’a pas été atteint et de rêves qui demeurent inassouvis. À sa saison recrue en MLS, en 2017, il s’était retrouvé confronté à un dilemme sur le choix de l’équipe nationale qu’il allait représenter. Celle du Canada lui faisait de l’œil, mais les membres de sa famille souhaitaient le voir garder son admissibilité pour celle, beaucoup plus puissante à l’époque, de la Côte d’Ivoire, son pays natal.

Tabla était alors considéré comme l’un des beaux espoirs du soccer canadien. Son nom était mentionné dans les mêmes discussions que le jeune Alphonso Davies, qui évoluait avec les Whitecaps de Vancouver. Davies brille aujourd’hui au Bayern Munich et est la vedette incontestée de la sélection nationale canadienne. Tabla n’a été convoqué que pour deux matchs par le sélectionneur John Herdman. C’était il y a trois ans.

Il y a aussi eu cet épisode fort médiatisé de transfert au FC Barcelone, qui avait été précédé d’une mésentente acrimonieuse entre le joueur et les dirigeants de l’Impact. Tabla a finalement joué une quinzaine de matchs en deuxième division espagnole avant de revenir au bercail.

Aujourd’hui âgé de 22 ans, Tabla tente de refaire son nom et de sortir de l’ombre dans lequel bûchent les joueurs de banc. Sa récente sortie est encourageante, mais la pire erreur pour lui serait de s’asseoir sur cette performance et de s’attendre à ce qu’elle lui vaille une quelconque garantie pour les semaines à venir.

« Les comparaisons à l’époque, c’était il y a longtemps. Maintenant, avec Ballou... il n’y a plus de comparaisons! », a commenté Nancy, d’une honnêteté tranchante, jeudi.

« C’est un joueur qui doit vivre ce moment-là et qui doit progresser. Oui, c’est un joueur qui a montré du talent. Mais encore une fois, Ballou sait pertinemment que les attentes, c’est bien, mais au bout d’un moment, il n’y a plus d’attentes. Et ce n’est pas une question d’âge. On peut avoir 22 ans et on peut progresser à tout âge. Le meilleur exemple, c’est Victor Wanyama, qui est âgé et qui, je trouve, a progressé cette année. Encore une fois, c’est savoir persévérer. Le métier de footballeur n’est pas facile. Il y a toujours des attentes, mais après il faut être professionnel dans le bon sens du terme. »

« Ça ne veut pas dire que Ballou n’a pas été professionnel, a précisé Nancy. Mais être professionnel, ça demande beaucoup de travail, beaucoup de rigueur et même quand c’est difficile, c’est de persévérer. On s’attend tous à ce qu’il continue de progresser comme il le fait, mais qu’il oublie le passé et qu’il se concentre sur ce qu’il est en train de faire maintenant pour qu’il n’y ait plus d’attentes, mais qu’il agisse. Voilà ce que j’attends de lui. »