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RÉSULTATS

RDS au Qatar : un vendredi sacré

Souq Waqif un vendredi matin Souq Waqif un vendredi matin. - Getty
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DOHA, Qatar – Le gigantesque City Center Doha Mall est pratiquement désert. L'accès à ses boutiques est bloqué par une grille en accordéon ou encore une grande porte vitrée. Son stationnement intérieur ne pourrait être plus vide.

À la station de métro Msheireb, où convergent les lignes rouge, verte et jaune – pensez à Berri-UQAM, mais sans l'odeur d'urine et les interruptions de service – les gardiens qui assurent la sécurité et les bénévoles qui vous indiquent gentiment le chemin vers la sortie sont en supériorité numérique sur les usagers dans un ratio d'environ 3:1.

À l'extérieur, la rue Wadi Msheireb est complètement vierge. On tourne sur Al Asmakh, qui mène à la mosquée Al Shouyoukh et au Palais princier. Pas un chat, si ce n'est un sympathique policier qui nous demande gentiment de faire demi-tour.

Une ville toujours confinée? Une pluie diluvienne? Une attaque de zombies qui n'a pas fait de survivants?

Non, juste un vendredi matin comme un autre à Doha. La planète au complet a beau converger vers le Qatar, le début du week-end reste réservé à la prière dans ce pays dont 78% des résidents sont fidèles à l'Islam.

Les Musulmans prient cinq fois par jour. « Mais le vendredi, pour nous, est comme un jour sacré », m'explique M'hamed El Aichi, un Marocain d'origine qui est journaliste et producteur pour la branche anglophone de la chaîne Al Jazeera à Doha.

Chaque vendredi, les croyants se mettent sur leur 36 et suspendent leurs activités quotidiennes pour se rendre à la mosquée. « Ce n'est pas différent des Chrétiens qui vont à l'église à chaque dimanche », compare M'hamed. Ils y sont accueillis par un imam, qui commencera la cérémonie par le khutbah, un sermon qui peut durer jusqu'à une heure. Suivra la Salatul-Jumu'ah, la prière du vendredi, qui remplacera la prière habituelle du midi (Dhohr).

« La prière elle-même peut durer une à deux heures. Mais les gens ferment leurs boutiques quelques heures avant et une fois que tout est terminé, ils retournent à la maison pour manger, faire une sieste et se reposer. Puis vers 15h ou 16h, tout le monde reprend son train-train quotidien », éclaircit notre interlocuteur.

Deux jours avant le match inaugural de la Coupe du monde, le vide laissé par ce rituel religieux n'est nulle part plus évident qu'au Souq Waqif, le principal marché à ciel ouvert de la capitale. Ses étroits et sinueux corridors de pierre, où des dizaines de marchands exposent leur inventaire d'épices, de parfums et d'étoffes colorées, sont sombres et sans vie. Vers 13 h, les terrasses restées ouvertes aux visiteurs sont encore majoritairement délaissées. La place centrale, qu'on devine grouillante et bruyante en d'autres circonstances, est complètement exposée aux chauds rayons du soleil.    

On prend un peu d'ombre dans l'attente d'un plat de couscous quand la place commence à retrouver son pouls. Sur la passante rue Al Souq, des créateurs de contenu argentins placent un mini filet et sortent un ballon qu'ils s'amusent à distribuer aux passants dans l'espoir que leur passe devienne décisive. Certains locaux boudent leur plaisir, mais la plupart jouent le jeu. Des partisans équatoriens viennent ajouter leurs chants à la partie improvisée. Pour la première fois en trois jours, on se sent véritablement dans un authentique et joyeux rassemblement de fous du foot.  

Pour digérer, on va faire un tour sur la Corniche, ce croissant de bitume qui borde la baie sur une distance de sept kilomètres. À notre première visite, deux jours plus tôt, son extrémité nord était orpheline de visiteurs. Cette fois, il y a un début de foule. Des locaux, principalement, viennent prendre la pose près des dhows, ces bateaux de bois traditionnels sur lesquels on vous emmène faire un tour pour 100 riyals (environ 35$ canadiens), avec comme arrière-plan le spectaculaire étalage de gratte-ciel sur l'autre rive.

Tout autour, une quantité quand même curieuse de partisans Argentins qui ne sont clairement pas argentins et de supporters brésiliens qui ne sont clairement pas Brésiliens. Serait-ce une mise en scène? Après tant d'heures à cuire au soleil, la question ne nous émeut pas plus que la réponse nous importe.

On rentre en se disant que demain, on parlera finalement de soccer. Rentrée au Qatar après sa victoire contre le Japon à Dubaï, l'équipe canadienne doit reprendre l'entraînement samedi matin. On y sera!