MONTRÉAL – Anthony Jackson-Hamel s’est ouvert comme rarement on l’avait vu s’ouvrir mercredi lors du bilan de fin de saison de l’Impact. Et absolument tout dans sa gestuelle permet de croire qu’il s’est retenu pour ne pas en dire plus.

 

Au terme d’une campagne au cours de laquelle il n’a été titularisé qu’à six reprises, l’attaquant de 25 ans s’est adressé aux médias sur un ton qui s’apparentait davantage à la résignation qu’à la frustration. Annoncer qu’on ne le reverra plus dans le maillot de l’Impact est une ligne qu’il n’a pas osé franchir, mais à la lumière de ses propos, il est de plus en plus difficile de l’imaginer revêtir son numéro 11 au Stade Saputo la saison prochaine.

 

« Je suis un peu dans la même situation que l’année passée, dans le sens que si ce n’est pas ici, ça va être ailleurs, a statué celui qu’on a surnommé le Bombardier de Limoilou. Il me reste une année de contrat, donc ça reste à voir comment ça va être géré. Mais je pense qu’à un moment donné... s’ils ne veulent pas me faire jouer, je ne peux pas rester chez moi et attendre. »

 

Une fracture évidente existe entre Jackson-Hamel et l’entraîneur-chef Rémi Garde. D’un côté, un joueur qui considère avoir été privé des opportunités que commandaient ses performances passées. De l’autre, un gestionnaire aux principes rigides qui est aux commandes d’une méritocratie qui a tassé le Québécois dans la marge.

 

« Je ne veux pas faire de grosses histoires, mais je pense qu’avec la saison que j’avais eue l’année passée, j’avais de plus grandes attentes quant à la confiance qu’on allait m’accorder, a bien expliqué Jackson, qui avait marqué neuf buts et ajouté quatre passes décisives en seulement 21 matchs en 2017. Je ne voulais pas qu’on me fasse jouer à tout prix, même si je n’étais pas bon. Mais dans la tâche, je pensais qu’on avait compris dans quoi j’étais bon, à quoi je servais et à quoi on pouvait s’attendre de moi. D’un côté, je pense que ça a été mal exploité et de l’autre, je ne cache pas que j’ai ma part de responsabilités aussi. »

 

Blessé lors du camp d’entraînement, Jackson-Hamel a dû attendre au mois d’avril avant de faire son entrée dans la formation partante. Il n’a disputé que 55 minutes dans une défaite de 4-0 en Nouvelle-Angleterre. « Ma blessure a retardé mon processus d’intégration au groupe, réalise-t-il. C’était un nouveau groupe, il fallait créer une chimie, c’est quand même complexe. Mais par la suite, je pense que des deux côtés, il y a eu des petites erreurs de gestion. »

 

Le 1er mai, Jackson-Hamel a été publiquement pointé du doigt par Garde, qui se disait insatisfait de l’ardeur au travail de ses réservistes. Quelques jours plus tard, il répondait en marquant ses deux premiers buts de la saison. Il allait être titularisé dans trois des cinq matchs suivants, mais au début juin, après une victoire contre le Dynamo de Houston, le diplômé de l’Académie est retourné dans les mauvaises grâces du coach.

 

« Ça, je trouve que ça a été un point tournant dans ma saison, identifie AJH avec le recul. Je n’ai pas trop compris pourquoi, on m’a dit qu’on n’était pas satisfait de ma performance. Mais après, sur les 34 matchs cette année, est-ce que tout le monde a eu des bons matchs? Je pense qu’il y a des gars qui ont eu des hauts et des bas et qui ont quand même été présents dans l’alignement partant. Des fois, ce sont des petits trucs comme ça qui font que... est-ce que t’as envie de t’arracher le cœur pour une cause? T’es face à un mur, en fait. »

 

Jackson affirme que deux autres blessures ont marqué sa saison, mais rien pour justifier sa présence dans les gradins pour 12 des 14 derniers matchs du calendrier.

 

« Je trouve ça décevant, oui, mais surtout pour les fans et le peuple ici. Il y a des bons jeunes ici, mais des fois c’est dur pour nous de faire notre place. On travaille fort. Je peux dire que tous les gars ici, les Québécois, on en parle souvent. On a souvent l’impression que c’est un peu plus dur pour nous de faire notre place et même quand tu arrives à faire ta place et à prouver ce que tu peux faire, on dirait que ce n’est pas encore assez. Des fois, c’est dur mentalement de toujours arriver avec la bonne mentalité jour après jour à l’entraînement, après tout ça. Des fois ce n’est pas facile. »

 

L'Impact mise sur la continuité

Les fissures dans la relation entre Jackson-Hamel et Garde semblent irréparables, la rencontre de fin d’année entre les deux hommes ne permettant pas de restaurer le pont qui s’est affaissé dans le précipice qui les sépare. « Je pense que les deux, on savait comment cette rencontre allait se passer. Il n’y a pas eu de gros débat. On a juste confirmé quelques affaires et c’est tout », a révélé le joueur.

 

Lorsqu’on lui a demandé s’il préférerait une séparation complète du club ou un changement de décor temporaire sous forme de prêt, Jackson a répondu : « Ça dépend du projet de jeu dans le futur. J’ai parlé avec l’entraîneur et je pense que le style de jeu qu’on joue, ce n’est pas nécessairement un style avec lequel je suis compatible. [...] Ce n’était pas du tout ce que j’envisageais, surtout avec la saison dernière, mais il y a des trucs qui se sont passés qui font en sorte que maintenant, ça va être compliqué. »​