MONTRÉAL – Cameron Porter a vite compris comment se faire des amis à Montréal.

En mars dernier, moins d’un mois après avoir signé son premier contrat professionnel, la jeune recrue marquait l’histoire de son nouveau club en enfilant un but dramatique qui propulsait l’Impact en demi-finale de la Ligue des champions. Du coup, il devenait probablement le choix de troisième ronde jouissant de la plus grande célébrité instantanée dans l’histoire de la MLS.

La malchance l'a empêché de donner suite à ses exploits sur le terrain. Deux semaines plus tard, il se déchirait le ligament croisé antérieur du genou gauche sur le terrain du Revolution de la Nouvelle-Angleterre. Sa saison était terminée.

Le chemin du retour a été long et cahoteux, mais loin des projecteurs, Porter a continué d’impressionner. En plus de se dévouer sans tricher à sa remise en forme, il a plongé le nez dans ses livres pour terminer des études en sciences informatiques à la prestigieuse université Princeton. Il a passé son dernier examen une semaine avant le début du camp d’entraînement et se croise maintenant les doigts en attendant d’en connaître les résultats.

Lorsqu’il a vu que ses deux objectifs étaient en voie de se réaliser, Porter a pris de nouvelles résolutions. Lors du congé de l’Action de grâce américaine, réalisant qu’il avait soudainement plus de temps libre qu’il avait l’habitude d’en avoir, il s’est procuré un logiciel d’apprentissage du français et s’est initié à la langue de Zidane, Henry et Drogba.

« Plus d'équilibre dans l'équipe »

« Il n’existe pas de programme pour le français québécois, alors c’est plus difficile! Mais quand je regarde Netflix, j’essaie d’écouter des films en français. J’ai d’ailleurs besoin de recommandations, si vous en avez! »

Mardi, seulement deux mois après sa première leçon, Porter s’est avancé timidement devant les caméras, la rougeur de ses joues trahissant sa nervosité, et a livré sa première entrevue dans la langue maternelle de sa ville d’adoption. Ses propos ont été franchement impressionnants mais, plus important encore, très rassurants.

« Je suis 100% avec le genou. C’est bon et je suis très heureux, juste d’être ici et de jouer avec l’équipe encore », a lentement fait savoir l’Américain de 22 ans avec un sourire un peu crispé par l’effort.

Porter a foulé le terrain avec un appareil orthopédique au genou, mais a vite dissipé les inquiétudes.

« Même s’ils sont assez solides pour me permettre de jouer, les ligaments ont besoin d’une année complète pour guérir complètement. Mais tout est parfait. J’ai passé mes examens médicaux et les médecins étaient très impressionnés. Le genou est très solide. »

Voilà une nouvelle que le personnel technique de l’Impact a dû accueillir avec soulagement. Parce que Porter semblait progresser en accéléré avant de se blesser et aussi parce que personne n’a oublié son but miraculeux contre Pachuca, rarement un joueur comptant 39 minutes d’expérience en MLS n’est arrivé à son deuxième camp d’entraînement avec autant d’attentes sur les épaules. Avec l’incertitude entourant la disponibilité de Didier Drogba et l’absence d’un autre attaquant établi derrière la star ivoirienne, Porter se dessine par la force des choses comme une option de choix pour l’entraîneur-chef Mauro Biello à six semaines du début de la saison.

Le principal intéressé réalise que les partisans de l’équipe attendent probablement son retour au jeu avec une impatience qui détonne avec l’étendue de son expérience, mais dit ne pas se sentir étouffé par les standards qu’il a établis avant de tomber au combat.

« La seule pression que je ressens, c’est celle de me dépasser pour répondre à ces attentes. Mais la poursuite de cet objectif est quelque chose qui me plaît beaucoup », affirme celui qui est demeuré dans la métropole pour presque toute la durée de sa guérison.

« Le processus de remise en forme s’est avéré être le plus grand défi de ma vie. Pendant six mois, je me suis levé tôt et je suis arrivé au terrain avant tout le monde pour subir de cinq à six heures de traitements. Ensuite, je retournais à la maison pour étudier jusque tard dans la nuit. Ça a été les moments les plus intenses de toute ma vie. J’en suis ressorti grandi et aujourd’hui, quand je regarde les défis qui se présentent à moi, ils m’apparaissent plutôt minuscules. »

La prudence est de mise

Même s’il reconnaît le « grand caractère » de son jeune attaquant qu’il décrit comme « un garçon extraordinaire », Biello n’a pas l’intention de précipiter la réinsertion de Cameron Porter dans les plans de l’équipe.

« On ne veut pas aller trop vite avec lui. Il a eu une blessure très sérieuse et il y a des étapes qu’il doit atteindre avant de vraiment commencer à aller à 100%. On est content de sa progression et tranquillement, on va l’encadrer pour en arriver à la meilleure conclusion. Mais on ne veut pas le pousser trop vite parce qu’on a déjà vu que des blessures comme ça peuvent arriver une autre fois. Il faut faire attention. »

Trois attaquants étaient présents pour le début du camp d’entraînement de l’Impact. Outre Porter, on y retrouvait le Québécois Anthony Jackson-Hamel et le Jamaïcain Romario Williams, le tout premier choix de l’équipe au repêchage de 2015. Le vétéran Dominic Oduro, principalement utilisé à l’aile et auteur de huit buts la saison dernière, est une autre carte que Biello peut sortir de son jeu si le besoin s’en fait sentir.

« Ce sont de jeunes attaquants qui vont avoir des minutes et l’occasion d’aider cette équipe, laisse présager Biello. L’an dernier, Porter avait assez bien fait au camp d’entraînement pour mériter son temps de jeu. Ça va être le message qu’on va donner à ces joueurs. Si tu joues bien, tu vas avoir des minutes. C’est une longue saison, il faudra aussi gérer Didier… Ils vont avoir des minutes. »

C’est une entente qui fait le bonheur de Porter. Pour l’heure, l’auteur du plus gros but de l’histoire de l’Impact se soucie peu de la place qu’il occupe sur l’échiquier de l’équipe.

« Présentement, je suis juste heureux de pouvoir m’entraîner et honnêtement, je ne me soucie aucunement des plans de Mauro. Peu importe ce qu’il décidera, j’ai confiance en ses décisions. Pour l’instant, je n’ai jamais autant aimé pratiquer! »