C’est congé d’entraînement en ce vendredi après-midi à Las Vegas. Près de la piscine de l’hôtel où personne ne se baigne, certains joueurs se lancent des défis au tennis de table. D’autres sont sortis arpenter les trottoirs d'un grand boulevard de la ville. Cette pause semble bien accueillie par un groupe fort occupé par la charge de travail du camp d’entraînement. C’est également le moment choisi par le nouvel entraîneur de l’Impact pour s’entretenir avec moi de façon moins formelle qu’en mêlée devant les caméras.

 

Rémi Garde affiche un air serein. Celui qui a dû faire la navette quelques fois entre l’Europe et l'Amérique depuis son embauche par l’organisation montréalaise ne semble pas trop affecté par le décalage horaire. « Ça va, je suis surtout réglé sur l’heure de Montréal. » L’ancien Gunner se qualifie lui-même de lève-tôt, mais il prévoit néanmoins faire l’impasse sur le derby londonien disputé samedi matin entre Tottenham et Arsenal (4:30 heure de Las Vegas). « Alors là, ça ne va pas être possible. »

 

À vrai dire, Garde semble avoir peu de temps et d’énergie à consacrer aux résultats de Premier League. Le premier match de son aventure avec l’Impact de Montréal pointe à l’horizon (samedi 23:00 contre Las Vegas Lights FC). Il est clair que Garde se servira de l’expérience pour obtenir certaines réponses. Bref, ce n’est pas le temps de décrocher. Après tout, il ne faut pas oublier que c’est pour ça qu’on est venu au Nevada. 

 

Un groupe pour passer à la vitesse supérieure

 

Bien qu’on ait commencé à mettre l’accent sur les aspects tactiques durant cette portion du camp, l’objectif prioritaire de Garde consiste toujours à « former un groupe » avec lequel il pense pouvoir lutter cette année. Et les joueurs n’ont pas fini de courir et d'effectuer des exercices de pliométrie. « J’insiste encore beaucoup sur le physique. Après tout, le foot c’est de la course avec le ballon. Partout, dans les championnats, neuf fois sur dix, ceux qui courent le plus ont de meilleurs résultats. »

 

« Garde aime assurément la bonne condition physique! »

Si Garde apprécie que les joueurs nord-américains aient tendance à avoir une plus grande écoute et une grande soif d’apprendre, il ne se gêne pas pour reprocher à certains de ne pas afficher assez d’ambition. « Les jeunes sont parfois trop gentils. Sur le terrain, il n’y a pas d’âge, que je leur dis. Au début du camp à Miami, [durant le physique] c’était Nacho toujours devant… Mais attends, ce n’est pas normal. »  

 

Se rappelant ses premiers pas chez les professionnels avec l’Olympique lyonnais, il partage une anecdote: « Quand j’ai commencé comme joueur avec [Raymond] Domenech, au départ, les vieux ne nous laissaient pas passer. Du coup, Domenech a arrêté la séance puis a dit au groupe d’arrêter de ralentir les jeunes. Et voilà, on est passé et on est parti comme des chevaux… »

 

Passer à la vitesse supérieure, c’est aussi ce que Garde aspire à faire avec l’Impact de Montréal. « Quand Joey [Saputo] est venu me chercher, il m’a expliqué qu’il avait comparé ce qu’il avait vu à Bologne avec ce qu’il avait dans son club MLS. On parle du personnel, du service médical, de l’académie, etc. Et il m’a dit qu’il désirait faire passer l’Impact à cet autre niveau, à une vitesse supérieure. Je ne suis pas venu ici avec une intention de tout changer. Mais j'avais l'habitude de travailler d'une certaine façon à Lyon. Et j'ai appris à Aston Villa qu'on a besoin d'avoir tout le monde avec soi qui va dans la même direction. »

 

Plan de cinq ans et besoins à court terme

 

Le discours de Garde est cohérent et le ton est très posé. Or, on ne peut faire autrement que de se demander si les éléments sont tous réunis pour arriver à atteindre l’objectif visé. « Pour le plan de cinq ans, il est vrai qu’on a déjà brûlé une cartouche. On ne peut pas toujours recommencer et ajouter une année [à la fin]. »

 

Quels sont donc les besoins actuels de l’Impact? « J’ai besoin d’un défenseur central, d’un milieu, et d’un attaquant. » Bref, c’est toute la colonne vertébrale de l’équipe que Garde désire renforcer. Le nouveau pilote montréalais déplore encore la blessure qui n’a pas guéri de Kyle Fischer. « Au milieu, j’aimerais bien un autre box-to-box, un autre Saphir! » Et pour ce qui est de l’attaque, pas de noms mentionnés, mais on semble en quête d’un profil qui serait différent de ceux de Jackson-Hamel et Mancosu. 

 

« En janvier, ce n’est pas facile d’aller chercher des joueurs, car les clubs sont réticents à les laisser aller. En juin, la situation change avec les joueurs qui n’ont plus qu’un an à leur contrat. » Bref, l’incertitude plane quant à la date d’arrivée des renforts souhaités. « Ça pourrait être maintenant ou en été. On verra comment ça se passe dans les premiers matchs. »

 

« J'ai pris beaucoup de maturité depuis 2 ans »

De nombreux dossiers à gérer et une nouvelle ligue avec laquelle faire connaissance. Garde ne manque pas de pain sur la planche. « C’est vrai que j’ai passé beaucoup de temps à regarder des joueurs qui m’intéressaient et un peu moins à analyser des matchs de MLS. J’étais à la finale entre Toronto et Seattle. J’ai été déçu de la performance offerte pas les Sounders. De ce que j’ai vu dans les matchs, les joueurs courent beaucoup, ils ont envie, mais ça va souvent dans tous les sens. On va essayer d’organiser. » 

 

Beau projet. Or, le nouvel entraîneur montréalais ne semble pas effrayé par l’ampleur de la tâche. Et pas question de se reposer pour le moment: « Quand je travaille, j’arrive à rester vraiment concentré sur mon projet. Je peux faire un an, deux ans, ça va. Mais après trois ans à Lyon, j’étais brûlé. Je voyais ma femme partir avec les enfants en vacances. Moi, je repartais sur une préparation. Déjà, ça m’avait affecté alors que j’étais joueur. Je suis très famille. J’aime aussi la vie sociale. Après trois ans à l’OL, j’étais fier de ce qu’on avait fait, mais j’avais besoin de me ressourcer, de faire le break. Sauf qu’après six mois, l’envie revient rapidement… »

 

Tiens, une envie qui revient rapidement... Ça va faire seulement trois mois qu'ils n'ont pas vu leur équipe jouer, mais les partisans de l'Impact devraient partager ce sentiment. Comme les échéances approchent, pour Garde et ces mêmes partisans, le match contre Las Vegas sera la première occasion de voir où on en est avec le chantier.