JEU DE PRÉDICTIONS

 

Que cela plaise ou non, l’équipe de France partira favorite de la finale contre la Croatie. Quels sont les aspects à exploiter pour que la bande à DD vienne à bout de cette formidable formation à damier? Comment la Croatie peut-elle tirer quelques kilomètres de plus d’un réservoir qu’on croyait asséché à plus d’une reprise en phase éliminatoire? Une finale, ça se gagne, paraît-il. Mais encore faut-il avoir un plan tactique pour y arriver. Voici ce sur quoi ça pourrait se décider.

 

Mbappé sur les traces de Sterling

 

Kylian Mbappé sera dur à arrêter. Et à plus forte raison s’il a le ballon. La vitesse de l’attaquant français est certes une source de soucis pour les Croates. Plus rarement testés sur cet aspect par l’adversaire qu’on ne pourrait le penser, les Strinic, Vida et Lovren auront tout de même bien contrôlé les appels en profondeur du rapide Raheem Sterling en demi-finale contre l’Angleterre. Or, le manque de lucidité et de qualité technique de Sterling aura souvent aidé la cause des Croates tandis que la capacité d’anticipation de Vida et les fautes tactiques de Lovren auront suffit à couper les liens entre Sterling et ses partenaires anglais. 

 

On peut toutefois croire que la tâche sera plus ardue face à Mbappé, lui qui connaît un bon tournoi. À titre d’exemple, on retient évidemment ses deux buts contre l’Argentine, mais il ne faudrait pas oublier les attaques rapides et les passes précises générant des occasions pour ses partenaires contre la Belgique. Autrement dit, il y a chez Mbappé des qualités supérieures aux autres menaces rencontrées par les Croates lors du tour éliminatoire.

 

Que fera donc Zlatko Dalic? L’entraîneur croate n’est pas du genre à jongler avec sa ligne arrière. Après le quart de finale contre la Russie, on croyait avoir perdu Sime Vrsaljko sur le flanc droit de la Croatie. Or, à la surprise générale, Vrsaljko s’était suffisamment rétabli pour affronter les Trois Lions en demi-finale. Mais c’était au tour de son collègue du côté gauche Ivan Strinic de tomber au combat durant les prolongations. Sur papier, Strinic devrait normalement être le titulaire pour se mesurer à Mbappé. Malgré les miracles accomplis par les thérapeutes croates dans les derniers jours, il ne faudrait toutefois pas s’étonner si on était forcé de le remplacer. 

 

Dans un tel cas, Josip Pivaric aurait la lourde responsabilité de surveiller le véloce attaquant français. Pivaric a des qualités pour attaquer, mais il possède moins d’assurance dans la phase défensive. On se souviendra de sa faute de main maladroite en prolongation contre la Russie, laquelle avait mené à l’égalisation de Mario Fernandes sur le coup franc subséquent. De son côté, Deschamps fera tout pour ne pas dévoiler trop tôt son jeu. Mais les Croates n’auront pas besoin d’envoyer un espion dans le vestiaire adverse pour comprendre la consigne numéro 1: « Donnez le ballon à Mbappé ».

 

Maîtres du ballon et du tempo?

 

La force des Croates demeure son milieu de terrain. Contre l’Angleterre, Dalic avait opté de renforcer son duo Modric-Rakitic avec la présence du demi défensif Marcelo Brozovic. Il y a fort à parier que cette disposition sera reconduite en finale contre les Bleus. Avec Brozovic pour couper l’alimentation vers Antoine Griezmann, on risque d’avoir un affrontement entre les deux fabricants de jeu croates et la paire Pogba-Kante de l’autre côté. Si physiquement, l’avantage va aux Français, c’est probablement l’inverse quand les Croates ont possession du ballon. Même quand ça bouge lentement, il faut se méfier des changements d’ailes de Rakitic et de la fine circulation du ballon au sein du bloc adverse de Modric. Selon certains, les Anglais ont perdu le contrôle du match à force de faire la navette entre la gauche et la droite du terrain.

 

Avec son vécu de milieu récupérateur et son pragmatisme comme entraîneur, on imagine déjà que Didier Deschamps demandera à Blaise Matuidi d’aider ses coéquipiers au coeur du milieu terrain. Mais il faudra aussi que Matuidi s’occupe de freiner les montées du latéral droit Vrsaljko, celui qui avait centré le ballon sur le but égalisateur d’Ivan Perisic contre l’Angleterre et qui était à l’origine du but de Mandzukic contre le Danemark. En bon soldat, Matuidi s’était très bien acquitté contre la Belgique de sa mission de bloquer Kevin De Bruyne quand celui-ci décalait sur le côté droit. Contre la Croatie, les ordres du petit caporal - c’est-à-dire Deschamps - n’auront qu’à être claires: empêcher Vrsaljko d'être un facteur.

 

Or, c’est sur l’autre flanc que le stratège français pourrait avoir des soucis. Benjamin Pavard dispute une belle Coupe du monde, mais il demeure la cible la plus prenable pour les attaquants croates. Autant l’Anglais Kieran Trippier faisait un match formidable en première mi-temps de la demi-finale, autant Ivan Perisic aura dominé le reste de la rencontre face au latéral droit de Tottenham. Le Cristiano croate - je pense à la gestuelle plutôt qu’aux statistiques - a deux buts et une passe décisive dans le tournoi mais également deux poteaux et quelques centres très dangereux. Trop souvent sous-estimé, ce Perisic a le don de marquer de gros buts contre des équipes favorites.

 

Défense aguerrie vs spécialiste des penalties

 

Si l’Équipe de France est en finale de cette Coupe du monde, c’est en grande partie parce que sa défense montre des signes de maturité. L’importance du tandem Raphael Varane - Samuel Umtiti se fait d’ailleurs sentir aux deux bouts du terrain. Marqueurs dans les deux derniers matchs des Bleus, les arrières centraux tricolores ont également très bien tenu Romelu Lukaku lors de la demi-finale, tout en étant premiers sur pratiquement tous les centres décochés par les Diables Rouges. C’est du solide, sans parler du rendement irréprochable du gardien Hugo Lloris devant la cage.

 

Or, l’arme pas si secrète dans le camp du pays des Balkans, c’est le gardien Danijel Subasic, déjà vainqueur dans deux séances de tirs de barrage lors du tournoi. Les statistiques de Subasic pour les penalties arrêtés lors des matchs sont également impressionnantes, lui qui sur l’ensemble de sa carrière empêche ses adversaires de marquer un tiers du temps. Bref, si la Croatie survit à 120 minutes d’angoisse contre les Bleus, elle n’aura pas de mal à voir la lumière au bout du tunnel. 

 

Au-delà de tout ça, c’est un facteur vestimentaire qui pourrait faire la différence en finale selon le journal Marca. En six matchs de Coupe du monde en Russie, les Bleus n’ont jamais porté deux fois la même tenue. Nous surprendront-ils avec une septième toilette pour le match de dimanche au Stade Loujniki? Carte de mode à ses heures, Paul Pogba n’a pourtant pas l’air d’avoir la tête à faire un défilé.  On se garde ça pour les Champs-Élysées?