MONTRÉAL - On a tous été un « p’tit cul » mordu de sport. Nos athlètes favoris aussi. Dans ce dernier segment qui leur est réservé, nos anciens joueurs nous parlent des célébrités qui ont croisé leur parcours et qui les ont forcés à se pincer pour s’assurer qu’ils ne rêvaient pas.

Pierre Vercheval : une bière avec Messier

Je vous ai déjà parlé de ma rencontre avec Barry Sanders au camp d’entraînement des Lions de Detroit. Mais ce n’était pas la première fois que je faisais connaissance avec une célébrité plus grande que nature.

En 1988, l’année de mes débuts dans la Ligue canadienne, les Eskimos d’Edmonton et les Oilers participaient à ce qu’on appelait le Carnaval des Champions, un événement qui servait à amasser des fonds pour les œuvres caritatives de la ville. Dans ce qui prenait la forme d’une grande foire, les joueurs des deux équipes participaient à toutes sortes de jeux. On pouvait se faire payer pour se faire appliquer une tarte à la crème en pleine figure ou encore pour s’asseoir sur un tremplin pendant qu’un partisan tentait de nous faire tomber à l’eau. Le concept, c’était qu’un joueur des Oilers était jumelé à un joueur des Eskimos. Ça ne faisait pas une semaine que j’étais arrivé avec l’équipe et imaginez-vous donc que je me retrouve à passer la journée avec Mark Messier.

C’était l’année où Wayne Gretzky venait de partir, alors c’était Messier le king en ville. Je m’étais présenté en l’appelant Monsieur Messier, ce à quoi il s’était gentiment opposé. « Mon nom, c’est Mark », qu’il m’avait dit. C’était drôle, parce qu’il n’y a pas grand-monde qui voulait payer pour que me voir tomber dans l’eau, tout le monde voulait voir Messier sur le tremplin. Quand Mark en avait assez, il me demandait d’aller prendre sa place, mais il avait été bon joueur. II m’avait invité à prendre une bière à la fin de la journée et m’avait laissé l’impression d’un gars très sympathique.

J’avais vécu quelque chose de similaire à mon arrivée dans l’organisation des Argonauts de Toronto. C’était l’époque où les propriétaires étaient Bruce McNall, Wayne Gretzky et John Candy. Quand j’ai signé mon contrait, bien des amis m’ont dit : « Hey, tu vas rencontrer John Candy! » Dans ma tête, je n’en faisais pas de cas, mais je me souviendrai toujours qu’à ma première pratique, le directeur général m’avait accosté et m’avait dit de le suivre. Il voulait me présenter le nouveau proprio. Quand je suis rentré dans son bureau, je capotais. On avait jasé comme deux vieux chums et j’étais sorti de là avec le sourire fendu jusqu’aux oreilles. Autant j’avais fait mon nonchalant quand la possibilité de le rencontrer m’avait été soulignée, autant c’est quelque chose qui m’avait marqué. Pendant toute la saison, c’était le seul propriétaire qui était là à tous les matchs. Ça n’avait pas été une grosse saison pour nous, mais après chaque match, il venait dans le vestiaire et serrait la main de tous les joueurs. C’est un gars qui était adoré. Et c’était une méga-star. Partout où les Argos allaient sur la route, si John Candy était avec l’équipe, c’était gros.

Martin Biron : intimidé par Stastny

Pour le petit gars de Québec que je suis, Peter Stastny était l’idole suprême. Nos chemins se sont croisés quelques fois, mais j’ai choké solide, deux fois plutôt qu’une à part ça, avant de prendre mon courage à deux mains et d’aller lui parler.

La première fois, c’était dans le vestiaire des Sabres après un match. On venait de jouer contre les Blues, c’était peu de temps avant les Jeux olympiques de 2002 à Salt Lake City. Peter s’occupait de la sélection de la Slovaquie et il était venu voir Miroslav Satan pour lui parler de la préparation. Quand je l’ai aperçu, je me suis torturé en me répétant qu’il fallait que j’aille le saluer, mais je n’y suis pas allé. Un an et demi plus tard, en 2003, je participais au Championnat du monde en Finlande. L’hôtel où logeaient les joueurs canadiens et les membres de leurs familles était le même qu’occupait l’équipe slovaque. Après leur victoire contre les Tchèques dans le match pour la médaille de bronze, les Slovaques faisaient la fête et mon père avait tenté de me convaincre d’aller aborder Stastny. Je n’avais pas trouvé le courage, j’avais figé. Mon père, lui, y était allé et avait parlé pendant une bonne quinzaine de minutes avec lui. En revenant, il m’avait dit qu’ils avaient parlé français et n’avait pas arrêté de me répéter à quel point il avait été gentil. Maudit que je m’en voulais!  

Temple de la renommée : Sundin bat Biron

Finalement, en 2014 ou en 2015, j’ai été invité à un match des anciens pour le Temple de la renommée à Toronto. Une fois sur place, je regarde la liste des joueurs qui font partie de mon équipe et je vois celui de Peter Stastny. Là, je me dis que je n’aurai pas le choix. Dans le vestiaire, il n’y avait littéralement que deux gars qui nous séparaient, mais je n’ai pas dit un mot. Ce n’est qu’une fois sur la glace que je suis allé le voir. Je lui ai dit qu’il était mon idole et que j’étais trop content de vivre cette expérience avec lui. Il m’a répondu : « Voyons Martin, j’ai suivi ta carrière, tu es un bon gardien et je savais que tu venais de Québec. » Je suis sur un nuage! Mais le match commence et Rick Vaive descend sur l’aile et me déjoue entre les jambes. Peter se lève du banc et vient m’engueuler, me dit que c’est un arrêt que je devais faire et qu’il faut que je sois meilleur que ça. J’ai trouvé ça tellement drôle. Clairement, je ne l’intimidais pas comme lui m’avait intimidé! On a fini par gagner le match et on a pris une bière ensemble après dans le vestiaire.

Bruno Gervais : en coulisses avec Bon Jovi

Ça m’avait fait quelque chose de me retrouver sur la même glace que Jeremy Roenick dans l’un de mes premiers matchs hors-concours. « JR », c’était déjà une grosse personnalité à l’époque. Dans ma tête, il était tellement grand et gros. On le voyait à la télé, il frappait tout ce qui bougeait, il était intense. Quand je suis arrivé contre lui, j’ai réalisé que j’avais peut-être surestimé un peu son gabarit. Son regard, par contre, avait fait son effet sur le jeune de 18 ans que j’étais.

Quelques années plus tard, à mes débuts avec les Islanders, une amie m’avait invité à un spectacle de Jon Bon Jovi.  Après le show, je m’étais retrouvé à prendre une bière avec Jaromir Jagr et Bon Jovi lui-même. On jasait comme trois gars qui jasent de la vie normalement. Tout le long de la conversation, dans ma tête, je ne pouvais pas m’empêcher de me dire que je n’avais pas rapport là!

Patrick Côté : un souvenir avec Kobe

Kobe Bryant et Patrick CôtéQuand je suis revenu dans mon coin entre le deuxième et le troisième round de mon combat contre Joe Doerksen, à l’UFC 52, je me suis appuyé contre le grillage en attendant que mes hommes arrivent et quand j’ai relevé la tête, j’ai vu Eminem, Dr. Dre et Cindy Crawford assis de l’autre côté de la cage. C’était assez bizarre. SI vous avez lu le premier texte de cette série, vous comprendrez qu’on était assez loin du Millenium de Laval! Je ne considère pas être une personne facile à impressionner. Généralement, je laisse le monde dans leur espace et ça m’en prend beaucoup pour m’exciter. Mais quand j’ai rencontré Kobe Bryant à New York, j’avais réalisé qu’il était une exception à la règle. J’étais là pour le retour de GSP, il était là pour faire la promotion d’une nouvelle boisson. J’avais passé la sécurité et je m’étais arrangé avec les dirigeants de l’UFC pour être capable d’aller à sa rencontre et de prendre une photo avec lui. Je n’aurais fait ça avec personne d’autre.

Maxime Talbot : une dédicace de Maximus

J’ai eu la chance de faire de belles rencontres dans ma carrière. J’ai croisé Leonardo DiCaprio, Justin Timberlake et Russell Crowe, avec qui j’ai passé quelques soirées. C’est lui qui m’a le plus impressionné. J’étais un grand fan du film « Le Gladiateur ». Russell m’avait envoyé un livre, The Four Agreements, de don Miguel Ruiz, qu’il m’avait signé de sa main. On est toujours demeuré en contact. Ce qui est le plus impressionnant avec des vedettes comme lui, c’est de réaliser que leur succès n’a rien à voir avec la chance. Ce sont généralement des gens qui travaillent fort et qui ont de bonnes valeurs.    

Denis Gauthier : Friends in Low Places

Ça m’est rarement arrivé de tomber en admiration devant un autre joueur de hockey. J’en ai croisé plusieurs pour qui j’avais un énorme respect, mais je savais mettre ça de côté pour faire mon travail. J’ai sonné les cloches de Wayne Gretzky et j’ai fait perdre la carte à Mario Lemieux. Ils avaient beau être des vedettes, j’avais un job à faire. Mais la personne qui m’a le plus impressionné, c’est le chanteur Garth Brooks.

J’adore la musique country, je joue de la guitare à mes heures et Garth Brooks est un artiste que j’admire beaucoup. À l’époque où je jouais, il avait une fondation qui s’appelait Teammates for Kids. Il avait des partenariats avec des athlètes professionnels et une fois par année, il donnait un spectacle privé pour ceux qui y contribuaient. J’étais allé assister à l’un de ces concerts un été à Las Vegas. Il payait l’hôtel pour tout le monde, il fallait juste s’occuper de notre billet d’avion. On était peut-être 150 dans une grande salle du Venetian, il y avait lui et Trisha Yearwood, qui est aujourd’hui sa femme. En plus du spectacle, il y avait un encan pour amasser des fonds pour sa fondation. Pour chaque dollar amassé, il doublait ou triplait la mise afin d’aider des enfants défavorisés à faire du sport. Une autre année, le spectacle avait eu lieu à son ranch à Nashville. J’ai encore ma photo avec lui à la maison et je me trouve chanceux parce que Garth Brooks, c’est une idole pour moi.

Marc Griffin : prêt pour un match de double

Je suis aux Jeux olympiques de Seoul en 1988. Un bon matin, je m’en vais déjeuner dans la cafétéria du village réservé aux athlètes. Je m’assoie à une table de huit où il reste quatre places de libre, sans nécessairement regarder qui s’y trouve déjà. Mon attention est surtout portée sur la file du buffet; j’essaie de voir s’il n’y a pas des gars que je connais. Je finis par reconnaître un de mes coéquipiers, Barry Parisotto, que j’invite à venir me rejoindre. Aussitôt installé, Barry me regarde et me dit : « As-tu fait exprès de t’asseoir ici? ». Je ne comprends pas sa question. Il me fait un signe vers les filles qui sont assises juste à côté : Steffi Graf et Gabriela Sabatini. Moi, l’étourdi, je n’avais même pas remarqué que j’étais en compagnie de deux des plus célèbres joueuses de tennis au monde. Ça avait été marquant. Les joueurs de baseball, c’est une chose, c’est impressionnant. Mais rencontrer ces deux athlètes qui à l’époque étaient au sommet de leur art, ça avait été assez intense.

Wandrille Lefèvre : la simplicité d’une icône

Didier Drogba a un magnétisme dont seules les personnes qui l’ont vu de près peuvent saisir la puissance. Vraiment, il a ce charisme que peu de gens possèdent. Quand il entre dans une salle, il occupe l’espace. La première fois qu’il a franchi le seuil du vestiaire de l’Impact, c’était au lendemain de la grande conférence de presse qu’il avait donnée au Stade Saputo, quelques jours après l’annonce de sa mise sous contrat. Avant ça, pour moi, Drogba n’était qu’un joueur plus grand que nature que j’avais vu souvent à la télé. Mais quand je l’ai vu en personne pour la première, j’ai vraiment saisi à quel point il n’est pas au même niveau que les autres. Et même aujourd’hui, plus de trois ans après son départ, le sentiment colle. Chaque fois que je le revois, je suis toujours frappé par cette réalité. Les projecteurs n’étaient pas sur lui que parce qu’il était nouveau. Les projecteurs sont toujours sur lui, peu importe ce qu’il fait, peu importe où il va. Mais malgré ça, dans sa manière de te traiter et d’interagir avec tout le monde, il reste la personne la plus simple de la planète.

Éric Bélanger : intimidé par le Tigre

J’étais jeune quand je suis débarqué dans la jungle de Los Angeles pour commencer ma carrière avec les Kings. Dans un restaurant de Manhattan Beach, où tous les joueurs de l’équipe habitaient, j’avais vu Tiger Woods. Encore à ce jour, je m’en veux de ne pas être allé le voir. Je me disais que tout le monde devait aller le déranger et je ne voulais pas faire ma groupie. Aujourd’hui, je regrette de ne pas m’être avancé, ne serait-ce que pour lui serrer la main ou lui demander pour une photo.

André Roy : jouer avec mes idoles

Vous me connaissez, je suis un boute-en-train, j’aime m’amuser. Mais que je suis arrivé à Boston pour mon premier camp d’entraînement, Cam Neely et Raymond Bourque me fascinaient au point d’en perdre mes moyens. Neely, même si j’avais été un partisan du Canadien et qu’il avait été une vraie bête noire pour mon équipe, était un joueur qui me fascinait. Je le trouvais tellement hot! Et avec Raymond, j’étais carrément gêné quand j’étais près de lui, trop gêné pour lui adresser la parole. C’est lui qui avait fait les premiers pas en s’avançant vers Charles Paquette et moi. Il nous appelait les « p’tits Québécois » et nous avait donné quelques conseils pour bien profiter de notre expérience.

Je pourrais aussi parler de mon match contre les Penguins de Pittsburgh lors de mon premier rappel dans la grande ligue, à 20 ans. C’était la première fois que je voyais Mario Lemieux en personne. Dans la période d’échauffement, je n’arrêtais pas de m’étirer le coup pour regarder ce qu’il faisait de l’autre côté de la ligne rouge. Si je n’avais pas regardé sa cassette « Mario le Magnifique » au moins cent fois, je ne l’avais pas regardé une fois. J’avais juste le goût de traverser et de lui faire un câlin! Je pense que j’ai fait quatre ou cinq présences sur la glace dans tout le match. Sur le banc, je n’avais d’yeux que pour le grand Lemieux. Il restait souvent près de la ligne rouge, donc il était pratiquement devant notre banc. Ne me demandez pas de vous parler du match, je ne regardais que lui.

Marc Denis : Raymond Bourque, l’étoile la plus brillante

Premier match de Raymond Bourque avec l'Avalanche

Le jour où l’Avalanche du Colorado a fait l’acquisition de Raymond Bourque, j’ai « pogné de quoi » comme on dit en bon Québécois. Pour moi, Bourque faisait partie de la légende, il était plus grand que nature. C’était un homme que je respectais au plus haut point. Là, il s’en venait avec notre équipe. J’avais beau être le deuxième gardien, il pensait qu’il avait une meilleure chance de finir sa carrière sur une belle note en venant avec nous. Quand il est entré dans le vestiaire pour la première fois, il y avait une aura qui l’entourait. Je crois qu’on était dans l’Ouest canadien quand la transaction a eu lieu. La journée était bizarre, comme si je ne réalisais pas ce qui se passait.. Environ deux semaines après son arrivée, on avait remporté quelque chose comme huit matchs de suite pour finir l’année. On avait eu besoin de quelques matchs pour s’apprivoiser, mais on avait l’impression qu’on était imbattable. On avait finalement perdu en sept matchs contre Dallas en finale de l’Ouest. Ce fut personnellement mes derniers moments avec cette équipe bourrée de talent. On avait un vestiaire fort avec les Sakic, Forsberg, Roy, Foote, Deadmarsh et Andreychuk. Mais pour moi, Raymond Bourque sera toujours la personne la plus impressionnante liée à ma carrière.

Matthieu Proulx : des moments précieux

J’ai de l’admiration pour ceux qui ont accompli de grandes choses, mais je ne vais pas jusqu’en perdre mes mots. Sincèrement, je n’ai pas ça en moi. Je me souviens de mon premier camp d’entraînement, quand Anthony Calvillo et Ben Cahoon étaient de l’autre côté de la ligne de mêlée. J’avais été frappé par leur grande chimie, ils étaient impressionnants dans leur façon de jouer ensemble. Dans ma deuxième carrière, je suis allé à Kansas City pour interviewer Laurent Duvernay-Tardif dans la semaine qui précédait le dernier Super Bowl. J’ai pu assister aux conférences de presse dans la deuxième rangée près des grands journalistes d’ESPN, de NFL Network et voir les joueurs défiler devant nous, un après l’autre, dans un cadre intime. Andy Reid, Travis Kelce, Tyreek Hill, Sammy Watkins, Pat Mahomes. Devant cette belle brochette, j’ai pris deux minutes pour réaliser où je me trouvais. C’était vraiment un privilège.