Le dernier chapitre du conflit russo-ukrainien, qui s'est amorcé le 24 février 2022 avec l'invasion de l'Ukraine sur ordre du président russe Vladimir Poutine, est rapidement devenu le sujet sur toutes les lèvres aux quatre coins de la planète.

À RDS, on ne prétend pas être des experts en géopolitique ou en relations internationales. Mais le sport n'est pas en vase clos non plus, et ce conflit - le plus important en sol européen depuis la Deuxième Guerre mondiale - amène un lot de réactions et de sanctions qui ont plusieurs impacts sur la planète sport.

On vous propose avec ce guide de garder une vue d'ensemble sur tous ces impacts. Pour plus d'informations, consultez notre dossier Guerre Russie-Ukraine. Pour les mises-à-jour plus globales sur la guerre Russie-Ukraine, on vous réfère à nos collègues de Noovo Info du côté francophone, ainsi que CTV News et BNN Bloomberg du côté anglophone.

Q. Que se passe-t-il en Ukraine présentement?

R. Le 24 février 2022, la Russie, sur ordre du président Vladimir Poutine, a amorcé l'invasion de l'Ukraine. Cette attaque est le fruit de plus de 30 ans de tensions entre les deux pays, soit depuis la proclamation de l'indépendance de l'Ukraine le 24 août 1991, dans la foulée de la dislocation de l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS), officialisée le 25 décembre 1991.

L'histoire de l'Ukraine a notamment été marquée par des gouvernements tantôt pro-russe, tantôt pro-occidental. En 2005, la révolution orange fait rage en Ukraine alors qu'une partie de la population dénonce l'élection truquée d'un président pro-russe. Le président élu Viktor Iouchtchenko est pro-occidental, et en faveur d'un rapprochement avec l'OTAN (Organisation du Traité de l'Atlantique Nord), dont 30 pays occidentaux sont membres, une menace certaine pour les pro-russes.

En 2013, le nouveau président ukrainien pro-russe Viktor Ianoukovitch, élu en 2010, s'éloigne de l'Union européenne en refusant de signer un accord d'association et de libre-échange. Cette décision entraîne l'année suivante de nombreuses manifestations pro-européennes, surnommées Euromaïdan, et mène à la "Révolution de la dignité". Après une répression sanglante, le président Viktor Ianoukovitch est éjecté du pouvoir et prend la fuite en Russie.

Dans la foulée des événements, la Russie envahit la Crimée, un événement qui avait fait les manchettes dans nos pages car il se produisait sensiblement en même temps que les Jeux olympiques de Sotchi. Les habitants de la péninsule votent à 97% en faveur du rattachement avec la Russie lors d’un référendum controversé. D’autres territoires de l’Est, dont le Donbass, déclarent être des républiques populaires et autonomes.

Le président actuel de l'Ukraine, Volodymyr Zelensky, est également pro-occidental et travaille à adhérer à l'OTAN depuis 2020. Poutine considère les Russes et les Ukrainiens comme un même peuple (son discours changera par la suite pour justifier son attaque de 2022), et voit dans ce rapprochement avec l'OTAN une menace certaine à sa sécurité nationale. Il supporte les mouvements pro-russe et accentue sa présence militaire dans l'est de l'Ukraine lors de la guerre du Donbass. La table était mise pour l'inévitable: l'invasion du territoire ukrainien.

Q. Quelles ont été les réactions à l'invasion de l'Ukraine par la Russie dans le monde du sport?

R. Une vague de dénonciations déferle rapidement partout sur la planète, et condamne l'action de Poutine tout en exigeant des sanctions exemplaires à la Russie.

La situation en Ukraine inquiète la planète sportive

La réaction des athlètes russes

L'action de la Russie met aussi des athlètes russes dans une position délicate. Dès le lendemain de l'attaque, Alex Ovechkin s'est contenté de dire qu'il ne faisait pas de politique, une position qui a amené Dominik Hasek à le traiter de peureux. L'ancien pilote de F1 Daniil Kvyat trouve pour sa part injuste que des athlètes russes soient bannis du sport international, ce qui va à l'encontre selon lui de ce que le sport nous enseigne en principe: l'unité et la paix. Les joueurs de tennis Andrey Rublev et Anastasia Pavlyuchenkova ont pris position contre la guerre déclenchée par l'armée de leur pays. Le gymnaste russe Ivan Kuliak, pour sa part, a affiché son soutien à Poutine sur le podium après avoir remporté une médaille de bronze. Le no.1 mondial de l'ATP Daniil Medvedev n'a pas directement condamné l'agression ou montré son support à Poutine, mais a mentionné vouloir la paix dans le monde entier.

Sanction et exclusion des équipes russes

Il reste que le mouvement général condamne la Russie. Wayne Gretzky a demandé à ce que les Russes soient exclus du prochain Championnat mondial de hockey junior cet été, le Jokerit de Helsinski et le Dinamo de Riga se sont toutes les deux retirées des séries éliminatoires de la KHL, la Pologne et la Suède ont refusé d'affronter la Russie en barrage de la Coupe du monde de soccer, tout comme la Tchéquie.

Q. Quelles sont les conséquences de l'invasion de la Russie sur les athlètes et équipes russes?

R. Face à ces réactions en chaîne, plusieurs fédérations ont pris position et ont imposé des sanctions aux délégations et athlètes russes.

Jeux paralympiques

Après avoir annoncé que les athlètes provenant de la Russie et du Bélarus seront autorisés à prendre part aux Jeux paralympiques sous bannière neutre, le CIO a revu sa position à la suite de pressions et a finalement décidé d'exclure les sportifs russes et bélarusses.

Soccer

La FIFA a suspendu les sélections nationales russes jusqu'à nouvel ordre, ce qui signifie que l'équipe masculine ne sera pas de la Coupe du monde 2022 en novembre, l'équipe féminine ratera l'Euro en Angleterre en juillet, et le Spartak Moscou, dernier club russe engagé en Coupe d'Europe cette saison, est exclu de la Ligue Europa.

L'UEFA, autre instance importante de soccer, a retiré l'organisation de la finale de la Ligue des Champions à Saint-Pétersbourg, pour plutôt la déplacer à Paris.

Formule 1

Le Grand Prix de Russie, 17e étape du calendrier 2022 de la FIA qui devait avoir lieu le 25 septembre à Sotchi, a été annulé. En fait elle est même allé plus loin quelques jours plus tard, en rompant définitivement son contrat avec le promoteur du Grand Prix de Russie pour les éditions à venir.

La FIA a par ailleurs décidé d'autoriser les pilotes russes ou bélarusses à participer sous drapeau neutre aux compétitions qu'elle régule, comme la Formule 1. Nikita Mazepin était le seul seul pilote russe engagé dans le championnat cette année, mais Haas a mis fin à son contrat et à celui de son commanditaire principal russe Uralkali. Mazepin a par la suite mis sur pied une fondation pour venir en aide aux athlètes dans sa situation. La Grande-Bretagne, elle, n'a pas attendu la décision de la FIA, et avait déjà choisi de bannir les pilotes russes de ses compétitions.

Hockey sur glace

l'IIHF ne permettra pas à la Russie et au Bélarus de participer aux événements internationaux jusqu'à nouvel ordre, en plus de retirer à la Russie l'organisation du Championnat mondial de hockey junior 2023, qui devait être joué à Novossibirsk et Omsk. Le tout aura les conséquences suivantes:

  • Coupe continentale de la FIHG 2022 (4-6 mars 2022).
  • L'équipe du club biélorusse HK Gomel ne participera pas.
  • Championnat du monde de hockey sur glace U18 de la FIHG2022 (21 avril-01 mai 2022)
  • Les équipes masculines U18 de Russie et de Biélorussie ne participeront pas.
  • Championnat du monde de hockey sur glace 2022 de la FIHG (13-29 mai 2022)
  • Les équipes nationales masculines de la Russie et du Belarus ne participeraient pas.
  • Championnat du monde de hockey sur glace féminin U18 de la FIHG 2022 (dates à déterminer)
  • L'équipe nationale féminine U18 de Russie ne participera pas.
  • Championnat du monde junior 2022 de la FIHG (dates à déterminer)
  • L'équipe nationale masculine U20 de la Russie ne participera pas.
  • Championnat du monde de hockey sur glace féminin 2022 de la FIHG (26 août-4 septembre 2022)
  • L'équipe nationale féminine de la ROC ne participerait pas.

La LNH a d'abord été moins tranchée. Elle a fait savoir qu'elle condamnait l'invasion de l'Ukraine par la Russie et qu'elle suspendait ses relations avec ses partenaires commerciaux en Russie. En outre, la LNH ne considère plus la Russie comme un lieu d'accueil pour toute compétition future impliquant la LNH, selon ce qu'elle a fait savoir par voie de communiqué. Mais les joueurs russes peuvent continuer de jouer, même s'ils sont soumis à des menaces grandissantes. Le 7 mars, la LNH a suspendu ses interactions avec la KHL, une décision qui pourrait bien compliquer le processus de signature de joueurs évoluant en Russie.

Ski et patinage

L'Union internationale de patinage (ISU) a donné suite à la recommandation du Comité international olympique et interdira les athlètes russes de concourir, et la Fédération de ski a annulé toutes les épreuves de ski prévues en Russie.

Volleyball

La Fédération internationale de volleyball (FIVB) a par ailleurs annoncé qu'elle avait privé la Russie de l'organisation des championnats du monde masculins en août et septembre et qu'elle chercherait un ou plusieurs autres pays hôtes. Le volleyball a également suspendu les équipes et clubs russes des événements internationaux, tandis que l'aviron et le badminton ont décidé d'exclure les athlètes russes de leurs compétitions.

Biathlon

Suivant aussi l'appel du CIO, la Fédération internationale de biathlon (IBU) a quant à elle décidé samedi de bannir les hymnes et drapeaux de la Russie et du Belarus lors des épreuves de Coupe du monde. En revanche, même si l'équipe ukrainienne de biathlon a déjà informé l'IBU qu'elle ne participerait à aucune des compétitions restantes de la Coupe du monde, le drapeau ukrainien sera hissé lors des événements pour honorer l'équipe ukrainienne.

Basketball

Au basketball, à l'exception des matches les mettant directement aux prises, les clubs russes alignés en Euroligue (Saint-Pétersbourg, Kazan et CSKA Moscou) devront jouer à l'étranger leurs matchs à domicile.

Les sports pas encore touchés

Du côté des sports qui n'ont pas encore pris de sanctions contre la Russie, les instances dirigeantes de trois sports olympiques – l'escrime, le tir et la boxe – sont dirigées par des Russes. Aucun n'a encore interdit aux athlètes du pays de concourir. La natation a choisi de laisser les athlètes concourir mais sous bannière neutre. Les Championnats du monde en petit bassin sont toujours prévus en Russie en décembre prochain.

Prévus du 26 août au 11 septembre, les Mondiaux de volleyball en Russie n'ont pour l'instant pas été déplacés mais semblent très menacés. Grande nation de ce sport, la Russie perd toutefois l'organisation des matches de la phase de groupe des Ligues des nations féminine à Oufa du 28 juin au 3 juillet et masculine à Kemerovo du 5 au 10 juillet.

Du côté de l'ATP et de la WTA, les Russes et les Bélarusses pourront continuer de prendre part aux tournois du circuit, y compris ceux du Grand Chelem, mais sont exclus de la Coupe Davis et de la Billie Jean King Cup. Les deux circuits ont par ailleurs annoncé l'annulation du tournoi de Moscou, prévu en octobre.

Q. Quelle est la mobilisation des athlètes face à l'invasion de l'Ukraine par la Russie?

R. En plus de se prononcer sur le conflit, plusieurs athlètes ont décidé de passer de la parole aux actes pour s'impliquer dans le conflit.

Les athlètes prennent les armes

C'est le cas de l'ancien champion du monde Vitali Klitschko, actuel maire de Kiev, qui a annoncé qu'il prendrait les armes (aux côtés de son frère Wladimir) pour défendre sa ville.

Même son de cloche du côté du boxeur Vasiliy Lomachenko, deux fois médaillé d'or olympique, de même que Oleksandr Usyk et plusieurs autres boxeurs ukrainiens.

L'ancien joueur de tennis Sergiy Stakhovsky a aussi rejoint les forces armées de son pays. Novak Djokovic lui a offert un soutien financier en guise de solidarité.

Des dons pour le peuple ukrainien

Elina Svitolina, qui a annoncé plus tôt ne plus vouloir jouer contre des Russes, a par ailleurs annoncé qu'elle ferait don de tous ses prochains gains pour soutenir l'armée et les actions humanitaires en Ukraine. Même son de cloche du côté du Britannique Andy Murray.

Le propriétaire des Sénateurs d'Ottawa Eugene Melnyk, fils de parents nés en Ukraine, a annoncé que son club amassera des fonds par l’entremise de tirages moitié-moitié lors de ces matchs pour venir en aide au peuple ukrainien.

Jaromir Jagr a annoncé que son équipe Kladno déplacera son dernier match à domicile de la saison régulière de l'Extraliga tchèque dans un plus gros aréna, l'O2 Arena de Prague. Les recettes des billets (qui ont totalisé 160 000 dollars) seront versées aux familles ukrainiennes qui cherchent actuellement asile en Tchéquie après l'invasion de la Russie.

Le milieu ses jeux vidéo s'organise aussi. Le développeur 11 Bit Studios, créateur de This War of Mine, remettra les profits du jeu à la Croix Rouge Ukrainienne. Pour sa part, Ubisoft fournira des logements et de l’aide financière aux équipes en Ukraine.

Q. Quelles sont les conséquences économiques sportives du conflit en Ukraine?

R. En plus de l'annulation des événements qui ont des répercussions économiques importantes, le monde de la finance a réagit au conflit et les conséquences se mesurent aussi dans le sport.

L'UEFA a rompu son partenariat avec le géant russe Gazprom, l'un de ses principaux commanditaires depuis 2012. Le contrat était estimé à 40 millions d'euros par an selon des médias spécialisés, et couvrait la Ligue des champions, les compétitions internationales organisées par l'UEFA ainsi que l'Euro 2024 qui sera organisé en Allemagne.

Adidas, le fabricant des maillots de l'équipe de soccer russe, a annoncé qu'il suspendait dès maintenant son partenariat avec la fédération.

Le club Manchester United a annoncé avoir révoqué son contrat de commandite avec la compagnie aérienne Aeroflot, à qui l'espace aérien britannique a été interdit. L'oligarque russe Roman Abramovitch, propriétaire de Chelsea, a dû revoir la gestion du club, qui est maintenant à vendre. En Allemagne, le club de D2 Schalke 04 a retiré le logo et le nom de Gazprom de ses maillots.

Q. Y a-t-il d'autres conséquences symboliques à ce conflit russo-ukrainien?

R. Oui. Même s'ils n'ont pas la même portée que des bannissements ou retraits de commandite, il est bon de noter ces actions dans la vague provoquée par le conflit au cours des derniers jours.

Fédération internationale de judo

La Fédération internationale de judo (FIJ) a suspendu le statut de président d'honneur qu'ils avaient accordé à Vladimir Poutine. Le président de la Russie est un judoka passionné et a assisté aux épreuves de ce sport pendant les Jeux olympiques de 2012, à Londres.

Comité international olympique

Autre mesure, symbolique mais forte, le CIO a aussi retiré "l'ordre olympique" à tous les hauts responsables russes, à commencer par le président Poutine.

Fédération internationale de natation

La Fédération internationale de natation (FINA) a fait savoir qu'elle retirait un honneur décerné à Poutine en 2014.

Formule 1

L'écurie américaine de Formule 1 Haas n'a pas abordé pas les couleurs russes de son commanditaire principal Uralkali lors de la dernière journée des essais avant le lancement de la saison.

Jeux vidéo

Alors que l’IIHF a suspendu les équipes russes et biélorusses de ses compétitions de hockey, EA Sports a décidé de faire de même dans l’espace virtuel de ses jeux NHL 22 et FIFA 22.

Q. Déplore-t-on des victimes du milieu sportif lors de cette invasion de l'Ukraine?

R. Oui. Trois athlètes ukrainiens sont morts au combat jusqu'à maintenant.

Vitalii Sapylo et Dmytro Martynenko, deux joueurs de soccer ukrainiens, de même que l’ancien biathlète Yevhen Malyshev, sont décédés lors des premiers jours de combats suivant l’invasion du pays par la Russie.

Sapylo, 21 ans, jouait pour l'équipe de réserve de Karpaty Lviv en tant que gardien de but. Martynenko, 25 ans, a quant à lui joué pour le FC Gostomel, un club de deuxième division ukrainienne.

Yevhen Malyshev, un ancien jeune biathlète, est mort la semaine suivante au service de l'armée ukrainienne. Il était âgé de 19 ans. Au début de la pandémie de COVID-19, il y a deux ans, Malyshev avait quitté l’équipe junior olympique ukrainienne de biathlon pour faire son service militaire.