(RDS) - Vainqueur du No-Limit Hold'em de 3.000$, 33e épreuve des 36e Séries mondiales de poker, ce qui lui a permis de mettre la main sur une bourse de 682 810 dollars américains, lundi, le Québécois André Boyer, l'analyste du poker au réseau des sports, se prépare pour la phase finale des Séries mondiales qui commence jeudi.

D'ici le tournoi final, le Québécois se repose à son appartement de Las Vegas, ville où il a appris à jouer au poker il y a environ 17 ans. Pas question de jouer au poker pour Boyer.

"Avant de pouvoir gagner ma bourse de 682 810 dollars, j'ai dû me taper 36 heures de poker en trois jours, dont 15 dans la seule première journée. Je crois mériter un peu de repos", a lancé Boyer, rejoint par RDS à Las Vegas.

"Au moins, nous disposons d'une période de repos de 15 minutes à chaque deux heures. C'est juste assez parce que quand nous sommes concentrés sur le jeu, nous aimons garder ce «beat» pendant une certaine période de temps", d'ajouter celui qui est aujourd'hui âgé de 62 ans. "Mais j'ai l'air d'en avoir 80", blague-t-il.

Seul face à 1000 participants

Gagner quelque 680 000 dollars sur une table de poker est un assez phénoménal et on peut facilement affirmer que les dollars accumulés sont proportionnels à l'effort investi et au stress ressenti, surtout lorsque l'on considère que 1010 personnes participent à la compétition.

Pour plusieurs, le poker, ce n'est qu'une question de chance. Mais c'est avant tout une question de stratégie... et comme dans tous les autres sports, c'est également une question de confiance.

"À la base, tous les participants se disent qu'ils ont une chance de gagner. Mais après la première journée, où nous sommes passés de 1010 à 57 joueurs, j'ai vraiment commencé à penser à la victoire. J'étais très confiant. Pas nécessairement parce que j'avais le plus de jetons devant moi, mais bien parce que les cartes roulaient bien pour moi", indique Boyer, dont la femme a terminé 12e et empoché plus de 25 000 dollars le lendemain de son éclatante victoire.

"Je suis arrivé à la dernière table avec une somme de quelque 320 000 dollars. Je suis ensuite descendu à 190 000 dollars. Étant un tantinet forcé de tenter un grand coup, j'ai tenté le grand coup. Mais j'ai bien failli être éliminé en tentant un «move» avec un as et un dix. J'ai finalement été sauvé à la dernière carte. Je n'ai pas gagné le «pot», mais j'ai repris mon argent. À partir de là, je me disais que le reste du tournoi serait pour moi un boni parce que j'aurais logiquement dû être éliminé. Peu importe ce qui allait m'arriver par la suite, j'étais déjà gagnant et je n'avais rien à perdre".

Toute une fin de tournoi

Boyer se rappelle également la toute fin du tournoi, fin où il aurait pu abandonner. Mais c'était bien mal connaître le Québécois.

"Vers la fin du tournoi, nous étions cinq à la table. Après avoir éliminé son plus proche rival, le meneur s'est ramassé avec 1.5 million de dollars devant lui. Pour ma part, je faisais quasiment pitié avec mon 300 000 dollars, cinq fois moins que lui. Mais j'ai réussi à éliminer les autres, nous nous sommes retrouvés en face en face et je l'ai défait", raconte celui qui analyse le poker à RDS depuis 2003.

La tête chaude, les mains gelées

Outre les maux de dos que peuvent ressentir certains participants après plusieurs heures de jeu, les joueurs de poker vivent un phénomène corporel assez unique, celui du déséquilibre de température entre la tête et le reste du corps. C'est du sérieux puisque même les médecins se sont déjà penchés sur la question et ils sont clairs : l'effort mental que demande le poker concentre une bonne partie du sang dans la tête du participant, ne laissant que des "miettes" au reste du corps.

"Le sang se concentre dans le cerveau et le reste du corps gèle. Vous remarquerez que la plupart des gars portent un manteau pendant les tournois. Personnellement, j'ai une très bonne circulation sanguine. Mais quand je joue au poker et que je suis concentré, j'ai les mains gelées et pourtant ma tête est terriblement chaude".

Tête-à-tête avec René Angelil

Le fait de gagner une épreuve des Séries mondiales a permis à Boyer de mettre la main sur un fameux bracelet des "Poker World Series", bracelet en or ressemblant à une montre qui est très convoité par les joueurs. Mais gagner une épreuve donne d'autres avantages, comme le fait d'avoir un accès direct à nul autre que René Angelil...

"J'ai parlé à René Angelil pour la première fois mardi. Il a participé au même tournoi que moi et a terminé 50e. M. Angelil m'a félicité et m'a avoué qu'il aimerait bien, lui aussi, mettre la main sur le fameux bracelet du gagnant, l'équivalent, pour un joueur de poker, à une bague de la coupe Stanley. Pour M. Angelil, l'argent du poker ne doit pas être très important, mais je suis convaincu qu'il ne joue que pour le bracelet", raconte André Boyer. "J'avais souvent joué dans la même salle que René Angelil, mais je ne lui avais jamais parlé pour la simple et bonne raison que je n'avais pas vraiment de raison de le faire. De toute manière, je suis convaincu que ces gens-là doivent être tannés de se faire déranger pendant le jeu. Il sait maintenant qui je suis, il connaît mon visage et je suis sûr que nous aurons la chance de parler de poker ensemble dans un avenir rapproché".

6600 participants

Mais d'ici à ses prochaines rencontres avec le mari de Céline ou avec d'autres millionnaires de ce monde, Boyer se concentre sur la grande finale qui regroupera un grand total de 6600 participants.

"C'est vraiment gros. Le casino peut accommoder 2200 joueurs par jour (220 tables par jour). La première ronde est donc échelonnée sur trois jours (ma femme joue la première journée; moi, la deuxième). En tout et pour tout, ce tournoi dure plus d'une semaine".

Des tournois du genre regroupent bien souvent les meilleurs joueurs de poker de la planète. Avec sa victoire de lundi, Boyer, qui avait gagné 12 000 dollars lors des Séries mondiales en 2004, s'est fait un nom sur la scène internationale du poker, mais il est encore peut-être un peu trop tôt pour le comparer aux Greg Raymer de ce monde. Mais pour Boyer, pas question de se laisser déconcentrer par les plus gros noms du poker.

"Personnellement, je préfère jouer contre des noms connus parce que c'est en regardant jouer les meilleurs que tu vas t'améliorer. Au poker, il ne faut pas se laisser intimider par les gros noms. Il ne faut jamais les éviter. En jouant contre ces têtes d'affiche, on a la chance de voir comment ils jouent, on peut apprendre leurs trucs. Et avec l'avènement du poker à la télévision, j'ai en quelque sorte un avantage car je sais comment ils jouent. Je peux donc mieux anticiper leur stratégie et éventuellement les déjouer.

"Et je tiens à rassurer Domenic Vannelli, producteur délégué à la programmation à RDS, je vais conserver mon poste d'analyste du poker à RDS. Et qui sait, avec 680 000 dollars de plus dans mon compe de banque, peut-être accepterai-je de travailler bénévolement? Je pense qu'il sera heureux d'apprendre ça".

"Et il sera sûrement heureux d'apprendre que je me promets un gros party à RDS si j'atteins la dernière table la semaine prochaine", de conclure notre collègue Boyer.